Sans Toit Ni Loi (1985) de Agnès Varda

Pionnière de la Nouvelle Vague, étant même celle dont le film "La Pointe Courte" (1954) devrait être à l'origine du mouvement, Agnès Varda s'intéresse avec ce film au destin d'un sdf qu'on a retrouvé morte dans un fossé. On peut lire que ce film serait du genre dit "documenteur" (1981) en référence à son long métrage précédent, comme étant un film mixte entre documentaire (une des spécialité de la réalisatrice) et la fiction. Pourtant la nuance n'est pas la même, on pourra plutôt dire que cette fois Varda signe un docu-fiction où une intervieweuse (Varda en voix off) tente de retracer les jours précédents la mort de cette sdf... Le film est avant tout un hommage à Nathalie Sarraute, figure majeure du mouvement littéraire le Nouveau Roman (contemporain de la Nouvelle Vague), un mouvement qui donne une place particulière au narrateur... La sdf est incarnée par la jeune Sandrine Bonnaire une fois de plus épatante qui venait de connaitre la consécration avec un César du meilleur espoir pour "A nos Amours" (1983) de Maurice Pialat, et qui venait de jouer dans "Police" (1985) de Pialat.

Sans Toit Ni Loi (1985) de Agnès Varda

La jeune femme croise plusieurs personnages durant son périple funeste, la plupart incarnés par des acteurs amateurs, mais on reconnait tout de même Macha Méril elle-même figue de la Nouvelle Vague avec notamment "Une Femme Mariée" (1964) de Jean-Luc Godard, mais aussi les débutants Stephane Freiss qui connaîtra une reconnaissance surtout à partir de "Chouans !" (1989) de Philippe De Broca, puis une certaine Yolande Moreau qui joue là dans son premier long métrage après avoir déjà joué pour Agnès Varda dans son court métrage "7p., cuis., s. de b... à saisir" (1984)... Pour les besoins de son film, Varda pointilleuse comme peut l'être une documentariste, a écumé elle-même les routes de la vallée du Rhône pour y prendre les auto-stoppeurs pour recueillir un maximum de témoignages. Le premier constat est qu'on se demande pourquoi la cinéaste n'a pas choisi un véritable documentaire sur ce sujet ?! En effet, ce docu-fiction est d'un réalisme sans fard, d'un naturalisme extrême qui n'amène aucune beauté que ce soit sur le fond ou la forme. La photographie est sans artifice à quel point que même les paysages sont laids, autant que le sont les personnages dont seul le personnage joué par Macha Méril apporte une certaine empathie.

Sans Toit Ni Loi (1985) de Agnès Varda

Même le personnage central, la sdf serait presque antipathique, ou du moins nous laisse indifférent. Le soucis de cette dernière est qu'elle n'est pas obligatoirement à la recherche d'une liberté et/ou du'une solution. Cette jeune femme n'a pas grand chose d'attachant, son sort funeste est le seul instant où l'émotion nous saisit. Ce qui est à la fois rassurant et incompréhensible c'est que tout est pensé, qu'on devine que Varda a voulu son fil ainsi, d'où le pourquoi du comment ?! Un documentaire était alors bien plus pertinent... Le décalage est d'autant plus difficile que les "acteurs" amateurs sont extrêmement mauvais, sans aucune nuance émotive et parfois en simple récitation de dialogues bien pauvres. Ce choix d'acteurs entre amateurs et pros rend le film encore plus bancal et surtout, sur ce point, donne une sensation de fausseté qui entre en contradiction avec la volonté de la cinéaste. Et pourtant, malgré tout, ce film sera le plus gros succès de la réalisatrice au box-office, avec en prime un Lion d'Or au festival de Venise et un seconde César pour Sandrine Bonnaire, pour la meilleure actrice cette fois-ci. Varda retrouvera d'ailleurs Bonnaire une prochaine fois pour le film "Les Cent et Une Nuits de Simon Cinéma" (1995)... En conclusion un film surestimé, car trop laid à tous points de vue, surtout dénué d'émotion d'abord par le manque d'empathie général et le peu de crédibilité des amateurs.

Note :

Sans Toit (1985) Agnès Varda