Le Septième Continent (1989) de Michael Haneke

Premier long métrage de l'autrichien Michael Haneke, réalisateur pourtant déjà expérimenté avec plusieurs téléfilms depuis "... Und was Kommt Danach ?" (1973), et justement ce projet devait initialement être un énième téléfilm avant de pouvoir passer le cap des salles obscures. Le cinéaste s'est inspiré d'une histoire vraie, un fait divers dont il a lu l'article sur une famille qui se serait suicidée. Le cinéaste a surtout été intéressé par cette affaire en apprenant que la police avait retrouvé de l'argent jeté dans les toilettes, le menant à la réflexion que "dans la société d'aujourd'hui, l'idée de détruire de l'argent est plus taboue que le fait que des parents tuent leur enfant et eux-même". Michael Haneke co-signe son scénario avec Johanna Teicht qu'il retrouvera ensuite pour son second film, "Benny's Video" (1992). Le film sera connu plus tard comme le premier d'une trilogie composée des trois premiers longs métrages du réalisateur et nommé "Guerre Ville". Précisons que le titre fait référence à l'Australie. Le film est interdit au moins de 16 ans... Une famille autrichienne bourgeoise vit comme si elle était hors du monde ou plutôt hors de toute vis sociale. Le couple et leur fillette semblent vivre sans bonheur ou joie, comme si ils n'attendaient plus rien, vivant le quotidien comme une routine mortifère. Bientôt pourtant on comprend qu'ils se préparent à partir... 

Le père est joué par Dieter Berner qui va devenir ensuite lui-même réalisateur avec "le Mal de la Jeunesse" (2010), "Egon Schiele" (2016) et "Alma & Oskar" (2021), son épouse est interprétée par Birgit Doll vue dans "Trauma" (1984) de Gabi Kubach, "Bitte Labt die Blumen Leben" (1986) de Duccio Tessari ou "Un Dieu Rebelle" (1989) de Peter Fleischmann, tandis que leur fillette est jouée par Leni Tanzer vue ensuite dans "Die Distel" (1992) de Gernot Krää ou "La Tête du Maure" (1995) de Paulus Manker. Citons ensuite Udo Samel vu entre autre dans "Le Couteau dans la Tête" (1978) de Reinhard Hauff, retrouvera Haneke pour "Le Château" (1997) et "La Pianiste" (2001) et vu plus récemment dans "Rendez-Vous à Palerme" (2008) de Wim Wenders, Silvia Fenz Silvia Fenz vue dans "Le Procès Baader-Meinhof" (1986) de Reinhard Hauff ou "Todespolka" (2010) de Michael Pfeifenberger et retrouvera dans  "Muttertag" (1994) de Harald Sicheritz son partenaire Georges Kern vu dans "La Fuite" (1992) de David Rühm ou "La Liste de Schindler" (1993) de Steven Spielberg et sera surtout populaire dans son pays avec la série TV série TV "Quator pour une Enquête" (2005-2020), Robert Dietl vétéran vu dans "Le Joueur d'Echecs" (1960) de Gerd Oswald, "Le Grand Retour" (1963) de Arthur Hiller, "Seul dans Berlin" (1976) de Alfred Vohrer, "Cinq Jours, ce Printemps-là" (1982) de Fred Zinnemann ou "L'Ami Retrouvé" (1989) de Jerry Schatzberg, Georg Friedrich qui retrouvera aussi Haneke dans "71 Fragments d'une Chronologie du Hasard" (1994), "La Pianiste" (2001) et "Le Temps du Loup" (2003) et vu plus tard dans "Faust" (2011) de Alexandre Sokourov ou "Sisi & Ich" (2023) de Frauke Finsterwalder, Elizabeth Rath vue surtout à la télévision outre les films "Der Bär" (1984) de Don Askarian ou "Sibylle" (2015) de Michael Krummenacher... Le film débute avec un long plan silencieux, d'une scène de vie quotidienne d'une banalité froide et ennuyeuse qui est le premier pas, le premier indice d'une mise en scène et d'un style que Haneke impose et qu'il confirmera dans ses films suivants. Le film est scindé en trois parties sobrement chapitrées en trois années. 1987, on suit la famille que leur quotidien où les membres semblent en mode automatique, déshumanisé, où la caméra s'attarde plus sur les choses immatérielles plutôt que sur les personnages. La routine si ennuyeuse est donc subie aussi par le spectateur ce qui est un risque audacieux de la part du cinéaste.

1988, petit à petit on fait connaissance avec les parents et leur fillette, la communication est quasi inexistante entre eux mais ils semblent pourtant se comprendre même si la fillette a un mal être sans qu'on sache le pourquoi du comment, d'ailleurs jamais on n'aura des réponses à nos questions. 1989, la famille effectue plusieurs démarches soudaines mais très organisées et méthodiques. Le réalisateur impose alors encore plus de séquences longues et redondantes, certes ennuyeuses et ennuyantes mais qui démontrent la volonté certaines d'aller jusqu'au bout de leur choix. On s'interroge encore : pourquoi autant d'étapes pour une finalité qui en a nul besoin ?! Idem, on n'en saura rien. Haneke choisit une mise en scène froide et clinique d'une exigence impressionnante mais si pessimiste et/ou austère et froide qu'on ne ressent aucune émotion réelle, il n'y a pas de suspense ou de tension, peut-être juste un effroi et une incompréhension malaisante dans ses 10-15 dernières minutes. Le réalisateur place d'ores et déjà ce qui seront ces thèmes de prédilection comme le représentation d'une violence ordinaire, la deshumanisation ou la désintégration de la cellule familiale, et notons que les prénoms Georg et Anna seront particulièrement récurrents dans ses prochains film. Si ce film est une entrée en matière, Haneke sait où il va et sait ce qu'il fait, tout est calculé et impressionne déjà par sa volonté de bousculer le petit confort de son public et poursuivra jusqu'à quelques chefs d'oeuvres sans concession avec les futurs "Funny Games" (1997), "La Pianiste" (2001) ou "Le Ruban Blanc" (2009)... À suivre... 

Note :    

Septième Continent (1989) Michael HanekeSeptième Continent (1989) Michael Haneke

13/20