[CRITIQUE] : Sick of Myself

[CRITIQUE] : Sick of Myself

Réalisateur : Kristoffer Borgli

Avec : Kristine Kujath Thorp, Eirik Sæther, Fanny Vaager,…
Distributeur : Tandem
Budget : Comédie Dramatique.
Nationalité : Norvégien
Durée : 1h37min
Synopsis :
Signe vit dans l’ombre de son petit ami Thomas, à qui tout réussit. En manque d’attention, elle décide de faire croire à son entourage qu’elle est atteinte d’une maladie rare. Mais le mensonge fonctionne un peu trop bien, et elle est vite prise à son propre piège.

Critique :

#SickOfMyself, porté par la performance remarquable de Kristine Kujath Thorp, se fait une savoureusement perverse et captivante comédie noire frappée de doux accents de body horror, pensée et conçue comme une critique incisive des normes qui régissent notre société contemporaine. pic.twitter.com/lGllHXyCFT

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) May 31, 2023

Dégainé en salles un an après sa présentation cannoise, alors qu'une nouvelle édition vient même tout juste de se clore, Sick of Myself, estampillé second long-métrage du wannabe cinéaste norvégien Kristoffer Borgli, incarne l'une de ses petites curiosités qui émergent entre deux gros blockbusters rutilants made in Hollywood, de celles qui méritent toute notre attention tant elles nous hantent encore longtemps après vision.
Plongée cruelle et nihiliste au cœur d'un narcissisme toxique, celui qui fera passer une femme d'un comportement enfantin/capricieux un brin inofensif à une horrible expérimentation d'une détérioration corporelle volontaire (grâce à une drogue illégale et dangereuse sur laquelle elle a mis la main), pour attirer l'attention dont elle a besoin.
Soit Signe, qui cherche à tout prix à devenir le nouveau centre d'attention et de voler la vedette à son petit ami Thomas, un artiste plasticien dont les œuvres sont basées sur des objets volés.

[CRITIQUE] : Sick of Myself

Copyright Tandem Films


Une relation purement et simplement toxique et, même s'il est difficile de comprendre ce qui les pousse à poursuivre une union aussi destructrice, la vérité est finalement qu'ils sont tous les deux taillés dans le même marbre : ils sont deux narcissiques prêts à tout pour gagner une reconnaissance publique.
Mais le succès sans précédent de Thomas dans une grande galerie d'art d'Oslo a lancé Signe dans une recherche désespérée de trouver un moyen de surpasser cette popularité et, consciente de la façon dont le monde d'aujourd'hui consomme avec un voyeurisme morbide, les histoires et les événements tragiques, mais surtout de l'attention que les victimes reçoivent tant sur les réseaux sociaux que dans les médias, Signe se met volontairement à ingérer des pilules d'origine russe, qui avaient été retirées du marché pour leurs effets secondaires nocifs.
Avec son visage totalement défiguré, mais avec en contrepartie l'intérêt médiatique qu'elle espérait tant, celle-ci tombe lentement mais sûrement dans une spirale autodestructrice qui se fait parfaitement et ironiquement, le symbole de l'obsession furieusement contemporaine des jeunes générations à vouloir atteindre coute que coûte une renommée instantanée et fugace, sans jamais mesurer les conséquences de leurs actes.

[CRITIQUE] : Sick of Myself

Copyright Tandem Films


Dans la droite lignée de la nouvelle vague du cinéma norvégien porté par le tandem Joachim Trier/Eskil Vogt, Sick of Myself, porté par la performance remarquable de Kristine Kujath Thorp, se fait une étonnante et captivante comédie noire frappée de doux accents de body horror, pensée comme une critique incisive des normes qui régissent la société contemporaine.
Entre la victimisation excessive, le narcissme/égocentrisme exacerbé, la culture du like où la manière grossière dont les entreprises embrassent l'inclusion, le film, même s'il perd un brin de sa force dans son dernier tiers (où les résolutions tombent un brin comme un cheveu sur la soupe), est savoureusement pervers, cynique et inconfortable, un reflet cinglant de la culture de la popularité/gratification instantanée et de la célébration/vénération de l'égomanie.

Jonathan Chevrier
[CRITIQUE] : Sick of Myself