Alexandre le bienheureux

Alexandre le bienheureuxUne ode à la paresse... ou au bonheur
Alexandre, paysan fort comme un bœuf (comme se plait à l’ânonner « La grande », sa femme), trime du matin au soir dans sa belle et grande exploitation agricole, pourchassé par une épouse ne lui laissant aucun temps de repos ; jusque dans le lit conjugal. Il n’aspire qu’au farniente ; la mort accidentelle de sa femme, loin d’être un drame, est une délivrance. Il va pouvoir se reposer accompagné dans cette lourde tâche par son seul compagnon digne de confiance : son chien. 2 mois passent et l’inquiétude gagne le village, si ce besoin de souffler devenait contagieux et que tout le pays se mettait au repos. Les villageois par crainte de voir ce virus se propager vont tenter de le remettre au boulot.Un vrai grand classique de la comédie populaire « de qualité » à la française pour un Yves Robert qui en réalisera bien d’autres qui rentreront dans le panthéon du genre ; populaire mais ne sombrant jamais dans la franchouillardise. A part un générique de début qui ferait fuir le canapé dès les premières minutes, ce film au scénario somme tout hyper léger ne manque pas de fantaisies et donc de ressorts comiques originaux difficiles à énumérer tant ils sont légion. Ce film est aussi le premier rôle titre d’un acteur majeur du cinéma français : Philippe Noiret accompagné par une Marlène Jobert en demi-teinte, mais Françoise Brion sévère limite militaire aux claquements de doigts insupportables offre une opposition haut de gamme à son homologue masculin. En matière de casting, n’oublions pas le petit cabot hyper expressif, véritable second rôle et l’égal du chien de « The Artist ».Et puis, il y a surtout le message véhiculé par ce film sorti juste avant le printemps 1968 ; une ode libertaire. Il bat en brèche ce contre quoi va s’opposer la jeunesse : la vieille France à papa. C’est un coup de pied dans les valeurs traditionnelles : mariage, travail, famille, religion. Ce film est donc intemporel car il parle aussi bien au « Boudu sauvé des eaux » de Renoir qu’à notre époque contemporaine dans laquelle paresse et oisiveté sont des luxes en rappelant au combien elles sont aussi des vertus.En période de confinement, ce film raisonne aussi bizarrement ; revu plus de 20 ans après ma première projection, je porte un regard plus bienveillant aujourd’hui qu’hier sur lui… avoir impérativement et pourquoi pas dans les quelques semaines de confinement que nous devons tous encore subir.
Sorti en 1968
Ma note: 16/20