Des Lumière à la Fémis.

Le septième art semble obséder les documentaristes français ces dernière temps car en l'espace de quelques semaines, nous avions à disposition les témoins d'époques différentes du cinéma : Son commencement avec Thierry Frémaux éclairant les " vues " des Lumière et son avenir institutionnalisé via la caméra de Claire Simon et ses étudiants de la prestigieuse école de la Fémis.

Dans " Lumière, l'aventure commence !" , Frémaux nous embarque dans une programmation scolaire et éducative sur la naissance progressive du cinéma par les deux frangins les plus célébrés du 7ème art. Dès cette " sortie d'usine ", on observe sous l'écoute de ses commentaires et des " vues " comment cet art qui passionne tant a pu s'inventer grâce à ces deux frères. Comment des photographies successives ont-elles pu devenir animés, créant ainsi des effets spectaculaires et d'actualité saisissants et révolutionnaires. À travers environ 108 films montrés, peut-être pourrait-on dire présentés de manière trop didactique, on s'aperçoit de l'importance capitale de leurs oeuvres, influençant ainsi de nombreux cinéastes tels que Sergei Eisenstein ou Yoshiro Ozu.

Les décennies passèrent et une pléiade de mouvements ainsi que d'artistes ont pu modeler l'art inventé par ces légendes : De l'avant-garde russe mené par Vertov et Eisentein à la Nouvelle Vague Française, elle-même qui a généré le Nouvel Hollywood de Scorsese et Coppola, en passant par les blockbusters de George Miller et James Cameron. Chacun d'entre-eux, d'une manière ou d'une autre, est porté par le cinéma des Lumières. Y compris les futurs étudiants de la prestigieuse école de la Fémis qu'observe Claire Simon dans " Le Concours" , plongée anxiogène aux épreuves du concours tant redouté.

Après la sortie d'usine, place à l'entrée vers le cinéma. Pendant deux heures environ, on embarque au sein d'un mécanisme effectué chaque année : Celle d'une institution confrontée à la difficile sélection de futurs professionnels du cinéma (scénariste, réalisateur ou bien distributrice) selon de pointilleux critères. Les candidats défilent, ravagés par le trac et les erreurs. On bafouille, on devient parfois arrogant, on a du mal à articuler mais surtout, on tente de créer du cinéma.

La caméra invisible de Claire Simon observe au filigrane la montée de ce ton si redoutable enveloppant ce concours prestigieux. Un concours où chacun de ces futurs prodigues de l'audiovisuel devra se surpasser en proposant sa patte artistique en se basant sur tout ce qui a été fait dans le cinéma depuis les Lumière. Certains auront leur propre assurance, d'autres se baseront sur des souvenirs personnels (comme un meurtre dans un village) et beaucoup citeront des références (passant de Bresson à Jacques Demy). Les novices se battent pour entrer et les confirmés s'affrontent pour savoir qui faut faire entrer, essentiellement pour des a-prioris personnels et non pour des fins purement cinématographiques, rendant des situations parfois effrayantes en terme de sélectivité.

Frémaux et Simon font part d'un seul et même combat au final : Celui de souligner l'importance temporaire d'époques afin de mieux en souligner les changements et les conservations. " " nous fascine en exclamant l'importance capitale qu'auront eu ces cinéastes dans l'Histoire tandis que " Le Concours " touche par son inscription dans notre temps, montrant une jeunesse traversée par toutes ces décennies de cinéma en marche vers son futur.

Victor Van De Kadsye