Bronx (2020) de Olivier Marchal

Ex-flic, Olivier Marchal est devenu acteur puis réalisateur logiquement spécialisé dans les polars plus ou moins musclés. Il semble que le réalisateur-scénariste ait décidé de revenir à un polar recentré sur le "flic" comme dans "36 Quai des Orfèvres" (2004) et "MR 73" (2008) et non pas sur les "voyous" comme dans ses derniers films "Les Lyonnais" (2011) et (2017) suite à des conversations avec quelques membres de son public fidèle. Pour ce nouveau projet donc, le cinéaste s'est inspiré d'une ancienne affaire non résolue, la Tuerie du bar du Téléphone à Marseille en 1978. Une affaire qui avait été adapté avec "Le Bar du Téléphone" (1980) de Claude Barrois... Alors qu'il y a un nouveau patron à la PJ de Marseille, un massacre a lieu dans un bar isolé. L'enquête est menée par les deux services BRB sous le commandement de Costa et la BRI sous le commandement de Vronski. Les deux hommes ne s'entendent pas et les deux groupes sont en quelques sortes au sen d'un "guerre des polices". Sans surprise, le massacre mène à une autre guerre, une guerre des gangs entre les Bastiani, les Corses et les Maranzano. Tout part en vrille quand l'IGPN y met son grain de sel, soupçonnant des ripoux qui informeraient les gangs... Comme à son habitude, Olivier Marchal compose son casting de ses fidèles acteurs qui sont de tous ses films ou presque. Citons ainsi Francis Renaud (8 films 4 séries en commun), Moussa Maaskri (6 films 1 série), Catherine Marchal son épouse (6 films 4 séries), Patrick Catalifo (4 films 1 série), Alain Figlarz (4 films 1 série), puis Gérard Lanvin qui retrouve Marchal après les comédies "Le Fils à Jo" (2011- et "Papi Sitter" (2020) tous deux de Philippe Guillard et après "Les Lyonnais" (2011). Deux femmes magnifiques font un caméo de luxe, Dani qui était déjà dans "Carbone" de Marchal, puis surtout la légende Claudia Cardinale toujours là à 82 ans et plus de 62 ans de carrière depuis le court "Les Anneaux d'Or" (1956) jusqu'au récent "L'Île du Pardon" (2020) de Ridha Behi en passant par une douzaine de chefs d'oeuvres.

Bronx (2020) de Olivier Marchal

On peut citer l'inconnue Barbara Opsomer issue de la télé réalité poubelle qui trouve là son premier rôle "réelle". Le reste du casting voit défiler quelques gueules habituées du genre polar musclé avec en tête de liste Jean Reno qui renoue avec le genre après "L'Immortel" (2010) de Richard Berry dans lequel était également Moussa Maaskri et (2015) de Benjamin Rocher, Eriq Enouaney vu dernièrement dans "La Terre et le Sang" (2020) de Julien Leclercq, Erika Sainte qui retrouve Marseille et les gangs après (2014) de Cédric Jimenez, Jeanne Bournaud qui recroise donc des voyous après "Braqueurs" (2016) de Julien Leclercq. Enfin, citons les quatre personnages centraux du groupe BRI composé de quatre acteurs très différents avec David Belle remarqué particulièrement pour le dyptique "Banlieue 13" (2004-2009) de Pierre Morel, le rappeur Kaaris qui retrouve Marchal après la comédie "Fastlife" (2014) de et avec Thomas Ngijol mais qui a surtout fait ses armes au cinéma avec les films "Braqueurs" (2016) et (2018) tous deux de Julien Leclercq, Stanislas Merhar ex-jeune premier passé un peu sous les radars ces dernières années après des films comme "Nettoyage à Sec" (1997) de Anne Fontaine, "Adolphe" (2003) de Benoît Jacquot ou "L'Ombre des Femmes" (2015) de Philippe Garrel, puis le rôle principal tenu par Lannick Gautry qui est pourtant et surtout abonné aux comédies familiales comme "Brice de Nice" (2005) de James Huth, "la Cage Dorée" (2013) de Ruben Alves mais il retrouve Claudia Cardinale après "Les Francis" (2014) de Fabrice Begotti et a joué avec Gérard Lanvin dans "Premiers Crus" (2015) de Jérôme Le Maire... Quand on connaît Olivier Marchal on appréhende forcément tant il a déçu par le passé, car en tant qu'ex-flic il est difficilement excusable sur les invraisemblances notamment techniques de ses films. Malheureusement, dès les premières minutes on n'est pas surpris par la succession de plans et/ou de scènes complètement à côté de la plaque. Faisons court et rapide : impossible lors d'un tel transfert qu'un seul officier décide de faire un détour, encore moins d'escorter seul un malfrat dans un service hospitalier inconnu et toujours encore moins en laissant le malfrat seul quelques minutes ! Ou alors fallait faire de Vronski chef de la BRI un ripoux d'entrée ! Bref, ça commence mal. Juste après on sourit devant le faste d'une villa qui sert à un pot de bienvenu entre collègues ?! On croit rêver, on n'est plus à Marseille en France mais dans une république bananière.

