L'aveu

L'aveuUn film d'histoire, un film pour l'Histoire

Costa Gavras est assurément l’un des auteurs les plus engagés de son époque ; son œuvre regorge de films dénonçant les régimes politiques totalitaires. Là, il s’appuie sur l’auto biographie d’Artur London pour condamner le Stalinisme.

Ce film se déroule à Prague et raconte les procès staliniens menés par les soviétiques contre des hauts dirigeants tchécoslovaques accusés de haute trahison en 1952. Ce procès concerna 14 personnes (ministres, vice ministres…) dont la plus part furent exécutés à l’issue d’un procès fantoche. Costa Gavras, certainement dans l’idée dans faire un film intemporel, ne situe pas son film. Le spectateur baigne longtemps dans l’incertitude quant au lieu et la date de l’action. Montage et construction narrative (flash-back et flash forward, moderne pour l’époque) ne visent qu’à alimenter ce climat étrange. Il faut donc passer outre et accepter le deal : on ne comprend pas tout. Après tout, les procès de Prague ne sont qu’un prétexte pour décortiquer, au travers de ces procès iniques, toute la mécanique mise en place par les régimes totalitaires pour rendre coupable juridiquement des innocents. Cette logique, via des procès publics (ici diffusion radio), vise à montrer au peuple que le pouvoir est fort et que l’idéologie politique est supérieure. Costa Gavras se concentre sur les méthodes employés par ces régimes pour extorquer des aveux aux accusés. L’aveu, même aujourd’hui dans nos pays démocratiques, est la pierre angulaire de toute accusation ; les obtenir à n’importe quel prix est la marque du totalitarisme qui tente de légitimer son action.

Donc c’est un film froid et brutal de bout en bout construit à base de sévices à répétitions ; et l’analyse faite ici est bien intemporelle puisqu’elle détaille cliniquement une dérive totalitaire du pouvoir. Courageux aussi pour l’époque, le stalinisme avait séduit bon nombre d’intellectuel occidentaux à l’époque des faits alors que goulag, assassinats politiques et antisémitisme métastasaient le bloc communiste. 50 ans après sa sortie, les exactions de ces régimes sont prouvées, mais le propos est toujours d’actualité alors que la Russie a tendance à réécrire son Histoire.

L’atmosphère du film est étouffante, claustrophobe et kafkaïenne. Et au centre du film un Yves Montand qui livre une interprétation viscérale que l’on retrouvera chez Fassbender dans « Hunger ». Il nous prend aux tripes avec ce personnage qui croit que le parti incarne la vérité et que ce dernier ne peut pas agir de manière arbitraire. Mais c’est surtout lorsqu’Yves Montand est broyé par ce processus de déshumanisation qu’il nous sidère le plus.

Un incontournable… Petit traité des procès totalitaires

Sorti en 1970

Ma note: 16/20