Frankie (2019) de Ira Sachs

Une co-production à majorité française avec Saïd Ben Saïd producteur pour ce qui est le premier film non new-yorkais du réalisateur Ira Sachs dont le sujet de prédilection est la question de l'homosexualité comme dans les films "Forty Shades of Blue" (2005), "Married Life" (2008) et "Keep the Lights On" (2012), et "Brooklyn Village" (2016), ce qui en fait à l'instar d'un Martin Scorcese ou d'un Woody Allen un cinéaste essentiellement new-yorkais bien que moins connu. Ce film germe dans la tête du cinéaste depuis de nombreuses années après avoir vu "Kanchenjungha" (1962) de Satyajit Ray, puis ensuite l'envie de tourner avec Isabelle Huppert après que celle-ci lui ait écrit suite à la sortie de son film "Love is Strange" (2014), et enfin, le projet prit enfin un tournant alors qu'à la quarantaine le réalisateur ait perdu une de ses amies, la cinéaste expérimentale Barbara Hammer, morte d'un cancer en 2019. Le hasard faisant bien les choses, son co-scénariste depuis 2012, Mauricio Zacharias qui est d'origine portuguaise, lui proposa de transposer l'histoire à Sintra au Portugal (ville classée à l'UNESCO) où justement Ira Sachs avait passé de vacances familiales durant sa jeunesse...

Frankie (2019) de Ira Sachs

Frankie, une célèbre actrice, est condamnée par la maladie. Elle décide de réunir ses proches pour d'ultimes vacances familiales dans la ville de Sintra au Portugal... Le réaliateur-scénariste a réuni pour l'occasion un casting hétéroclyte et international. Dans le rôle titre on retrouve logiquement la star française Isabelle Huppert dont le dernier rôle sous la direction d'un anglophone était pour (2018) de Neil Jordan. Ses maris sont joués par Pascal Greggory qu'elle retrouve après "Les Soeurs Brontë" (1979) de André Téchiné, "La Vie Promise" (2002) de Olivier Dahan et "Gabrielle" (2005) de Patrice Chéreau, puis l'irlandais Brendan Gleeson qu'on avait pas vu depuis "La Ballade de Buster Scruggs" (2018) des frères Coen. Pour le reste de la famille il y a Greg Kinnear qui était déjà dans "Brooklyn Village" de Sachs, Marisa Tomei qui a été essentiellement May Parker dans les derniers Marvel dont "Spider-Man : Far From Home" (2019) de Jon Watts, Jérémie Renier acteur fétiche des frères Dardennes vu dernièrement dans "L'Ordre des Médecins" (2019) de David Roux, puis citons la toute jeune Sienna Nanua révélée dans "The Last Girl" (2017) de Colm McCarthy... Dans un style entre Woody Allen et Eric Rohmer, Ira Sachs déroule son histoire sur une unique journée, condensant ainsi un destin sur une journée charnière où les personnages se retrouvent face à un deuil en devenir. Mais ce n'est pas tout, le réalisateur a voulu que les acteurs soient tous dans une économie de moyen et de jeu, comme l'explique Isabelle Huppert : "Bizarrement, j'avais juste l'impression d'être là. C'est un sentiment assez curieux. Je me disais parfois : "j'espère quand même que l'on va me voir dans le film !",

Frankie (2019) de Ira Sachs

une sensation qui lui a rappelé ses expériences dans les films "Sauve qui peut (la vie)" (1979) et "Passion" (1984) tous deux de Jean-Luc Godard. On passe donc une petite journée avec les membres de cette famille recomposée et de proches qui soutiennent Frankie sans pour autant parler de la maladie, sans pathos, continuant à parler de tout et de rien, juste être là et tenter de profiter des vacances à Sintra. Malheureusement, cette économie générale (jeu, décor, dialogue... etc...) empêche toute empathie et donc toute émotion. Les discussions sont ennuyeuses et sans enjeu, en tous cas pour le spectateur. L'achat d'un appart à 3 millions, la perte d'un bracelet hors de prix, l'idylle adoslescente, la déception amoureuse du fils... etc... Rien ne permet de s'accrocher à un fil directeur et rien ne permet réellement de nous attacher. Le spectateur se retrouve dans la position d'un simple témoin d'une journée familiale archi classique, archi ennuyeuse. Le pire est qu'on sent que certains acteurs s'ennuient avec nous (Brendan Gleeson en premier lieu !), tandis qu'on se demande pourquoi avoir choisi la ville de Sintra tant les paysages restent bien secondaires et ce n'est l'artificialité de la dernière séquence qui sauvera la donne. On aura connu Ira Sachs plus inspiré que cette chronique inepte malgré le talent et le charme de quelques passages.

Note : Frankie (2019) SachsFrankie (2019) Sachs