Resurrect Dead : The Mystery of the Toynbee Tiles

Resurrect Dead : The Mystery of the Toynbee Tiles

Connaissez-vous les Toynbee Tiles - ou Tuiles de Toynbee ? Cette étrangeté nous vient des États-Unis. Il s'agit de plaques de linoleum engluées dans l'asphalte et délivrant d'étranges messages, dont le plus connu est le suivant : Toynbee idea In movie 2001 Resurrect dead On planet Jupiter. Comprendre : L'idée de Toynbee Dans le film 2001 Ressusciter les morts Sur la planète Jupiter. Un message, délirant pour beaucoup, angoissant pour d'autres, que l'on retrouve différemment formulé sur plus de six cents plaques disposées dans les rues de Philadelphie mais également de New York, Baltimore et jusqu'en Amérique Latine, au Chili ou en Uruguay ( la carte des tuiles recensées, si vous êtes joueur). Si l'existence de ces plaques n'a jamais eu aucune influence sur votre vie, sachez que ce n'est pas le cas de Justin Duerr. Artiste autodidacte, encré dans le style de l'art brut, il a quitté le lycée à 14 ans et vécu de nombreuses années dans des squats avant de partir travailler sur des bateaux de pêche. Entre chaque saison de pêche, Duerr revient à terre pour se lancer dans des projets artistiques divers et variés (musique, art plastique, performance), une passion qui le dévore véritablement de l'intérieur. C'est à l'occasion d'un job de livreur qu'il est amené à parcourir assidument les rues de Philadelphie et qu'il découvre que les tuiles se multiplient. Elles sont partout, à chaque croisement de rue. Le besoin de sens se met à démanger Duerr et, à l'été 2005, il jure de lever le voile sur la signification et l'identité du poseur de tuiles. Il joint ses efforts à d'autres curieux et se retrouve bientôt sous l'objectif du réalisateur Jon Foy, à qui l'on doit ce formidable documentaire, Resurrect Dead : The Mystery of the Toynbee Tiles. Le cinéaste suit Justin Duerr et l'accompagne dans ses hypothèses, qu'il s'agisse de la signification des cartouches cryptiques (qui conjugue les références à l'historien Arnold Joseph Toynbee, au 2001 de Stanley Kubrick et à la pièce 4 AM de David Mamet) ou de l'identité mystérieuse du street artist. À mesure qu'il avance, le film prend les allures d'un whodunit artistique, il établit la liste des suspects, met à l'épreuve leurs alibis, collecte des témoignages pour avancer jusqu'au maniaque du lino. Je n'irais pas plus loin dans l'exposition du contenu tant cela reviendrait à dépouiller le propos du film et gâcher sa saveur. Revenons-en donc à la forme. On peut dire de Resurrect Dead qu'il s'agit d'un projet bigger than life - plus grand que nature. Le documentaire se laisse totalement dépasser par son histoire, l'enquête artistique se mue en quête introspective. Devant la silhouette du serial tuileur apparaît, en surimpression, le portrait de Justin Duerr, ex gamin paumé et artiste autoformé. Le chasseur devient lui-même la proie du documentaire et sa réception du mystère devient aussi fascinante que la résolution du mystère elle-même. Si vous en doutiez encore, Resurrect Dead est une belle pépite à ne pas manquer, honnête et pleine de poésie. Sous l'apparence simple de l'enquête, les thématiques s'élargissent, elles deviennent multiples, ontologiques et existentialistes, et vous toucheront forcément d'une manière ou d'une autre.

Resurrect Dead : The Mystery of the Toynbee Tiles