Rebecca

Un grand merci à Carlotta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Rebecca » d’Alfred Hitchcock, dans le cadre de la sortie du coffret « Alfred Hitchcock - les années Selznick ».

Rebecca

« J’ai rêvé la nuit dernière que je revenais à Manderlay... »

C'est à Monte-Carlo que le richissime et séduisant veuf Maxim de Winter croise le chemin d'une jeune domestique qu'il ne tarde pas à séduire. Bientôt, ils se marient et retournent habiter dans le manoir de Manderley, demeure familiale de Winter, au sud de l'Angleterre. Très rapidement, dans cet endroit lugubre et froid, la nouvelle Mme. de Winter se confronte aux domestiques qui ne semblent guère l'apprécier. Surtout, c'est Mme. Danvers, la gouvernante, qui est la plus vindicative. Car depuis toujours, elle servait Rebecca, l'ex-femme de M. de Winter décédée un an plus tôt dans un accident. Son souvenir semble hanter le château...

« Vous croyez que les morts viennent hanter les vivants ? »

Rebecca_Joan_Fontaine

Ancien graphiste pour la publicité, Alfred Hitchock se découvre une passion pour le cinéma alors qu’il réalise de nombreux intertitres pour des films muets.  Au gré de ses rencontres, il se voit offrir l’opportunité de passer derrière la caméra dès le début des années 20.  Mais après plusieurs projets inaboutis et autres échecs, il faut véritablement attendre le succès de son film « Les cheveux d’or » en 1927 pour qu’il accède à une reconnaissance public et critique. Passant sans encombre la transition du cinéma muet vers le cinéma parlant, il enchaine alors les succès (« Le chant du Danube », « L’homme qui en savait trop », « Les 39 marches », « Quatre de l’espionnage », « Agent secret », « Une femme disparait ») et s’impose comme le cinéaste britannique le plus en vue des années 30. De quoi aiguiser l’intérêt des studios hollywoodiens. C’est finalement le producteur indépendant David O. Selznik, tout juste auréolé du triomphe de son « Autant en emporte le vent », qui fait signer un lucratif contrat au maitre de l’épouvante. Mais les relations se révèlent vite houleuses entre les deux hommes (l’omniprésent Selznik laissant peu de liberté artistique à son réalisateur), si bien que le cinéaste sera le plus souvent « loué » à d’autres studios durant les années 40 (il signe plusieurs films pour la RKO, Universal ou encore la United artists). De leur collaboration ne naitront que quatre films (mais pas des moindres !) : « Rebecca » (1940), « La maison du Docteur Edwardes » (1945), « Les enchainés » (1946) et « Le procès Paradine » (1947), que Carlotta a eu la bonne idée de réunir dans un seul coffret collector.

« On peut devenir fou quand on vit avec le diable »

Rebecca_Danvers

Pour son premier film américain, Hitchcock choisit d’adapter – contre l’avis de Selznik qui aurait préféré lui confier un film centré sur le naufrage du Titanic – le roman « Rebecca » de sa compatriote Daphné Du Maurier. Une auteure que le cinéaste apprécie tout particulièrement puisqu’il adaptera pas moins de trois de ses romans : « La taverne de la Jamaïque » (1939), « Rebecca » (1940) et plus tard « Les oiseaux » (1963). Une occasion pour le réalisateur de sortir un peu du registre du thriller d’espionnage dans lequel il s’était un peu enfermé les années auparavant, en s’essayant cette fois au conte gothique, genre alors en vogue à Hollywood (« Les hauts de Hurlenvent », « Jane Eyre », « Le château du dragon », « L’aventure de Madame Muir »). Il nous entraine ainsi dans le domaine de Manderlay, dominé par le faste de son majestueux château, que l’on découvrira de nuit dans une formidable - et intrigante ! - scène d’ouverture. Mais l’atmosphère qui règne dans ce château se révèle très vite pesante et angoissante. Comme si la maison était encore habitée par l’aura de Rebecca, la belle et charismatique châtelaine décédée un an plus tôt, et dans l’ombre de laquelle la nouvelle Madame de Winter, simple et effacée au point de ne pas avoir de prénom (!), évolue sans parvenir à s’affirmer. En creux, Hitchcock trouve dans ce récit une intrigue criminelle retorde et vénéneuse qui lui permet de poser un vrai questionnement moral sur la passion et la trahison. On reste également admiratif lorsqu’il essaye, par un incroyable numéro de contorsionniste, de parler de la vraie nature de Rebecca tout en essayant de rester dans les clous de la moralité du Code Hays. Si les sobres Laurence Olivier et Joan Fontaine (idéalement falote) sont très bien, ce sont surtout les formidables seconds rôles - George Sanders et Judith Anderson en tête - qui apportent cette formidable de touche de noirceur et de cynisme qui fait tout l’attrait de ce grand classique, seul film d’Hitchcock a avoir été récompensé de l’Oscar du Meilleur Film.

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Le blu-ray : Le film est présenté dans un nouveau Master restauré HD 4k, en version originale américaine (1.0) ainsi qu’en version française (1.0).

Côté bonus, le film est accompagné de « Obsédante absence » analyse du film par Laurent Bouzereau (19 min.), un entretien Hitchcock/Truffaut (Audio, 33 min.), Screen tests de « Rebecca » (9 min.), « Daphné du Maurier sur les traces de Rebecca » (54 min.).

Edité par Carlotta, « Rebecca » est disponible en coffret ultra collector (n°7) en DVD ou blu-ray, incluant également les films « Le procès Paradine », « Les enchainés », « La maison du Docteur Edwardes » ainsi que le livre de 300 pages « La conquête de l’indépendance » réalisé en association avec les Cahiers du Cinéma, depuis le 29 novembre 2017.

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