Harmonium

Un grand merci à Condor Entertainment pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Harmonium » de Koji Fukada.

Harmonium« Si la maman araignée qui se sacrifie va au paradis, ses bébés araignées qui l’ont mangé vont-ils en enfer ? »

Dans une discrète banlieue japonaise, Toshio et sa femme Akié mènent une vie en apparence paisible avec leur fille. Un matin, un ancien ami de Toshio se présente à son atelier, après une décennie en prison. A la surprise d’Akié, Toshio lui offre emploi et logis. Peu à peu, ce dernier s’immisce dans la vie familiale, apprend l’harmonium à la fillette, et se rapproche doucement d’Akié.

« On aurait du me condamner à mort pour mes crimes. Pour le restant de mes jours je suis redevable à la famille de ma victime »

Harmonium_filmDiplômé de l’Ecole d’études cinématographiques de Tokyo, le japonais Koji Fukada débute sa carrière en 2004 avec le film indépendant « Isu ». Depuis lors, en une décennie et sept films, il s’est imposé comme l’un des jeunes cinéastes les plus en vue du Pays du soleil levant. En effet, régulièrement présent et sélectionné dans les festivals internationaux européens, le réalisateur s’était ainsi fait remarqué par son très beau « Au revoir l’été » en 2013 pour lequel il avait notamment été récompensé de la Montgolfière d'or du Festival des trois continents de Nantes. Trois ans plus tard, il nous revient avec « Harmonium », drame au réalisme « rohmérien » (dixit le réalisateur lui-même) récompensé du Prix du jury de la section Un certain regard au Festival de Cannes.

« Chaque jour je me demande pourquoi je ne suis pas à ta place »

Harmonium_FukadaAprès s’être principalement illustré jusqu’ici dans des chroniques sociales plutôt maniéristes, Koji Fukada glisse avec « Harmonium » vers des thématiques plus sombres. Ou comment la tranquillité d’une famille de banlieue ordinaire et en apparence sans histoires se retrouve bouleversée par l’irruption soudaine et inattendue d’un ancien camarade de Toshio, le père de famille, qui lui offre emploi, gîte et couvert. A l’évidence, le cinéaste joue sur les faux-semblants pour faire basculer son récit vers le drame moral. Avec ses faux airs méphistophéliques, l’étranger va ainsi faire resurgir le sombre passé de Toshio et le confronter à ses propres démons et à sa culpabilité en soulevant ainsi plusieurs questionnements existentiels relatifs à la dualité entre le bien et le mal. Peut-on vivre dans le mensonge ? Peut-on vivre sereinement sans payer pour ses fautes ni expier ses péchés ? Construit en deux actes distincts, la première partie du film prend des faux airs de thriller dominée par la présence inquiétante et énigmatique de l’étranger qui fait planer une tension jusqu’à ce que l’inéluctable vengeance se matérialise. Le deuxième acte du film en revanche sera résolument plus moral et prendra la forme d’un chemin de croix pour Toshio qui, rattrapé par son destin, devra s’employer à faire face dans l’épreuve et à recoller autant que possible les morceaux afin de préserver un semblant d’équilibre et d’unité familial. En espérant y gagner in fine sa rédemption (l’apprentissage du fils de son bourreau). Drame de l’intime s’aventurant parfois jusqu’à la lisière du fantastique, « Harmonium » demeure un film surprenant et parfois dérangeant. Formellement très beau, le film de Fukada réussit à créer une atmosphère pesante et inconfortable qui perdure jusqu’aux ultimes secondes. Sur le fond en revanche, l’histoire, un peu (trop) manichéenne, parait parfois un peu désincarnée et semble au final manquer de puissance. Un beau film imparfait.

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Le DVD : Le film est proposé en version originale japonaise (5.1 et 2.0). Des sous-titres français sont également proposés.

Côté bonus, le film est accompagné d’un portrait du réalisateur, « Du Japon à Cannes, l’incroyable ascension de Kôji Fukada » (23 min.).

Edité par Condor Entertainment, « Harmonium » est disponible en DVD depuis le 23 mai 2017.

Le site Internet de Condor Entertainment est ici. Sa page Facebook est ici.