Le masque arraché

Un grand merci à Rimini Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD de « Le masque arraché » de David Miller.

Sudden_fear« Tu es toutes les femmes de ma vie : la sœur que je n’ai jamais eu, la mère que j’ai presque oublié et la femme dont j’ai toujours rêvé »

Alors qu’elle supervise les auditions de sa prochaine pièce, la dramaturge Myra Hudson rejette la candidature du jeune acteur Lester Blaine.

Elle le retrouve peu après dans le train qui la ramène à San Francisco, en tombe amoureuse et l’épouse rapidement.

Sauf que Lester renoue avec Irène, sa précédente petite amie : ils décident d’éliminer Myra afin d'hériter de l'argent légué sur le testament de l'écrivain.

Mais l'épouse trompée a un magnétophone ou par mégarde, le complot monté contre elle y a été enregistré.

« Il n’y a pas de place pour moi dans ta vie. Nous ne sommes pas du même monde : tu as tellement et moi je n’ai rien »

Palance-sudden-fearFigure quelque peu oubliée de l’âge d’or Hollywoodien, l’américain David Miller mena néanmoins une honnête carrière de réalisateur durant plus de quarante ans, des années 30 jusqu’au début des années 80. S’illustrant d’abord dans la réalisation de courts-métrages documentaires et pédagogiques, il s’illustre dès le début des années 40 aux commandes de productions grand public, telles que « Billy the Kid le réfractaire » (1941) avec Robert Taylor, « Les tigres volants » (1942 avec John Wayne, ou encore « La pêche au trésor » (1949) avec les Marx Brothers. En 1952, il réalise pour la RKO « Le masque arraché », un film noir adapté du roman policier « Ils ne m’auront pas » de Edna Sherry. Porté par l’immense star Joan Crawford qui entame alors la deuxième partie de sa carrière, le film rencontre un grand succès lors de sa sortie en salles et décroche pas moins de quatre nominations aux Oscars (dont Meilleure actrice pour Crawford et Meilleur acteur dans un second rôle pour Jack Palance). Mais pour Miller, il s’agira là d’un succès sans lendemain, ces films suivants - plus modestes - sortiront dans un certain anonymat. Il faudra attendre 1962 et « Seuls sont les indomptés » avec Kirk Douglas pour le retrouver aux commandes d’un film de premier plan. Se liant alors d’amitié avec le scénariste Dalton Trumbo, il assistera celui-ci sur le tournage de « Johnny s’en va t’en guerre ». Il réalisera également « Le combat du Capitaine Newman » (1963) et « Complot à Dallas » (1973) avec Burt Lancaster avant de terminer sa carrière à la télévision.

« Je me demande ce que j’ai fait pour te mériter »

Masque-arraché« Le masque arraché » est un thriller psychologique efficace et haletant. Un film noir qui inverse les rôles : il n’est point question ici de femme fatale conduisant le héros à sa perte mais d’une riche et célèbre héritière entre deux âges qui s’éprend d’un jeune comédien trop attentionné pour être honnête. Et puis surtout, il y est question d’un dictaphone (ou plutôt de son ancêtre, en format XXL) qui enregistre (par hasard) et révèle à l’héroïne la sombre machination que lui préparent son sinistre amant et sa maitresse. C’est d’ailleurs dès qu’intervient (assez tardivement) cette révélation que le film trouve son rythme de croisière et sa juste tonalité : l’héroïne, ainsi rongée par la peur, tentera coûte que coûte de sauver les apparences et de déjouer les noirs dessins de son mari. D’ailleurs, et c’est la grande intelligence du film, celle-ci se montrera finalement aussi imaginative et surtout aussi machiavélique et féroce que ceux qui veulent sa mort. Outre son suspense hitchcockien, le film vaut également pour la qualité formelle de la mise en scène de David Miller (et ses subtils jeux de miroirs), qui utilise très intelligemment les décors urbains offerts par la ville de San Francisco, et notamment ses collines pentues pour nous offrir l’une des plus fameuses, des plus stylisées et des plus efficaces scènes de course-poursuite de l’époque. Toutefois, si le film tient parfaitement le spectateur en haleine en instillant une étrange ambiance vénéneuse, on regrettera tout de même quelques longueurs notamment sans sa première partie. Mais plus encore, c’est la prestation un peu figée de Joan Crawford (actrice totalement surestimée selon votre serviteur) qui s’avère la plus déroutante, celle-ci peinant à susciter de l’empathie pour son personnage. Et ce d’autant plus que sa présence à l’écran est ici grandement éclipsée par l’excellent Jack Palance dont la justesse du jeu et le physique particulier vampirisent constamment l’attention du spectateur. Il est à n’en pas douter l’atout majeur de ce film noir classique mais très efficace.

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Le DVD : Le film est présenté dans un nouveau master haute-définition, en version originale américaine (2.0). Des sous-titres français sont également proposés.

Côté bonus, le film est accompagné d’une Interview d’Antoine Sire, auteur de « Hollywood, la cité des femmes » (35 min).

Edité par Rimini Editions, « Le masque arraché » est disponible en DVD depuis le 14 février 2017.

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