Tueur d'Elite (1975) de Sam Peckinpah

Après "Apportez-moi la Tête d'Alfredo Garcia" (1974) le nouveau film de Sam Peckinpah adapte le roman éponyme en V.O. "The Killer Elite" (1974) de Robert Rostand, pseudo du romancier Robert Syd Hopkins. A ne pas confondre avec le plus récent "Killer Elite" (2011) de Gary McKendry. Le scénario est co-écrit par Marc Norman auteur de "L'Evadé" (1975) de Tom Gries et surtout par Stirling Silliphant auquel on doit quelques grands films dont "Dans la Chaleur de la Nuit" (1967) de Norman Jewison et "Les Flics ne Dorment pas la Nuit" (1972) de Richard Fleischer...

Tueur d'Elite (1975) de Sam Peckinpah

Mike Locen est un agent indépendant dont le principal employeur demeure la CIA. Lors d'un mission il est trahi par son ami et collègue qui le laisse gravement blessé et qui disparaît ensuite. Désormais handicapé et sans emploi il décide pourtant de lutter et de retrouver son autonomie à la surprise de ses patrons qui lui demandent de rempiler pour une mission délicate... Mike Locen est incarné par James Caan alors en plein apogée après "Le Parrain" (1972) de Francis Ford Coppola, "Le Flambeur" (1974) de Karel Reisz et "Rollerball" (1975) de Norman Jewison. Son ami et ennemi est interprété par l'excellent Robert Duvall, les deux acteurs se retrouvent ainsi après "Les Gens de la Pluie" (1969) et "Le Parrain" tous deux de Coppola. Dans les seconds rôles on peut citer Arthur Hill remarqué dans "L'Homme le plus Dangereux du Monde" (1969) de Jack Lee Thompson et "Le Mystère Andromède" (1971) de Robert Wise, Burt Young vu dans "Chinatown" (1974) de Roman Polanski et retrouve James Caan après "Le Flambeur", puis Bo Hopkins fidèle de Peckinpah après "La Horde Sauvage" (1969) et "Guet-Apens" (1972)... Le film mixte deux intrigues, l'une de vengeance, et l'autre d'espionnage. Si la vengeance est comme souvent trop classique, la partie espionnage est largement la plus intéressante avec la CIA en arrière-plan, ses ramifications et ses secrets. Malheureusement cette partie reste malgré tout sous-exploitée pour un simple final qui fait la part belle à la simple mission de garde du corps d'un chinois important. Si le film reste un des moins violents de Peckinpah le film reste pourtant focaliser sur l'attaque-défense de ce chinois. Mais là encore le réalisateur se prend les pieds dans le tapis, on peut même dire qu'on se demande comment un tel cinéaste a pu se fourvoyer autant ?! En effet, l'affaire est une affaire chinoise et on se demande pourquoi et comment il peut y avoir des incohérences " ethniques " comme l'arrivée de ninjas et de katanas typiquement japonais ?! Et si on passe sur ça on ne peut que sourire au ridicule de ces ninjas, sortes de caricatures de fans en pyjamas grossiers.

Tueur d'Elite (1975) de Sam Peckinpah

A cet instant, on reste éberlué tant on plonge dans le nanard alors qu'il y a au générique un nom prestigieux comme Peckinpah, sans parler de son duo star. L'absence total d'humour et/ou d'autodérision conforte dans l'idée d'un râtage pur et simple. Et pourtant, la première partie est excellente et particulièrement efficace, lors de la rééducation on espère encore que le scénario devienne plus dense notamment niveau espionnage, les acteurs sont bons et semblent pourtant y croire avec des séquences efficaces (essentiellement dans la première moitié)... Et patatras, la partie espionnage nous laisse sur notre faim, les ninjas sont risibles et on s'aperçoit que Robert Duvall est sous-exploité. Finalement on ne peut que constater l'improbable, que ce film de Peckinpah est d'une médiocrité à laquelle il ne nous avait pas habitué. On perçoit les thématiques déjà abordées par Peckinpah comme l'amitié trahie et la vengeance, mais surtout il semble que le réalisateur, auteur d'une thèse sur la captation de théâtre en vidéo et fin connaisseur de Bertolt Brecht, ait voulu justement voulu développer un concept de Brecht, à savoir la distanciation. Peckinpah aurait donc voulu "désarmorcer une violence que le cinéaste rendait lyrique dans ses oeuvres précédentes". Il n'en demeure pas moins que la sauce ne prend pas, il s'agit sans aucun doute de son plus mauvais film. D'ailleurs James Caan lui-même, en 1977, a déclaré qu'il attribuait un 0/10 au film ! Par là même, à contrario on peut citer le réalisateur japonais Shinji Aoyama qui place le film comme l'un des plus grands films de tous les temps en 2012 : "Aucun autre film ne m'a appris autant sur la dignité humaine que The Killer Elite."...

Tueur d'Elite (1975) Peckinpah