Bronx (2020) de Olivier Marchal

Les nombres ahurissants d'incohérences et d'invraisemblances est juste hallucinants (et dîtes-vous bien qu'une liste serait très très longues !). Certaines peuvent paraître de petits détails (par exemple le flic accepte un détour au CH, pourquoi pas il est peut-être effectivement déjà un ripoux et/ou trop con pour voir le danger ?!) mais d'autres sont inacceptables car cassent toute crédibilité à l'histoire même du film : comment croire qu'après un massacre d'une telle ampleur l'Identité Judiciaire lors des constatations n'ont pas retrouvé et/ou auraient laissé autant de matos sur place ?!?! (gilets pare-balle, arme de guerre !), puis ensuite comment imaginer des flics de la BRI et BRB aussi stupides, aussi peu soigneux, aussi peu professionnels qu'ils laissent tous leurs empreintes digitales absolument partout et tout le long du film !!?!!! Et pourtant le scénario est si dense, voir alambiqué qu'il y avait un vrai potentiel de fresque façon "Le Parrain" ou "Scarface". En effet, guerre des polices + IGPN + guerre des gangs + ripoux... etc... En seulement 1h55 c'est juste impossible de rester cohérent que ce soit narrativement ou même exploité correctement les personnages. Ces derniers sont tous survolés et/ou résumés à une caricature (le costaud, l'alcoolo, l'incorruptible, le ripoux des ripoux, la balance... etc... tous y passent !), tandis que l'intrigue principale déroule sans discontinuer créant un rythme très soutenu alors même qu'il aurait bien fallu 45-60mn de plus pour étoffer et construire un récit qui soit solide et crédible. Une autre chose frappe, alors que tous les personnages sont à un moment ou un autre fragilisés (stress, angoisse, peur, burn-out, peut pour les siens... etc...) il est étonnant que seul Vronski semble serein à chaque instant, il va même rassurer sa femme enceinte tranquillement sans jamais stressé au moisn pour sa sécurité, sans même jamais pensé à la mettre en sécurité ailleurs. Pourquoi ?! Comment ?! Là aussi, ce personnage n'est pas crédible une seule fois, entre le début et son évolution on a l'impression qu'il est au-dessus de tout ce qui n'est pas cohérent avec l'histoire même du film. La fin n'est pas si surprenante, elle est même logique vu tout ce qui précède mais encore aurait-il fallu être logique ou, du moins, être un chouïa plus explicite car comment croire à ce "twist" final : roi des ripoux ?! La plupart des acteurs ont tellement la gueule de l'emploi qu'une certaine magie, pour ne pas dire fantasme, opère même si Lannick Gaudry n'est pas aidé par un personnage particulièrement mal écrit (un comble pour le personnage principal) tandis que les femmes demeurent trop en retrait (mention à la jeune Barbara Opsomer qu'on risque fort de revoir). En conclusion, un des pires films de Olivier Marchal, il a poussé encore plus loin sa science-fiction policière alors même que les idées de base et la ligne directrice étaient prometteuses. Il aurait fallu allégé (un gang ne moins, un ripoux en moins ?!) ou alors ajouté 1 heure et assumé la fresque mafieuse façon Coppola ou Scorcese (de l'ambition que diable !). Une grand déception d'un côté, mais si naturel pour un Marchal. Note généreuse.

Bronx (2020) Olivier Marchal