HHhH (2017) de Cédric Jimenez

Après deux films policiers, "Aux yeux de tous" (2012) et "La French" (2014), le réalisateur français gagne en ambition et tourne son premier film en langue anglaise avec le but avouer de gagner le marché international. Cette fois le sujet est aussi universel qu'historique puisqu'il s'attaque au destin funeste de Reinhard Heydrich surnommé le Boucher de Prague, bras droit de Himmler et instigateur de la Solution Finale. Ce film fut développé en même temps que le déjà très bon et intéressant "Anthropoïd" (2016) de Sean Ellis dont la comparaison se fera automatiquement. A contrario de ce précédent film pourtant le film de Jimenez est officiellement adapté du roman éponyme (2010) de Laurent Binet, prix Goncourt 2010 du premier roman et listé dans les best-sellers du New-York Times ce roman n'est pourtant pas un roman classique et linéaire. En effet, bien que centré sur Heydrich et l'opération Anthropoid qui devait mener à son assassinat, l'auteur offre une construction originale qui propose avant tout une réflexion entre devoir de l'historien et défi d'écrivain. Cédric Jimenez en tirera seulement l'essence Heydrich et seulement la partie historique nécessaire à la reconstitution des évènements. Scénario co-écrit par ailleurs avec la fidèle Audrey Diwan (déjà sur les deux films précédents du réalisateur) et du britannique David Farr (à l'oeuvre sur "Hannah" en 2011 de Joe Wright).

HHhH (2017) de Cédric Jimenez

"HHhH" veut dire "Himmler's Hirn heißt Heydrich" et signifie littéralement "Le cerveau de Himmler s'appelle Heydrich", définition connue donnée par les SS. L'ange blond malfaisant du régime nazi est incarné par l'excellent Jason Clarke, son épouse étant interprétée par Rosamund Pike (pas vu depuis "Gone Girl" en 2014 de David Fincher). On reconnait le très bon Stephen Graham en Himmler tandis que les membres du commando et de la résistance sont joués par le duo Jack O'Donnell (révélé en quelques mois en 2014 avec les excellents "Les poings contre les murs" de David McKenzie et "71'" de Yann Demange) et Jack Reynor (prometteur vu dans "Macbeth" en 2015 de Justin Kurzel et "Sing Street" en 2016 de John Carney). Dans des rôles de moindres importances on a aussi les frenchys Céline Sallette et Gilles Lellouche avec en prime de luxe l'actrice Mia Wasikowska. Un casting hétéroclyte donc qui peut rendre perplexe en VO et en VF (accents et concordance avec les origines réelles des protagonistes).

HHhH (2017) de Cédric Jimenez

D'un point de vue purement historique le film ne vaut pas "Anthropoïd", ce dernier a effectué des scènes sur les lieux mêmes des évènements et reste focalisé sur les semaines concernant l'opération Anthrépoid. "HHhH" est clairement plus romancé prenant même des libertés assez gênantes notamment sur les desideratas de l'épouse Heydrich. Il est prouvé qu'elle était aussi fanatique que lui en témoigne ses interviews post-1945 et son autobiographie. Dans le même genre les derniers instants de Heydrich reposent sur rien de concret. Quitte à retracer les grandes lignes de sa carrières il est dommage que les attaques sur ses éventuelles origines juives ait été occultées pour favoriser l'anecdote sexuelle. Dans la forme Jimenez use parfois de subterfuges fragiles, basiques et superflus (flous et ralentis) pour créer un temps soit peu d'émotions diverses (montrer Heydrich en bon amant, en bon père de famille car il est humain avant tout). Ca reste de l'esbroufe romanesque. Au final le film vaut grâce à son sujet qui reste fascinant, mais à choisir mieux vaut voir et revoir "Anthropoïd" dans l'attente d'un vrai biopic solide et sérieux sur Reinhard Heydrich... Note obtenue de justesse, déception...

HHhH (2017) Cédric JimenezHHhH (2017) Cédric Jimenez