Police (2020) de Anne Fontaine

18ème long métrage pour Anne Fontaine qui reste sur une filmographie inégale mais intéressante. Sur ce nouveau titre qui renvoie aussi forcément aux autres films homonymes et entrer à la postérité que sont "Police" (1985) de Maurice Pialat et (2011) de Maïwenn. Ce nouveau projet est une adaptation du roman éponyme (2016) de Hugo Boris. Anne Fontaine co-signe le scénario avec Claire Barré qui a signé "Un Monde plus Grand" (2019) de Fabienne Bertaud et qui retrouve Anne Fontaine après son dernier film "Blanche comme Neige" (2019)... Trois policiers, Virginie, le brigadier Erik et Aristide, qui sont normalement en mission Police-Secours se retrouvent dans l'obligation d'assurer une mission d'escorte pour une reconduite d'un étranger à la frontière. Virginie comprend en lisant le dossier de l'individu qu'il risque sans aucun doute réellement la mort en entrant dans son pays, elle va alors tenter de convaincre ses deux collègues de le laisser s'échapper avant d'arriver à l'aéroport...

Police (2020) de Anne Fontaine

Les trois policiers sont incarnés par : Omar Sy qui n'a pas connu de succès personnel depuis (2016) de Roschdy Zem malgré sa présence au générique de l'excellent "Le Chant du Loup" (2019) de Antonin Baudry et dans "Tout Simplement Noir" (2020) de Jean-Pascal Zadi, Grégory Gadebois vu récemment dans (2019) de Roman Polanski et qui retrouve Anne Fontaine après "Marvin ou la Belle Education" (2017), puis Virginie Efira vue dans (2019) de Justine Triet et qui retrouve également la réalisatrice après "Mon Pire Cauchemar" (2011). L'étranger à reconduire à la frontière est joué par l'acteur iranien Peyman Maadi révélé dans les films "A Propos d'Elly" (2009) et "Une Séparation" (2011) tous deux de Asghar Farhadi et vu depuis à l'international dans (2016) et "6 Underground" (2019) tous deux de Michael Bay... Si le titre est parlant et significatif il n'en reste pas moins qu'il ne s'agit nullement d'un polar au sens premier du terme mais d'un drame social et humain. On suit trois policiers de base, chose assez rare pour le saluer car on oublie trop souvent que ce sont eux les "vrais" flics du quotidien et nullement les Starsky et Hutch qui pullulent dans tous les polars. D'ailleurs ce qui intéresse Anne Fontaine est bel et bien le quotidien "normal" d'un flic en tenu du bas de la pyramide mais qui se prend tout dans la gueule chaque jour. Le réfugié et son extradition n'est donc qu'un prétexte pour placer ces trois flics devant leur conscience autant professionnelle et personnelle. Certe on peut se dire que ces trois flics sont un peu caricatural, trois flics plus ou moins en burn out comme si tous les flics étaient de toute en façon en dépression ou en phase de drame personnel dans leur vie. Le raccourci est facile mais il faut aussi arrêter la flagellation, il existe aussi une majorité de flics heureux. Néanmoins, si ce trio permet un panel représentatif il l'est comme pour un tir groupé du burn-out policier. En cela on apprécie la première partie qui montre succinctement mais efficacement le quotidien d'un flic de base, même si on pourra sourire à la collection d'erreurs plus ou moins techniques.

Police (2020) de Anne Fontaine

Par exemple on ne se vouvoie pas aussi solennellement entre collègues (surtout de même corps de grade !), on menotte toujours derrière, si on laisse la "carotte orange" sur l'arme il est impossible de placer son arme dans l'étui... Autrement il est aussi surprenant que des policiers expérimentés soient étonnés ou surpris devant des situations banales pour eux, le trajet entre Paris 8ème et aéroport Roissy n'aura sans jamais semblé aussi long... Des détails pour le commun des mortels, mais qui démontrent pourtant encore et toujours une méconnaissance basique du monde policier (TOP des meilleurs films réalistes sur la police ici !). Pourtant, l'angle de vue choisit par Anne Fontaine peut se comprendre, d'abord parce qu'elle n'a que peu de temps pour nous immerger dans ce quotidien policier et qu'ensuite cela permet d'aller directement au but, à savoir le mal être policier. En cela le choix de la construction narrative de la première partie est plutôt judicieuse, on apprend mieux à connaitre chacun des policiers vis à vis de sa situation et des interactions entre collègues mais aussi entre vie privée et vie professionnelle pas toujours simple. Par contre, les flash-backs sont clairement surperflus car trop explicatif et démonstratif alors qu'en une scène on avait bien tout compris. le côté très froid voire malaisant au sein du commissariat est aussi caricaturale que fausse, et au vu des soucis de ces trois policiers il aurait été plus malin de montrer la véritable ébullition autour et au sein d'un commissariat au moins pour montrer les écarts, les solitudes, les particularités de ces trois policiers. Il n'en demeure pas moins que le climax pesant comme une chape de plomb est bien rendu et nous impose une tension omniprésente mais à hauteur d'homme. Le vrai bonus reste les trois policiers, profondément humain, profondément normaux, à la fois fort et fragile comme n'importe quel autre citoyen finalement. Trois policiers merveilleusement incarnés par un trio d'acteurs investis. La partie escorte jusqu'à l'aéroport est par contre la moins aboutie, trop longue et trop invraisemblable même si le jeu des acteurs, les personnages intimement bien croqués sauvent un peu le résultat. En ce qui concerne le réfugie, la conclusion est logique, quoi qu'on en dise on ne sait rien sur cet homme et que malgré ce qui se passe c'est reculer pour mieux sauter sans doute. En conclusion Anne Fontaine signe un drame psychologique touchant, révélant des fissures béantes et montrant des êtres humains en proie aux doutes comme n'importe qui. Dommage que les coulisses manquent de rigueur dans les détails, et dommage que le migrant soit si muet il aurait peu enrichir un peu l'escorte autrement. Un bon film malgré ses maladresses, intéressant à conseiller.

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