The Visit, ou le (presque) retour de Shyamalan.

Ces dernières années, M. Night Shyamalan semblait avoir atteint le fond du trou. On le disait sur une mauvaise pente depuis La Jeune Fille de l'Eau, grillé après la sortie de Phénomènes et blacklisté par Hollywood avec les très mauvais After Earth et The Last Airbender. Le cinéaste nous revient donc par la petite porte avec un film de série B, . L'argument est simple : deux enfants vont rencontrer pour la première fois leurs grands-parents, avec lesquels leur mère est brouillée, et passer une semaine en leur compagnie dans leur petite ferme. Ils vont rapidement se rendre compte que, à la nuit tombée, papi et mamie ne sont pas très nets. Pour l'occasion, Shyamalan s'associe avec Jason Blum, le roi de l'épouvante moderne avec les licences Paranormal Activity et , et construit son projet dans une certaine économie de moyens : casting de relatifs inconnus, budget de 5 millions seulement, tournage en 27 jours et absence de bande-son. Pour faire simple, n'a pas la mégalomanie de ses prédécesseurs, ce qui permet au réalisateur de revenir de façon franche et décomplexée. Et ce n'est pas peu dire ! Pour un film d'épouvante, procure de sacrées crises de rire en jouant la carte de l'ascenseur émotionnel, alternant frissons, tension et hilarité. Un choix assez osé qui fonctionne, certes, mais au prix du désamorçage de certaines scènes d'angoisse. Dommage. L'utilisation de la vue subjective et du mockumentary, si elle est intéressante, n'échappe pas aux poncifs du genre. Certaines séquences et certains plans, de terreur notamment, semblent directement extraits des productions de Jason Blum.

The Visit, ou le (presque) retour de Shyamalan.

Cependant, on retrouve la patte de M. Night Shyamalan dans certains cadrages et dans la composition des plans. La mise en scène est d'ailleurs un élément constitutif de la narration : Becca n'est autre qu'un double du cinéaste lorsqu'il était enfant. Si ce dernier nous a déjà prouvé que sur la forme il pouvait mieux faire, qu'en est-il sur le fond ? Force est de constater que les thématiques favorites de Shyamalan sont de retour et plutôt bien exploitées. Dans on retrouve de nombreux ingrédients qui ont fait la renommée de Shyamalan : l'enfance, la famille, les repas, le twist bien senti, le décor champêtre ; autant de thèmes qui peuplent son univers cinématographique. Mais ce n'est pas tant là-dedans que épate, bien au contraire. L'attrait majeur du film c'est de donner à voir deux duos de personnages diamétralement opposés : il y a les enfants et les grands-parents, les jeunes et les vieux. Et -presque- rien au milieu. Ici l'angoisse repose essentiellement sur un couple de vieillards dont les agissements, à la nuit tombée, sont plus que suspects. Et c'est là que le cinéaste joue habilement des peurs universelles : la vieillesse, la décrépitude, la sénilité mais aussi l'incontinence... pour supposer le fantastique. Sans déflorer l'intrigue, disons simplement que Shyamalan joue de sa réputation de cinéaste du fantastique pour mieux manipuler le spectateur à accepter une situation dont les bases ne sont peut-être pas aussi claires qu'il veut nous le faire croire. Et le spectateur de se questionner inlassablement sur la raison de cette folie, étudiant toutes les pistes possibles. Très malin.

The Visit, ou le (presque) retour de Shyamalan.

Cette visite n'est pas exactement le retour qu'on attendait. Cependant c'est une incartade qui aura le mérite de retenir notre attention et de nous interroger sur la suite de la carrière de Night Shyamalan dont on dit qu'il a perdu son mojo. Si reste un film assez inégal, il ne manque pas d'une certaine aura et saura diviser le public entre complaisance et détestation. Et puis finalement, pourquoi pas ?