La Vie est Belle (1946) de Frank Capra

Après la guerre, et ce malgré une grosse décennie de succès qui l'ont porté au Panthéon du Septième Art avec des titres comme "New-York-Miami" (1935), "Vous ne l'Emporterez pas avec Vous" (1938) ou "Arsenic et Vieilles Dentelles" (1944) le réalisateur Frank Capra veut s'affranchir de la tutelle des grands studios hollywoodiens et fonde avec Georges Stevens et William Wyller leur propre société de productions, Liberty Films. Aussitôt est donc annoncé que leur première production sera "It's a Wonderful Life" signée de Frank Capra lui-même qui racheta les droits du projet à la RKO Pictures qui avait prévu d'engager la star Cary Grant avant que ce dernier ne déclina l'offre. Le projet est en fait l'adaptation de "The Greatest Gift" (1939) de Philip Van Doren Stern qui n'arriva pas à le faire publier dans un premier temps et qui transforma sanouvelle en une lettre de voeu envoyée à plus de 200 personnes de son entourage ! C'est cette histoire qui attira l'attention de la RKO. Capra co-signe le scénario avec Jo Swerling avec qui il a déjà travaillé notamment sur "Blonde Platine" (1931), puis avec le duo de scénaristes Frances Goodrich-Albert Hackett qui connaîtront un grso succès également avec le dyptique "Le Père de la Mariée" (1950) et "Allons donc, Papa !" (1951) de Vincente Minnelli. Capra porte donc sur ce film les casquettes de Producteur-réalisateur-scénariste...

La Vie est Belle (1946) de Frank Capra

Le décès de son père pousse un fils aîné à reprendre la société familiale de prêts à la construction qui tente de donner les moyens aux plus modestes de s'offrir une maison. Ce dernier, George Bailey, oublie donc ses rêves pour un avenir plus "terre à terre". Après quelques années, le succès de l'entreprise ne s'est pas démentie sans pour autant avoir apporté la fortune, il s'est marié et a eu trois enfants. Malheureusement, le jour de Noël, un associé perd une grosse somme d'argent qui précipite soudain la faillite de la société. George désespéré, pense alors au suicide, c'est alors qu'il rencontre un homme qui se dit un ange descendu du ciel afin de l'aider et ainsi pouvoir obtenir ses ailes... George Baily est incarné par le monstre sacré James Stewart qui retrouve Capra après deux précédents succès avec "Vous ne l'Emporterez pas avec Vous" (1938) et "Mr. Smith au Sénat" (1939). Son épouse est interprétée par la ravissante remarquée peu de temps avant dans le magnifique "Le Portrait de Dorian Gray" (1945) de Albert Lewin et vue dans "Tant qu'il y aura des Hommes" (1953) de Fred Zinnemann. Stewart et Capra retrouve l'acteur Lionel Barrymore après "Vous ne l'emporterez pas avec Vous", acteur qui avait débuté chez D.W. Griffith dès 1911. Citons aussi Thomas Mitchell qui était dans "Les Horizons Perdus" (1937) de Capra et "Mr. Smith au Sénat", Ward Bond qui retrouve Capra aussi après "New-York-Miami" (1935) mais qui sera surtout un ami et acteur fétiche de notamment cette même année avec "La Poursuite Infernale" (1946). Puis citons Henry Travers vu dans "La Grande Evasion" (1941) de Raoul Walsh et "Madame Miniver" (1942) de William Wyler, et enfin la pimpante Gloria Graham qui retrouvera James Stewart dans "Sous le Plus Grand Chapiteau du Monde" (1952) de Cecil B. De Mille avant de devenir une star avec "Règlement de Comptes" (1953) et "Désirs Humains" (1954) tous deux de ... Pour leur première production siglée Liberty Films l'optimisme était de rigueur avec un budget très généreux de plus de 3 millions de dollars, une somme énorme pour l'époque. Un budget qui a surtout servi aux décors sur un des plus grands jamais construits en studio avec plus de 16000m2 ! À noter qu'une partie des décors avait déjà servi pour "Cimarron" (1931) de Wesley Ruugles. Précisons surtout que l'impressionnante piscine sous plancher existe toujours et fonctionne encore aujourd'hui !

La Vie est Belle (1946) de Frank Capra

Plus qu'un film de Noël ce film est aussi une comédie de moeurs, une comédie sociale avec une critique certe sous forme de fable mais non moins présente du système capitaliste ce qui ne manquera pas d'en choquer certains à l'époque pré-Maccarthysme ; pour l'anecdote, le film était sur les fiches du FBI comme étant un film à portée communiste ! Le film se déroule entre 1928 et 1946, et donc rappelons la crise financière mondiale de 1929 qui fait forcément écho à l'histoire du film. Certe on retrouve l'esprit de Noël, et on reste dans un contre moderne mais cette fois on ne tombe pas dans la romance convenue ou le simple divertissement familial. Sur le fond Capra signe un film très critique envers le système capitaliste, et surtout contre la déshumanisation du système bancaire en donnant pourtant l'espoir d'un monde meilleur. Malgré tout le film ne critique pas l'"American Way of Life", bien au contraire, le film veut encore y croire, le message reste plein d'espoir et si l'optimisme du film est complètement utopique (voyons !) il laisse rêveur et il n'empêche pas une empathie qui fait de toute façon du bien. Le film est un hymne à la solidarité, à l'amitié et à la famille et même si on frôle parfois la mièvrerie jamais on n'y tombe car on est foudroyé par la joie, la bonté et un récit qui ne laisse aucun temps morts. Il se passe toujours quelque chose, dans des détails parfois insignifiants (l'eau du chapeau qui sert de pourboire ou un ancien qui plonge dans la piscine par exemple), dans les regards même en arrière-plan (le regard de Donna Reed envers son époux !), et toujours cet anti-héros qui vit une vie qu'il ne voulait pas et joué avec temps de justesse et d'humanité par James Stewart. Tous ses partenaires ne sont pas en reste de Lionel Barrymore parfait en tyran financier à Thomas Mitchell touchant en Oncle Billy tête en l'air en passant par les charmes de Donna Reed et Gloria Graham. Frank Capra indique dans son autobiographie : "La Vie est Belle n'était fait ni pour les critiques blasés, ni pour les intellectuels fatigués. C'était mon type de film pour les gens que j'aime. Un film pour ceux qui se sentent là, abattus et découragés. Un film pour les alcooliques, les drogués et les prostituées, pour ceux qui sont derrière les murs d'un eprison ou les rideaux de fer. Un film pour leur dire qu'aucun homme n'est un râté." Malgré tout, le film est un échec au box-office à tel point que Libertuy Films à peine créer mettra la clef sous la porte, racheté par Paramount dès 1947. Néanmoins, Capra récoltera un Golden Globe du meilleur réalisateur qui ne sera malheureusement pas transformé en Oscar qiu revient à son ami Wylliam Wyler pour "Les plus Belles Années de notre Vie" (1946). Malgré tout, la postérité a fait du film un des monuments du cinéma devenant entre autre le film le plus diffusé à la télévision américaine lors de fêtes de fin d'année avec "Le Magicien d'Oz" (1939) de Victor Fleming. Pour terminer, précisons que les deux stars du film, James Stewart et Donna Reed déclareront tous deux que "La Vie est Belle" est leur film préféré.

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Pour info bonus, Note de mon fils de 12 ans :

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