Critique : Edge Of Tomorrow (2014)

Edge Of Tomorrow 1Résumé : Alors que l’Europe subit une invasion extra-terrestre, le major Bill Cage, enrôlé de force pour participer au débarquement sur les plages normandes, revit indéfiniment la même journée.

Objet d’une duplication extra-terrestre dans l’odyssée de Joseph Kosinski (le sympathique Oblivion), espion high-tech crapahutant sur les parois vitrées de la tour d’ivoire du royaume Quatari chez Brad Bird (l’excellente quatrième Mission: Impossible), Tom Cruise incarne, depuis quelques années, des Crusaders virtualisés et évanescent qui n’existent que par la force du numérique. "Le virtuel, c’est le réel avant qu’il ne passe à l’acte" disait très justement Maurice Benayoun, plasticien de l’art numérique. À l’état de fœtus, il n’est donc qu’un simple civil déguisé en major prosélyte sur les canaux du monde entier, un déserteur enrôlé de force dans une section de l’armée américaine, une chair à canon larguée sur les landes normandes afin de nourrir des aliens belliqueux. Ce héros potentiel indiqué par le choix de son avatar cinématographique, Bill Cage devient un héros en acte par le truchement d’une substance extra-terrestre, disposant de la capacité des créatures alpha de revenir indéfiniment au même point de contrôle une fois passé l’arme à gauche. Une habileté lui permettant également de localiser le générateur de paradoxe temporelle assurant à l’ennemi le succès de ses opérations. La progression par l’échec proposé par cet héroïsme 2.0 transformera alors progressivement ce noob des champs de bataille en expert du shoot extra-terrestre, replongeant par la même les gamers dans leur déliriums vidéoludiques. En effet, à l’heure où les jeux-vidéo adoptent une écriture de plus en plus cinématographique, Edge Of Tomorrow, lui, porte l’empreinte de ces Timesplitters, Call Of Duty et autres Final Fantasy, de ces jeux de plateforme, de ces RPG et ces FPS basés sur l’apprentissage par l’action. Cela passe par des références visuels, mais aussi par des étapes clés, indissociables du monde digital (entrainement, infiltration, rail-shooting). Le nouveau métrage de Doug Liman s’inscrit ainsi pleinement dans la logique d’un monde déréalisé par un héros répondant à une logique d’interactions programmées et des joueurs devenant spectateur de leurs fantasmes virtuels. Ce n’est alors plus une surprise lorsque l’on découvre que ce récit de science-fiction vient d’un roman graphique japonais, une culture qui a vu naitre Tetsuo et autres Mecha, deux exemples de la fusion irrémédiable de l’homme avec la machine. Par un montage brillant, le réalisateur parvient, pendant près de 90 minutes, à soutenir son concept sans jamais relâcher le rythme. Le solide tandem composé par Tom Cruise et Emily Blunt n’est d’ailleurs pas étranger à cette réussite. Mais cette communion du fond et de la forme est à la hauteur du blackout venant crasher le système narratif dans une dernière demie-heure saturée d’incohérences et de seconds couteaux sacrifiables, se concluant sur un dénouement d’une langueur monotone. (3/5)

Edge Of Tomorrow 2

Edge Of Tomorrow (États-Unis, 2014). Durée : 1h53. Réalisation : Doug Liman. Scénario : Christopher McQuarrie, Jez Butterworth, John-Henry Butterworth. Image : Dion Beebe. Montage : James Herbert. Musique : Christophe Beck. Distribution : Tom Cruise (le major Bill Cage), Emily Blunt (Rita Vrataski), Bill Paxton (le sergeant instructeur Farell), Brendan Gleeson (le général Brigham), Noah Taylor (le docteur Carter).