Relic (2020) de Natalie Erika James

Premier long métrage pour l'australienne Natalie Erika James qui, après quelques courts métrages durant ses études dont "Tritch" (2011) et "Burrow" (2013), a été remarqué par les producteurs de Carver Films et qui ont attendu qu'elle arrive avec un projet. Elle a commencé à écrire pour ce projet dès 2014 en s'inspirant de son expérience, à savoir après après avoir rendu visite à sa grand-mère atteinte de la maladie d'Alzheimer. Une visite malheureusement arrivée un peu tard puisque sa grand-mère ne la reconnaissait déjà plus : "En un sens, c'était presque pire que la mort - voir une personne que l'on aime disparaître progressivement pour devenir une étrangère." La cinéaste collabore avec Christian Phillips au scénario pour signer d'abord un court métrage "Creswick" (2017) qui va poser les bases du long métrage. La réalisatrice-scénariste précise qu'elle voit son film comme "une histoire multigénérationnelle pour créer un film d'horreur centré sur les personnages et émotionnellement fort - je voulais explorer la douleur et les horreurs de la démence due au grand âge, l'importance des rapports humains et le changement des rôles et de la dynamique au sein d'une famille." Natalie Erika James déclare être fan du cinéma d'horreur asiatique, de (1980) de Stanley Kubrick et de "Videodrome" (1984) de David Cronenberg, mais pour son long métrage elle avoue avoir prit comme référence le chef d'oeuvre "Kill List" (2012) de Ben Wheatley pour la montée en puissance et la tension, et des films "Les Autres" (2001) de Alejandro Amenabar et "L'Orphelinat" (2008) de Juan Antonio Bayona pour la dimension émotionnelle et familiale.

Relic (2020) de Natalie Erika James

Pour l'anecdote, on trouve parmi les co-producteurs un certain Jake Gyllenhaal, star qu'on a pas vu devant la caméra depuis "Spider-Man : Far From Home" (2019) de Jon Watts... Kay et sa fille sont appelées par la police pour les avertir que Edna, leur mère et grand-mère octogénaire a semble-t-il disparu depuis quelques jours. Arrivées sue place, elles emménagent dans la maison familiale pour tenter de comprendre et en espérant que la police retrouve Edna. Après 3 jours, soudainement et sans prévenir Edna réapparaît mais elle semble peu à peu perdre l'esprit, alors que la maison semble tout aussi étrange... Le film est donc portée par trois personnages féminins, Edna, Kay et Sam respectivement incarnées par Robyn Nevin, actrice à près de 60 ans de carrière déjà vue par exemple dans "Matrix Reloaded" et "Matrix Revolutions" (2003) des Wachowski, Emily Mortimer qui a abordé Alzheimer récemment dans "Du Miel plein la Tête" (2018) de Til Schweiger et vue depuis dans "Le Retour de Mary Poppins" (2018) de Rob Marshall, puis enfin Bella Heathcote, future grande remarquée déjà dans des films comme "Orgueil et Préjugés et Zombies" (2016) de Burr Steers, "The Neon Demon" (2016) de Nicolas Winding Refn et "My Wonder Women" (2017) de Angela Robinso... Le film démarre par une disparition inquiétante, on rencontre les deux femmes qui prennent possession des lieux entre inquiétudes légitimes et impuissance. La premier tiers du film s'avère un peu long toutefois, il faut attendre le premier "rebondissement" pour que le récit évolue enfin. Le scénario malin et si intelligent sur le fond prend toute son ampleur à partir de là.

Relic (2020) de Natalie Erika James

Mêlant avec parcimonie des paramètres inhérents au genre (slump-scares, bruits étranges...) aux détresses intra-familiales dues à la sénilité de Edna. Ainsi, si on sait qu'on est avant tout dans un film d'horreur le drame de la maladie et de la vieillesse est tout aussi présent, voir même prend le pas tout en s'enfonçant dans le fantastique. Le basculement entre horreur et émotion n'est jamais flagrant, on est toujours sur le fil du rasoir entre les deux car si l'horreur semble provenir d'une créature fantastique (démon ?!) il y a toujours cette petite pensée, cette petite espérance que Edna n'est en fait en proie qu'à sa démence sénile. Même quand Edna semble hantée et qu'elle fait franchement froid dans le dos il y a ce doute persistant qui est omniprésent, marqué d'ailleurs par les actions et réactions de Kay et Sam qui ne sont jamais dans le dégoût, la haine ou la démission. Le mal qui ronge Edna, ronge aussi la maison symbole de toute une vie où les souvenirs se fondent ce qui crée une allégorie aussi poétique qu'effrayante. Des souvenirs qui sont aussi symboliquement en train de "fondre" ou de "se perdre" dans la maison labyrinthique, alors que tout se fissure chez Edna. Le climax et les décors sont clairement dans la mouvance du genre, on est dans un film d'horreur, si ça n'est ni orignal ni nouveau il faut avouer que ça fait son effet surtout dans sa dernière partie. Lourd et pesant au début, le film monte en puissance doucement oscillant parfaitement entre frisson pur du fantastique et frisson émotionnelle de la simple démence. Un mariage fort car il oblige à la compassion plutôt qu'à une répulsion primaire ce que qu'on ne connaît pas. En cela, le final est d'une intelligence rare, où le drame offre une poésie funèbre qu'on peut voir comme un happy-end abstrait autour de la ronde de la vie te de la mort. Natalie Erika James signe un premier film magnifique, ni tout à fait horreur ni tout à fait drame, et à la fois les deux en même temps, et parfois l'un et l'autre successivement. Rarement un film d'horreur aura été aussi fort autour de ces deux points de vue. Natalie Erika James, un nom à se rappeler !

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