Mademoiselle

Un grand merci à M6 Vidéo pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Mademoiselle » de Park Chan-Wook.

Mademoiselle« Une servante est comme une paire de baguettes : on la remarque à peine, mais son absence nous plonge dans le désarroi »

Pendant les années 30, dans une Corée sous domination japonaise, Sook-hee est engagée comme domestique au service d’une héritière japonaise, qui vit dans un beau manoir sous la domination de son oncle tyrannique. Mais la jeune femme a un secret : pickpocket experte depuis l’enfance, elle a été embauchée par un escroc qui se fait passer pour un comte japonais. Sook-hee est en effet chargée de l’aider à séduire l’héritière afin de la délester de sa fortune. Mais les sentiments s’en mêlent…

« Tu peux jurer ou voler. Mais ne me mens jamais, d’accord ? »

Mademoiselle_Park_Chan_WookPassionné de cinéma qu’il découvre durant ses études, le coréen Park Chan-Wook se fait d’abord connaitre dans le monde de la cinéphilie. Il monte ainsi plusieurs clubs et cercles de passionnés au sein de son université, avant de finalement tout plaquer pour intégrer les studios cinématographiques locaux au sein desquels il exerce divers métiers techniques. Après des années d’effort dans l’ombre, il réalise enfin son rêve en accédant à la réalisation au tout début des années 90. Mais son premier film, « Moon is the sun’s dream » (1992) connait un énorme échec commercial. Contraint de disparaitre quelques temps du circuit professionnel, Park Chan-Wook se reconvertit et s’impose en tant que critique et historien du cinéma reconnu. Il faut attendre 1997 pour le voir revenir discrètement derrière la caméra avec « 3 members » puis « Joint security area » grâce auquel il participe à de nombreux festivals internationaux. Mais c’est grâce à sa « trilogie de la vengeance », et notamment à « Old boy » qui obtient le Grand Prix du Festival de Cannes, que le cinéaste s’impose comme l’un des piliers du renouveau du cinéma coréen. Après « Je suis un cyborg » (2006) et « Thirst ceci est mon sang » (2009), il tente sa première aventure américaine avec « Stoker » en 2013. Trois ans plus tard, il est de retour au pays avec son nouveau projet, « Mademoiselle », libre adaptation du roman « Du bout des doigts » de l’anglais Sarah Waters publié en 2002. A noter que ce film fut sélectionné pour concourir en Sélection officielle lors du dernier Festival de Cannes.

« La beauté est cruelle par nature »

Mademoiselle_Kim_Min_HeeAvec « Thirst, ceci est mon corps », (très) libre adaptation du « Thérèse Raquin » de Zola, Park Chan-Wook faisait montre de son goût pour la littérature européenne ainsi que de sa faculté pour se réapproprier des univers étranger en s’affranchissant des barrières culturelles. Il récidive l’expérience - avec succès - avec ce « Mademoiselle », pour lequel il parvient à transposer l’ambiance de la Londres du 19ème siècle dans la Corée sous occupation japonaise des années 30. « Mademoiselle » est un ainsi le récit d’une manipulation machiavélique construit autour de trois personnages antinomiques, élaborant des alliances de circonstance et à géométries variables pour faire main basse sur un précieux héritage. Une forte de machination implacable se dessine alors, en forme de billard à trois bandes. Une vrai/faux trio amoureux (un garçon, deux filles, trois possibilités !) engagés dans une subtile et électrique partie de poker menteur. Dans des décors d’une beauté étourdissante, Park Chan-Wook échafaude ainsi un thriller dont le raffinement formel n’a d’égal que la perversité morale. Une énigme à tiroirs dont il s’amuse à brouiller les pistes pour mieux perdre - et surprendre ! - ses spectateurs. Intelligemment construit en trois actes à la façon du « Rashomon » de Kurosawa - la même histoire est racontée successivement selon le point de vue des trois protagonistes principaux - le récit nous plonge ainsi dans les méandres d’une intrigue aussi tortueuse que vénéneuse, où se mêlent inextricablement sexe, mensonges et trahisons et qui prend pour décor un univers de luxure sadique et raffinée, qui offre un formidable écrin aux ambiance gothiques dont le cinéaste à la secret. Incroyablement malin, ce « Mademoiselle » qui se révèle tour à tour sulfureux, troublant et dérangeant, offre un spectacle de très haute volée et d’une beauté visuelle renversante. Tout juste regrettera-t-on une narration parfois empesée qui complique (un peu) inutilement la lisibilité de cette intrigue par nature déjà complexe.

Mademoiselle-film

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Le DVD : Le film est présenté en version originale (coréen et japonais - 5.1), ainsi qu’en version française (5.1). Des sous-titres français sont également proposés.

Côté bonus, le film est accompagné d’un making-of et de l’interview de l’équipe du film.

Edité par M6 Vidéo, « Mademoiselle » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 22 mars 2017.

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