Les Oiseaux (Terreur volatile)

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Genre : épouvante, horreur, fantastique (interdit aux - 12 ans)
Année : 1963
Durée : 2 heures

Synopsis : Melanie, jeune femme quelque peu superficielle, rencontre chez un marchand d'oiseaux un brillant et séduisant avocat qui recherche des inséparables. Par jeu, Melanie achète les oiseaux et les apporte a Bodega Bay. Dés son arrivée, elle est blessée au front par une mouette

La critique :

Est-il encore nécessaire de présenter Alfred Hitchcock, considéré à juste titre, comme le plus grand réalisateur britannique ? Parmi ses 53 réalisations, on compte un certain nombre de classiques incontournables, notamment Rebecca (1940), La maison du Docteur Edwardes (1945), Fenêtre sur Cour (1954), Psychose (1960), La main au collet (1955), L'homme qui en savait trop (1956), Sueurs Froides (1958) et Frenzy (1972). Vient également s'ajouter Les Oiseaux, sorti en 1963.
Les Oiseaux reste le seul long-métrage à consonance fantastique dans la filmographie du cinéaste. A la rigueur, seul Rebecca peut se targuer d'une aura énigmatique et comminatoire. Néanmoins, les deux films sont peu comparables. Les Oiseaux constitue également la 48e réalisation d'Alfred Hitchcock.

A l'origine, le long-métrage est l'adaptation d'une nouvelle éponyme de Daphne du Maurier, publiée en 1952. A juste titre, Les Oiseaux est souvent classé et répertorié dans le top 3 voire dans le top 5 des meilleures réalisations "hitchcockiennes". Avant la sortie du film, Alfred Hitchcock sort harassé du tournage de Psychose. Angoissé par la page blanche, Alfred Hitchcock commence à grifonner, sans grand enthousiasme, le script de Pas de Printemps pour Marnie.
Puis, le réalisateur tombe par hasard sur l'opuscule original de Daphne du Maurier. Séduit par cette invasion volatile, Alfred Hithcock décide de la transposer sur grand écran. Cette fois-ci, le cinéaste impose ses nombreux préceptes aux producteurs du film. Tout d'abord, il ne souhaite pas apporter d'explication sur le comportement agressif de ses chers volatiles.

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Ensuite, il refuse la présence de toute star parmi le casting. Ce dernier se compose de Rod Taylor, qui a enfin obtenu un premier rôle dans La Machine à explorer le temps (George Pal, 1960), Tippi Hedren, Jessica Tandy, Veronica Cartwright, Suzanne Pleshette, Ethel Griffies et Malcom Atterbury. Attention, SPOILERS ! Melanie Daniels, jeune femme quelque peu superficielle, rencontre chez une marchande d’oiseaux Mitch Brenner, un brillant et séduisant avocat qui recherche des inséparables.
Par jeu, Melanie achète les oiseaux et les apporte a Bodega Bay. Dès son arrivée, elle est blessée au front par une mouette. Puis, très vite, la situation devient cauchemardesque. La petite communauté est bientôt envahie par des volatiles meurtriers. Les attaques se multiplient sur la ville...

Certes, à priori, le scénario est de facture laconique et conventionnelle. Pourtant, avec Les Oiseaux, Alfred Hitchcock vient d'inventer un nouveau genre : l'invasion animale au cinéma. Toujours imité mais jamais égalé. En outre, le film va inspirer de nombreux succédanés, dont une suite méconnue, Les Oiseaux 2, un téléfilm sorti en 1994. Hélas, le tournage du film est loin d'être une cinécure.
Certes, Alfred Hitchcock bénéficie d'un bugdet impressionnant à l'époque, soit 2 500 000 de livres sterling. Mais le cinéaste dépasse largement le budget imparti. D'habitude courtois et avenant, le réalisateur se transforme en bibendum vaniteux et acariâtre. Il tourne plusieurs fois certaines séquences, notamment l'attaque des oiseaux dans un grenier en déshérence. 

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Ensuite, il doit gérer les changements de dernière minute avec des volatiles mécaniques et obsolètes. Enfin, Alfred Hitchcock sait qu'il est attendu au tournant, à la fois par le public et la presse cinéma. Après Psychose, le cinéaste se doit de signer un nouveau chef d'oeuvre, une nouvelle référence du noble Septième Art. Heureusement, au moment de sa sortie, Les Oiseaux est unanimement salué par la presse et les médias. Les fans du réalisateur jubilent et tiennent la nouvelle terreur "hitchcockienne".
En réalité, on tient probablement là le film le plus étrange du cinéaste britannique, certainement le plus complexe, le plus inénarrable et le plus insondable. La première chose qui frappe à la vision du film, c'est cette sensation de solitude qui plane sur les décors et les personnages.

D'ailleurs, ce n'est pas un hasard, les principaux protagonistes sont des personnages solitaires et isolés dans leur petit univers. Par exemple, Mitch Brenner (Rod Taylor) est un vieux garçon, aussi élégant que mystérieux, au grand désarroi d'Annie Hayworth (Suzanne Pleshette), elle aussi devenue une vieille fille au gré des années... Même remarque concernant Lydia Brenner, donc la mère de Mitch, qui a peur de céder son fils à la jolie Melanie Daniels, par peur de se retrouver seule et abandonnée...
Le thème de l'abandon... Une autre mécanique incoercible du film. Les volatiles criminels ne s'attaquent pas à une grande ville des Etats-Unis, mais à une petite communauté claustrée au beau milieu de nulle part. Les Oiseaux, c'est aussi cette juxtaposition ou plutôt cette dichotomie entre des personnages qui n'arrivent pas à se comprendre ni à communiquer. 

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Encore une fois, ce n'est pas un hasard si les oiseaux meurtriers parviennent facilement à blesser et à tuer plusieurs personnes de Bodega Bay sans que les autorités ne soient alertées. A la radio, les bulletins d'information se montrent particulièrement lapidaires. C'est donc seuls et isolés que les habitants de la communauté sont condamnés à fuir, au mieux à lutter vainement contre ces volatiles qui surgissant de nulle part. Soit une autre thématique essentielle du film : la menace semble provenir du chaos, ou alors d'un immense vide, une sorte de néant énigmatique et irrationnel.
En l'occurrence, les volatiles préfigurent aussi cette Apocalypse, cette fin des temps annoncée presque fortuitement lors d'une séquence se déroulant dans un bar de la ville. Le film prend alors une consonance comminatoire, quasi spirituelle et eschatologique. De surcroît, Les Oiseaux se termine dans le silence, la fuite, le sang et la mort. Clairement, le long-métrage se situe à des années-lumière des oeuvres habituelles du cinéaste. On tient donc une oeuvre atypique et même ésotérique dans la filmographie d'Alfred Hitchcock, très en forme pour l'occasion.
Bref, après Psychose, le cinéaste britannique vient de délivrer un second uppercut au spectateur ébaubi. En quelques mots : une grosse pointure et un grand classique du cinéma horrifique ! 

Note : 19/20

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