Coup de cœur pour les Documents Interdits

Coup de cœur pour les Documents Interdits

Parmi les manifestations proposées dans le cadre de la quatorzième édition du Festival International des scénaristes de Bourges, s’il en est une que j’ai appréciée, c’est bien la Leçon de Télévision qui se déroulait le jeudi 31 mars aux Beaux Arts. Jean Teddy Filippe y présentait ses cultissimes Documents Interdits au cœur d’un débat avec Frédéric Temps et Frédéric Krivine. Sacrée affiche!

Apprenant que cette collection était disponible en ligne, j’ai décidé derechef de la présenter à ceux d’entre vous qui ne la connaissent pas encore.

Jeudi à treize heures, errant dans les couloirs de l’Hôtel d’Angleterre qui donnait un cocktail pour les participants du Marathon d’Écriture du Court-Métrage, une coupe de champ’ dans une main, une salade de fruits dans l’autre, les deux scripts de mes filleuls sous le bras, ordinateur à l’épaule (les chambres d’Hôtel n’étaient pas prêtes à notre arrivée), flanquée de mon fidèle assistant, je me suis invitée à la table d’un élégant confrère. Après qu’il m’ait demandé si j’étais marathonienne (running gag des prochains jours), levant un sourcil en s’entendant répondre que j’étais marraine, nous avons engagé la discussion mais sans échanger nos patronymes. Au terme d’un passionnant entretien, je savais que mon voisin de table était parrain, scénariste et cinéaste et qu’il devait participer à une conférence, mais pas que j’avais partagé mon déjeuner avec Monsieur Jean Teddy Filippe himself in person, auteur des cultissimes Documents Interdits! Oh my god mais quelle cruche!

Il faut dire que, comme dans tous les festivals, on passe son temps à croiser plein de monde sans les reconnaitre, les photos des programmes s’avérant souvent peu fidèles à la réalité. Bon en même temps, chaque malheur a du bon: je n’aurais sans doute pas osé m’incruster à la table du maître si je l’avais reconnu…

Enfin bref, j’étais très émue par cette rencontre et encore plus impatiente d’assister à la Leçon de Télévision du lendemain, qui avait la bonne idée de se dérouler APRÈS le Marathon.


Coup de cœur pour les Documents Interdits

Jean Teddy Filippe répond au public

Coup de cœur pour les Documents Interdits

Jean Teddy Filippe & Frédéric Krivine

Animée par Frédéric Temps, fondateur de l’Etrange festival, et par Frédéric Krivine, cette master-class permettait de visionner trois des fameux faux documentaires avant d’écouter leur auteur évoquer cette aventure hallucinante et ses répercussions, puis répondre aux questions du public.

Vous ne connaissez pas les Documents Interdits? Il s’agit d’une collection de douze films « rassemblés » par Jean Teddy Filippe, présentés comme des documents amateurs filmés aux quatre coins du globe, qui auraient capté des phénomènes paranormaux.  Initialement diffusés sur Antenne 2 à la fin des années quatre-vingt, ces petits bijoux d’humour parodique ont déchainé les passions.

Si leur auteur pensait qu’il était limpide que ces courts-métrages étaient des fakes, il n’en fut pas de même pour les spectateurs! Les Documents Interdits génèrent depuis plus de vingt ans un véritable culte chez maints auteurs, cinéastes et cinéphiles, mais il y a encore une poignée d’acharnés qui clament haut et fort que ces films sont authentiques, ce qui amuse énormément Jean Teddy Filippe (il y voit une sorte d’hommage).

Je vous propose de découvrir l’intégralité de cette collection sur le site d’Arte, avec en prime le fameux treizième film inédit, du pur bonheur!

Fausses images d’archives, commentaires et traductions en voix-off, montage quasi invisible, cadrage approximatif suggérant une caméra amateur, dates et lieux crédibles, pseudo témoins, suggestion de complots gouvernementaux pour cacher la vérité au grand public…, tout est fait, à première lecture, pour induire le spectateur en erreur mais les images sont justement tellement énormes que la narration en devient décalée et c’est tout l’art de l’auteur-cinéaste. Son œuvre suscite avec brio une réflexion sur l’écriture documentaire mais aussi sur la façon d’insuffler du réalisme dans la fiction, de suggérer émotion et angoisse en organisant des images relativement plates.

Vous souvenez-vous de la fausse affaire Roswell de 1995? Jacques Pradel avait présenté sur TF1 une soi-disant autopsie d’alien qui aurait été réalisée après le fameux crash, en 1947. Arte avait alors demandé à Jean Teddy Filippe de tourner un document interdit sur cette thématique afin de démonter la supercherie de la chaîne concurrente.

Ce savoureux film intitulé Khos Ahlas est lui aussi disponible sur la toile, sur Wat TV en l’occurrence.

Je vous encourage vivement à voir ou revoir ces films férocement drôles mais aussi empreints de poésie. On pense bien évidemment à la fausse invasion extra-terrestre orchestrée par Orson Welles en 1938, via une lecture radiophonique très réaliste de La Guerre des Mondes, mais aussi, à l’autre bout du spectre, aux films fantastiques qui jouent sur cette notion de faux reportage: The Blair Witch Project, Paranormal Activity