Rocky 4 (Le tueur qui vient du froid)

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Genre : action, boxe 
Année : 1985
Durée : 1h31

Synopsis : Apollo Creed, ancien adversaire et dorénavant ami de Rocky Balboa, est tué sur le ring par le boxeur russe Ivan Drago. Se reprochant de n'avoir pu sauver son camarade à temps, Rocky va demander un combat contre Ivan Drago afin de le venger. Une confrontation qui se déroulera sur le sol russe

La critique :

Souvenez-vous... Dans Rocky 3 - L'Oeil du Tigre, Sylvester Stallone (Rocky Balboa) ferraillait avec un Mister T (Clubber Lang) vindicatif et qui multipliait les épigrammes et les acrimonies. L'air de rien, avec ce troisième chapitre, Sylvester Stallone fustigeait déjà les prémisses de cette boxe médiatique et spectaculaire, désormais vouée à l'opprobre et aux gémonies. A l'image de ce combat contre un Hulk Hogan licencieux et égrillard qui se transmute en un véritable match de catch, afin de satisfaire la populace.
Ou une autre façon d'envisager le "noble Art", condamné par le lucre, les médias, le profit, les sponsors et l'appât du gain. Clubber Lang est le digne épigone de cette boxe en déliquescence. Véritable machine de guerre, le lutteur vocifère toute sa hargne mais reste, cependant, une personnalité candide, obtue et outrancière.

La réponse de Rocky Balboa ? Retrouver cette fougue d'antan ou "l'oeil du tigre", un babélisme qui conduit le boxeur émoussé à retrouner dans les vieilles salles de ring. D'ailleurs, ce n'est pas un hasard, Rocky 4, toujours réalisé par Sylvester Stallone en 1985, reprend la conclusion finale de son auguste prédécesseur. Après une défaite cinglante en deux petits rounds, Rocky Balboa prend sa revanche contre Clubber Lang. Reste à savoir ce que va nous proposer ce quatrième opus.
En ce sens, il s'inscrit dans la logique et le sillage de son modèle. A la seule différence que la boxe, ce sport dicté par les notions d'abnégation et de vaillance, a effectué un pas supplémentaire vers le précipice. Finalement, Ivan Drago, le nouvel adversaire de Rocky, est le digne héritier de Clubber Lang. 

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Ce nouvel étalon soviétique, au regard vide et monolithique, préfigure aussi le glas définitif de ce sport de combat. Thème sur lequel nous reviendrons. La distribution du film réunit évidemment Sylvester Stallone (à la fois devant et derrière la caméra), Dolph Lundgren, Talia Shire, Burt Young, Carl Weathers, Brigitte Nielsen, Tony Burton et Michael Pataki. Que les choses soient claires. Le scénario brille avant tout par sa vacuité et son inanité. Attention, SPOILERS !
Apollo Creed, ancien adversaire et dorénavant ami de Rocky Balboa, est tué sur le ring par le boxeur russe Ivan Drago. Se reprochant de n'avoir pu sauver son camarade à temps, Rocky va demander un combat contre Ivan Drago afin de le venger. Une confrontation qui se déroulera sur le sol russe. En outre, Rocky 4 est souvent sujet à polémique.

Pour de nombreux fans de la saga, ce quatrième volet constitue le meilleur épisode de la franchise. A contrario, pour d'autres, il s'agit d'un nanar involontaire, outrancier et propagandiste, avec ses relents de guerre froide et de revanche contre le communisme. La faucille et le marteau contre le drapeau étoilé. Karl Marx contre l'Oncle Sam. Le stalinisme contre le capitalisme.
A la fin, c'est évidemment le capitalisme (donc les Etats-Unis) qui gagne. En l'état, Rocky 4 reste probablement le chapitre le plus bourrin de la saga, celui abonné aux bourre-pifs et aux "parades-mâchoire". Certes, on peut effectivement voir ce quatrième volet comme un film partial, inique et manichéen. Sur ce dernier point, la première partie du film est un véritable festival de railleries, de quolibets et de rodomontades. Encore une fois, Ivan Drago est le digne épigone de Clubber Lang.

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A la seule différence que le silence et le flegmatisme ont supplanté les grivoiseries et les trivialités. Mutique, le visage fermé et quasi apathique, Ivan Drago symbolise déjà tous ces boxeurs de l'Est, à la fois musculeux et athlétiques, qui anéantiront la boxe entre les années 1990 et 2000. Certes, les contempteurs auront raison de pester et de tonner contre le propos, au mieux maladroit, du film.
Les Russes sont sans cesse morigénés et réduits à un peuple de barbares primitifs. Leur réponse et leur vindicte seront assénées sur le ring. Apollo Creed va payer très cher son outrecuidance. Avant la fin du deuxième round, le boxeur s'écroule et meurt au combat. Les Américains viennent de prendre leur premier uppercut en pleine face. Une défaite cinglante.
Avant de mourir sous les coups de Drago, Apollo Creed argue péremptoire : "Ce combat, c'est nous contre les Soviets !". 
Hélas, le long réquisitoire contre la Russie et ses préceptes rigoristes se poursuit dans la seconde partie du film. Cette fois-ci, les inimitiés se déroulent en territoire soviétique. Narquois, Stallone multiplie les stéréotypes et les caricatures. 
Une fois sur place, le boxeur et ses prosélythes découvrent une terre hostile, claustrée par le froid et parsemée de militaires au visage inflexible et impavide. A nouveau, Stallone oppose un boxeur américain, qui se fond dans la nature pour se rompre au combat, et un boxeur russe qui devient le nouveau substrat du dopage et de la technologie triomphante.
A moins que ce ne soit cette vision presque eschatologique de la boxe, d'un sport qui recherche avant tout des athlètes surhumains, défiant les lois ancestrales et même celles de la physique. Véritable bloc de muscles, de testostérone et de rage, Drago ne dégage aucune personnalité.

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Ses formules, pour le moins lapidaires, se résument en deux petites phrases : "Tu seras k.o." et "Je vais te briser". Pis, en conférence de presse, le lutteur reste invariablement impassible. C'est sa femme qui prend la parole, défiant l'Amérique en combat singulier. Quant à l'empoignade finale, elle ne présente qu'un intérêt assez relatif. Sonné de coups, Rocky résiste aux assauts du russe. Pis, après douze rounds de bourre-pifs et d'uppercuts dans les règles (ou presque...), le boxeur opiniâtre commence à prendre le dessus sur son adversaire. Rocky est même encouragé par une foule jusqu'ici hostile.
Autant le dire tout de suite, les quinze dernières minutes du film tournent quasiment à l'auto-parodie. A l'image de la longue homélie prononcée par Stallone après sa victoire contre le géant soviétique : "Sur le ring, y'avait deux gars qui s'entretuaient... Mais quand même, c'est mieux que vingt millions. Alors, vous voyez, ce que je voulais dire, c'est que si moi j'ai changé, et que vous avez changé, alors tout le monde peut arriver à changer !". Un monologue pour le moins emphatique qui vient, hélas, accréditer la thèse du film propagandiste et manichéen.
Paradoxalement, le message de Stallone se veut curieusement plus subtile. Sous ses airs de nanar (ce qu'il est...), le film préfigure l'avenir de la boxe, désormais sous les clairons des oraisons funèbres... 

Côte : Nanar

sparklehorse2 Alice In Oliver