Intrigue : complications progressives

L’intrigue se déploie depuis l’incident déclencheur jusqu’au climax. Compliquer l’intrigue revient à rendre difficile la vie du protagoniste. Cette difficulté suit une courbe de tension dramatique qui consiste progressivement à renforcer la force antagoniste qui va venir s’opposer au héros de l’histoire.

L’incident déclencheur a bouleversé le quotidien du protagoniste. Il s’est créé en lui un désir conscient ou inconscient de restaurer cet équilibre auquel il se confortait fidèlement croyant que c’était là le moyen d’atteindre le bonheur.
Le héros est donc à la poursuite d’un objet de désir. Cette démarche commence par des actions qui tendent à résister au changement. Le héros cherche simplement à retrouver sa vie d’antan.
Il montre ainsi une certaine réticence à ce que Joseph Campbell a dénommé le Call to Adventure (l’appel à l’aventure).

Une attente trompée

Lorsque le protagoniste agit, il espère de ses actes une conséquence positive. Cette espérance porte sur son environnement, sur sa réalité.
Il espère un certain retour mais il est déçu car cela ne fait qu’augmenter la pression de son antagonisme et provoquer des conflits internes (le personnage face à lui-même), personnels (le personnage dans ses relations aux autres) et sociaux (la réaction des autres indépendamment de ses relations).

Cette force contraire suscitée par ses actions a pour effet de bloquer son désir. Robert McKee estime qu’il se crée une sorte d’abîme entre les attentes légitimes du héros et le résultat de ses actes.
Au début de l’intrigue, cet abîme n’est pas très profond. Les réactions ne sont certes pas celles qu’il attendait mais les conséquences ne sont pas encore véritablement dramatiques pour lui. Par contre, plus l’intrigue se déploie et plus le gouffre entre l’espoir et ce qui se passe est terrible.

Très rapidement, le lecteur comprend que le héros atteint un point de non retour lorsque ses efforts initiaux s’avéreront inutiles. Il faut qu’il s’engage plus avant dans son aventure, qu’il prenne en charge totalement son problème.
Il est donc important ne pas insister outre mesure sur des actions mineures au risque de lasser le lecteur puisqu’il a compris que le héros ne pourra réaliser son désir ou retrouver un équilibre de vie s’il continue à éluder son problème.

Le héros accepte le risque

Ayant réalisé ce qu’il risque de perdre ou bien de gagner, le protagoniste doit faire preuve d’une force de volonté dont il n’était plus accoutumé (et peut-être même dont il ne se sentait pas capable).
Les actions et décisions qu’il prendra dorénavant sont bien plus difficiles et évidemment, elles provoquent une réaction encore plus terrible des forces antagonistes. Ce qui creuse encore plus la différence entre l’attente espérée et les conséquences qui résulte des actions prises.

Le principe est alors le même. Inutile de s’appesantir sur ce type d’actions puisque le lecteur comprend que le héros est encore loin de réussir s’il persiste dans cette voie.
Et l’intrigue se construit progressivement. Chaque étape est comme un point de non retour. Le héros a certainement appris des choses nouvelles sur lui et fort de cette connaissance nouvellement acquise, il sait qu’il doit continuer à aller de l’avant jusqu’au moment du climax.

Ce climax n’est pas ce moment où l’auteur décide arbitrairement que l’intrigue doit cesser. C’est plutôt une ultime action parce que le lecteur ne peut imaginer ce qu’il pourrait encore bien se produire. L’auteur a préparé son message tout au long de l’intrigue et il est maintenant tant de l’énoncer au lecteur au moment du climax.

Le point médian : une difficulté à contourner

Pour l’auteur.
En effet, de nombreux scénarios stagnent au milieu de l’acte Deux. L’auteur ne parvient plus à construire la progression. Pour remplir ses pages, il fera faire à ses personnages des actions très similaires à celles qu’ils ont pu commettre dans l’acte Un.
Elles ne sont pas identiques mais elles manquent simplement de magnitude, d’une réelle portée pour l’intrigue.

Et le lecteur se dit que ce n’est pas comme cela que les personnages obtiendront ce qu’ils veulent dans cette histoire. Et ils commencent à se désintéresser de celle-ci.
Classiquement, la ligne dramatique globale d’une histoire s’étend sur 40 à 60 scènes. Ces scènes se combinent entre 12 et 18 séquences.
Au sujet des séquences, nous vous conseillons la lecture de :

  • TOY STORY : LA SEQUENCE, UNITE STRUCTURELLE (1)
  • TOY STORY : LA SEQUENCE, UNITE STRUCTURELLE (2)
  • TOY STORY : LA SEQUENCE, UNITE STRUCTURELLE (3)
  • TOY STORY : LA SEQUENCE, UNITE STRUCTURELLE (4)
  • TOY STORY : LA SEQUENCE, UNITE STRUCTURELLE (5)
  • TOY STORY : LA SEQUENCE, UNITE STRUCTURELLE (6)
  • TOY STORY : LA SEQUENCE, UNITE STRUCTURELLE (7)

Ces séquences peuvent alors être assemblées en trois actes (voire davantage).
Maintenant, pour écrire entre 40 et 60 scènes, il va falloir se livrer à des recherches, faire travailler son imagination (brainstorming), faire appel à ses propres souvenirs et lister autant de faits ou d’événements possibles.
Parce qu’il ne faut pas se répéter.

Lorsque vous aurez ainsi accumulé suffisamment de matériel, il vous faudra choisir et élaborer les séquences et les actes afin de préserver la progression de l’intrigue qui consiste essentiellement en points de non retour pour le protagoniste.

INTRIGUE : COMPLICATIONS PROGRESSIVES