Macbeth (2015) de Justin Kurzel

Énième adaptation de la tragédie de Shakespeare (rappelons que Macbeth a réellement existé mais qu'ici, il ne s'agit que de fiction), depuis la version de 1908 de James Stuart Blackton en passant par "Macbeth" (1948) de Orson Welles et "Macbeth" (1971) de Roman Polanski la pièce a été mainte fois transposée mais jamais à un tel niveau de qualité. Le meilleur film depuis celui de Orson Welles, qui fut présenté au Festival de Cannes 2015... Réalisé par Justin Kurzel, réalisateur australien qui s'était fait remarqué avec "Les Crimes de Snowtown" (2011) ce film est riche d'une production franco-anglo-américaine et d'un casting aussi inspiré qu'investi. Notamment le choix de Marion Cotillard en Lady Macbeth, rôle au combien risqué, connu pour être sans doute le rôle féminin le plus difficile du répertoire théâtral. En outre, "Macbeth" est un mot maudit que les acteurs refusent de citer dans l'enceinte d'un théâtre. Une pièce qui sent le souffre à tout point de vue, et Justin Kurzel réussit l'exploit d'en faire un film aussi terrifiant que viscéral. Marion Cotillard amène un côté détaché à Lady Macbeth, qui la distingue des autres écossaises, qui s'explique par son ambition dévorante et dévastatrice.

Macbeth (2015) de Justin KurzelMacbeth (2015) de Justin KurzelNote : Macbeth (2015) Justin KurzelMacbeth (2015) Justin KurzelMacbeth (2015) Justin Kurzel

Par contre, et c'est le seul défaut du film, on reste déçu par l'omission de quelques détails seulement survolés voir inexistants dans le film comme son somnambulisme, sa manie de se laver les mains qu'elles croient couvertes de sang, son suicide...) ; malgré tout Marion Cotillard offre une performance sublime et habitée, exceptionnelle pour ce qui est sans doute sa perfomance l aplus impressionnante. Outre Lady Macbeth il y a évidemment le roi, Macbeth lui-même, incarné par Michael Fassbender, juste inouï et fascinant, il est un Macbeth énorme de justesse, montrant l'évolution et la déchéance psychologique d'un homme qui s'enfonce dans les méandres de la fureur et de la perdition. Les seconds rôles ne sont pas en reste, avec un Paddy Considine méconnaissable, un Sean Harris charismatique ou encore Elizabeth Debicki qui gagne à être connue après ses rôles dans son année après " Agents très spéciaux" et "Everest". On est secoué par les jeux des acteurs, tous impeccables et épatants mais on est aussi frappé par la beauté formel du film. La mise en scène impose un style envoutant qui colle parfaitement au mysticisme et à l'apocalypse tout en servant des plans sidérants de beauté. La photographie est juste sublime, signée par ailleurs de Adam Arkapaw que Variety avait nommé dans son top 10 des directeurs photos à surveiller en 2011. Un esthétisme stylé qui n'est pas sans rappeler le chef d'oeuvre "Valhalla Rising - le Guerrier silencieux" (2009) de Nicolas Winding Refn... Au mutisme sauvage et quasi solitaire de Refn, Kurzel réponds par un flux de vers somptueux où se disputent les ambitions de tout un royaume. A la survie d'un petit groupe on passe aux combats intérieurs d'un roi, à l'existence ou à la mort d'une tyrannie. Le réalisateur signe une tragédie où la manipulation sournoise d'un couple au service de leur ambition va autodétruire leur propre couple. Il s'agit avant tout de destin, où comment Macbeth force ce qui est déjà écrit. Shakespeare serait sans doute fier du résultat, même si tout ne peut pas être transposé. Un grand et beau film qui tient toutes ses promesses, en espérant que Justin Kurzel confirmera avec son prochain film "Assassin's Creed" (2016), avec un certain Michael Fassbender...