LA VANITÉ : Blue hotel ★★★☆☆

Une comédie assez subtile qui ose traiter de la question de l’euthanasie.

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Tel Un Chant de Noël de Dickens, le nouveau film de Lionel Baier pose son contexte de fin d’année pour mieux en faire ressortir un sentiment macabre, comme si la mort et les regrets tombaient en même temps que les flocons de neige. Ajoutez à cela l’unique décor (ou presque) d’un motel miteux tendance Psychose, et vous avez une ambiance à priori dérangeante. Pourtant, le cinéaste en tire une comédie douce-amère dans laquelle David Miller (Patrick Lapp), un ancien architecte apathique atteint d’un cancer, se prépare à mettre fin à ses jours. Malgré la présence d’Esperanza (Carmen Maura), qui appartient à une association d’aide au suicide, sa procédure est retardée suite au désistement de son fils, refusant à la dernière minute d’être son témoin. A première vue, La Vanité pourrait n’être qu’un pamphlet maladroit sur l’euthanasie, mais il est intéressant de se concentrer sur la cas de l’enfant de David. Son unique apparition se fait devant l’hôtel. Il est dans sa voiture, attendant que son père ne l’atteigne. La caméra reste alors du point de vue d’Esperanza, qui nous prive du dialogue échangé quelques mètres plus loin. Néanmoins, on comprend déjà (et cela sera confirmé par la suite) que cette dispute ne dépend pas d’un souci d’idéologie, mais bien d’une relation père-fils conflictuelle.

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Note d’intention du reste du film, cette séquence appuie la volonté du cinéaste de se concentrer sur ses personnages et leurs émotions, plutôt que de politiser la question du suicide assisté. Comme David Miller, il affiche sa curiosité, son envie de connaître les autres, à commencer par le gigolo de la chambre d’à côté (Ivan Georgiev). A grands coups de révélations et de remises en question, Baier retarde ainsi la décision du vieil homme qui nous est promise depuis le début du long-métrage, carotte mettant en avant l’action lente du temps (quitte à parfois rallonger inutilement l’ensemble). Il en décrit même tout le poids par cette artificialité théâtrale (principalement dans les décors et son concept de huis-clos) qui révèle une immobilité, une incapacité rassurante à sortir de ce monde irréel que l’on s’est créé. Il suffit pourtant de regarder en arrière et d’oser soulever le rideau rouge pour faire face à la réalité. Le réalisateur n’en vient pas non à trop simplifier cette introspection, mais la laisse évoluer lentement au fil de son film qui, malgré sa modestie parfois foutraque, révèle une profonde sincérité grâce à l’amour qu’il porte à ses personnages et à leur capacité à provoquer le rire par ce mélange audacieux entre le sarcasme, le burlesque et l’humour absurde.