Houria (2023) de Mounia Meddour

Par Seleniecinema @SelenieCinema

A ne pas confondre avec le film algérien "Houria" (1986) de Sid Ali Mazif... Ce nouveau projet est le second long métrage de la réalisatrice franco-algérienne Mounia Meddour après le très joli et remarqué "Papicha" (2019) pour lequel elle a reçu le César du meilleur Premier film ainsi qu'une révélation pour sa jeune actrice César du meilleur espoir féminin. D'ailleurs, la cinéaste fait appel une nouvelle fois à sa jeune actrice pour cette seconde histoire de renaissance et de liberté sur une jeune femme en Algérie. Pour cette histoire la réalisatrice-scénariste collabore à nouveau avec un certain Xavier Gens, son producteur depuis "Papicha" (2019), qu'elle a connu en étant son assistante réalisateur sur son film "Hitman" (2007)...

A Alger, Houria est une jeune et talentueuse danseuse. Mais elle ne peut gagner sa vie aisément avec sa passion, elle travaille donc comme femme de ménage la journée tandis que la nuit elle participe à des paris clandestins. Un soir elle gagne gros, mais elle est violemment agressé juste après. Outre la perte financière, Houria voit définitivement sa carrière de danseuse s'envolée. Elle doit désormais accepter son corps meurtri et c'est grâce à une communauté de femmes qu'elle va trouver un nouveau sens à sa vie... Dans le rôle titre on retrouve naturellement la jolie Lyna Khoudri qui retrouve ainsi sa réalisatrice de "Papicha" (2019), mais qui a depuis gagné ses galons d'actrice accomplie, curieuse et prolifique avec des films aussi variés que "Qu'un Sang Impur..." (2020) de Abdel Raouf Dafri, "Haute Couture" (2021) de Sylvie Ohayon, "The French Dispatch" (2021) de Wes Anderson, "La Place d'une Autre" (2022) de Aurélia Georges ou "Novembre" (2022) de Cédric Jimenez. Elles retrouvent aussi après "Papicha" (2019) l'actrice Amira Hilda Douaouda ainsi que leur partenaire Marwan Fares vu auparavant dans "Crépuscule des Ombres" (2014) de Mohammed Lakhdar-Lamina ou "Le Puits" (2015) de Lotfi Bouchouchi. Citons surtout Rachida Brakni vue dernièrement dans "Soeurs" (2019) de Yamina Benguigui ou "La Coeur des Miracles" (2022) de Hakim Zouhani et Carine May. Citons encore Salim Kissari aperçu dans "Le Nouveau Jouet" (2022) de James Huth ou "L'Homme Parfait" (2022) de Xavier Durringer, puis enfin Ali Damiche vu dans "Police" (2020) de Anne Fontaine, "Athena" (2022) de Romain Gavras et "Tirailleurs" (2023) de Mathieu Vadepied... Très vite on remarque que ce film est dans la droite lignée de "Papicha" (2019), dans le style, dans le genre et dans tout son contexte politico-social de l'Algérie et à la position de la femme. La mode a laissé place à la danse mais il est toujours question d'émancipation, de passion, de liberté sans compter une dimension qui rappelle un peu "En Corps" (2022) de Cédric Klapisch.

On suit Houria (en arabe selon les traductions signifie liberté ou nymphe), danseuse qui attend sa chance mais dont l'agression va briser ses espoirs "professionnels". L'intelligence de Mounia Meddour est d'éviter tous les écueils inhérents au genre, à savoir que Houria ne se morfond pas, rebondit vite car elle ne peut s'empêcher de danser (passion), elle ne tergiverse pas dans ses émois ou ses doutes, et si elle en a elle avance malgré tout, jamais on ne tombe dans le pathos car la liberté c'est aussi savoir la saisir et la résilience reste un combat. La réalisatrice met en place une mise en scène qui oscille entre l'âpre et l'onirisme, mais on peut aussi être un peu déçu par des chorégraphies qui font un peu amateur, sans doute accentuer dans des séquences de danse trop découpées ce qui cassent la fluidité de l'ensemble. Mais la vraie réussite du film est comment le récit intègre la question du passé, la relation ambigüe et complexe avec la question du pardon, des causes et conséquences qui en découlent. Si les danseuses symbolisent l'optimisme et l'espoir, l'histoire démontre un pragmatisme et une fatalité qui fait encore peur. Evidemment on ne voit que Lyna Khoudri une fois de plus merveilleuse de douceur et d'abnégation. En tous cas, vu la cohérence de forme et de fond avec "Papicha" on se met à voir un prochain film pour clore une trilogie... Un joli film à conseiller.

Note :

14/20