Harriet (2020) de Kasi Lemmons

Ce film était à l'origine un projet de téléfilm par Amblin pour la chaîne HBO avant de revenir dans les mains de la réalisatrice-scénariste Kasi Lemmons, une cinéaste à laquelle on doit des films peu connus chez nous comme "Le Secret du Bayou" (1999), "Talk To Me" (2007) et "Black Nativity" (2013). Des films toujours centré sur des protagonistes afro-américains, elle est forcément touchée par l'histoire de cette icône de la culture et de l'Histoire afroc-américaine. En effet, ce film est un biopic sur le personnage historique majeur afro-américain Harriet Tubman (Tout savoir ICI !), une héroïne esclave qui fuira pour devenir une des leaders d'un réseau d'évasion pour les esclaves du Sud entre 1848 à 1959, entre autres grands faits entrés à la postérité...

Harriet (2020) de Kasi Lemmons

Le rôle titre est tenu par Cynthia Erivo, actrice et également chanteuse vue dans "Sale Temps à l'Hôtel El Royale" (2018) de Drew Goddard et (2019) de Steve McQueen. A ses côtés on peut citer le chef du réseau clandestin incarné par Leslie Odom Jr. qui a la particularité d'être, avec sa partenaire Cynthia Erivo, lauréat d'un Tony Award et d'un Grammy Award. Une amie libre de naissance jouée par la sublime actrice-chanteuse Janelle Monaè déjà vue dans (2016) de Barry Jenkins, "Les Figures de l'Ombre" (2016) de Theodore Melfi et "Bienvenue à Marwen" (2018) de Robert Zemeckis. Et enfin, le méchant de l'histoire symbole de tous ces sudistes esclavagistes interprétés par Joe Alwyn, remarqué dans les excellents "Un Jour dans la Vie de Billy Lynn" (2016) de Ang Lee et "La Favorite" (2019) de Yorgos Lanthimos. Précisons enfin que la musique est signée de Terence Blanchard compositeur fidèle de Spike Lee notamment sur le dernier "Blackkklansman" (2018)... Rappelons que Harriet Tubman est une icône, qu'elle n'a rien à envier historiquement à un Martin Luther King ou à un Nelson Mandela et qu'il est en effet temps de lui rendre hommage. Une vie aussi extraordinaire méritait une fresque à la fois romanesque et historique, fidèle et authentique. Si la reconstitution est soignée, les décors et costumes également dès on s'aperçoit vite que sur le fond le film reste bien trop sage. Non pas qu'il faille tomber dans la démonstration des horreurs inhérents à l'esclavagisme mais de là à occulter complètement ces évènements dans le récit il y a une marge.

Harriet (2020) de Kasi Lemmons

Mais le plus dommageable reste la mise en scène et l'angle de vue choisi par Kasi Lemmons. Jamais elle ne transcende l'histoire, jamais elle n'insuffle d'intensité que ce soit dans l'émotion ou dans la simple angoisse d'une évasion. Par exemple la première évasion semble presque simple, tandis que celles qui suivent sont construitent de façon trop mécaniques et redondantes. La réalisatrice-scénariste être resté dans un style trop didactique, comme si elle était prisonnière de son sujet sans savoir comment se l'approprier. Ainsi le film ne montre aucune violence issue de l'esclavagisme, survole tout ce qui fait le danger d'une évasion ou usant des ficelles éculées (contrôle des faux papiers entre autres), maispar contre les dialogues tournent en boucle autour des thèmes raciaux d'abord, puis féministes ensuite ce qui alourdit le propos dont ce biopic n'avait nullement besoin tant le destin de Harriet parle pour elle et pour nous tous. Par contre, les acteurs sonttous impeccables, dont en premier lieu Cynthia Erivo. "Harriet" est un film pédagogique assurément, mais académique et sans souffle épique, on n'est ni dans "12 Years a Slave" (2013) de Steve McQueen ou "The Birth of Nation" (2016) de Nate Parker. En conclusion un film nécessaire sur une grande figure afro-américaine de l'Histoire, mais un film qui a tout d'un téléfilm de luxe, qui ne nous tient pas en haleine une seconde car repose sur une simple exposition linéaire de quelques faits marquants. Note indulgente.

Note :

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