[CRITIQUE] : Double Destinée

Réalisateur : Roberto Gavaldón
Avec : Dolores del Río, Agustín Irusta, Victor Junco,...
Distributeur : Les Films du Camelia
Budget : -
Genre : Drame, Policier, Thriller.
Nationalité : Mexicain.
Durée : 1h38min
Synopsis :
María, une employée sans le sou, assassine sa sœur jumelle, Magdalena, une riche bourgeoise récemment devenue veuve, pour prendre sa place et profiter ainsi de l’immense fortune dont elle vient d’hériter. Mais son meurtre hante la nouvelle vie qu’elle tente de mener.

Critique :

Double portrait fascinant, celui psychologique d'une femme frappée par la tragédie, et d'une société mexicaine des 40s gangrenée par la corruption, #DoubleDestinée, porté mar la double performance impériale l'icône Dolores del Río, est un petit bijou de mélodrame cruel et sombre. pic.twitter.com/FNsp1rPJjM
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) December 12, 2021

Que serait le film noir sans l'un de ses artifices scénaristiques les plus efficaces, le fascinant mythe du double et du jumeau maléfique ?
Il serait sans doute résolument moins jubilatoire à arpenter pour les cinéphiles, et le bien nommé Double Destinée de Roberto Gavaldón - connu comme le maître du mélodrame mexicain -, y aurait perdu le pivot central de sa narration, cinéaste majeur de l'âge d'or du cinéma mexicain, qui a profité du contexte socialo-politique difficile de son époque - la présidence Miguel Alemán -, pour offrir au genre quelques-uns de ses plus beaux efforts.
Mise en images du destin complexe d'êtres condamnés et condamnables à la fois, tissé autour du lien trouble et troublé entre deux soeurs jumelles frappées par le sceau de la cupidité et de la jalousie, le film suit Magdalena une femme fatale, vivant superficiellement et dans l'opulence suite au décès de son époux, ainsi que sa soeur Maria une manucure vivant dans la précarité la plus totale.
La seconde se répète constamment que la première lui a toujours tout pris - même l'amour - sans la moindre considération, tellement qu'un jour, désespérée et fatiguée par sa propre existence et cette vérité qui la ronge, elle va commettre l'impensable : tuer Magdalena et prendre sa place...

[CRITIQUE] : Double Destinée

Cruellement implacable dans sa manière de nous faire sympathiser avec Maria et son obsession pour sa soeur, avant qu'elle ne franchisse le point de non retour et quelle se fasse lentement emporté par le poids de sa culpabilité (mais surtout du bonheur illusoire de la richesse), Gavaldón use merveilleusement du film noir et des zones grises de la notion entre le bien et le mal, pour mieux dénoncer l'enfermement de la femme au coeur d'une société patriarcale, ou le seul espoir d'émancipation face au joug du pouvoir masculin, ne réside que dans des décisions fatales ou des actes compulsifs amoraux.
Un regard fort et intemporel, qui tranche avec la production Hollywoodienne plus policée de l'époque (et majoritairement masculin), et qui sert de sel autant à son fascinant portrait psychologique d'une femme frappée par la tragédie, qu'à celui de la société mexicaine.
Porté par une photographie somptueuse d’Alex Phillips (dont le travail sur le noir et blanc, les ombres et les jeux de miroirs, est d'une richesse folle), autant que par la double performance impériale l'icône Dolores del Río, Double Destinée est un petit bijou de mélodrame sombre et tragique, dont la (re)découverte tardive est un vrai plaisir.
Jonathan Chevrier

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