Le défilé de la mort

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à Éléphant Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Le défilé de la mort » de John Farrow.

« Je regrette que vous soyez américain. Si vous étiez chinois je vous fusillerais pour trahison. »

Chine. 1941. David Jones et Johnny Sparrow, deux américains qui vivent du trafic d’essence avec les japonais rencontrent une jeune institutrice idéaliste. Durant un bombardement, Sparrow trouve un enfant dont la mère vient de périr. Jones, le cynique, veut s’en débarrasser, tandis que Sparrow se prend d’affection pour le petit garçon.

« Dans tous les films américains que j’ai vu, les hommes embrassent des femmes ou tuent quelqu’un. Ou même les deux parfois. »

Si Hollywood joue assez tôt les éveilleurs de conscience pour alerter le public américain du péril fasciste grandissant (« Le dictateur », « Trois camarades » …) et sortir les Etats-Unis de leur politique isolationniste, l’industrie cinématographique américaine sut aussi se mobiliser pleinement, une fois la guerre déclarée, pour galvaniser la population en produisant – à la demande du gouvernement fédéral – nombre de films patriotiques. De « Casablanca » à « Jeux dangereux » en passant « Destination Tokyo ». Si la plupart des grands cinéastes contribuent à cet effort collectif, de John Ford à Frank Capra en passant par Fritz Lang, l’un des premiers réalisateurs à s’engouffrer dans la brèche demeure John Farrow. Cinéaste d’origine australienne, Farrow intègre ainsi l’industrie cinématographique un peu par hasard, en devenant scénariste à la fin des années 20 comme scénariste après avoir vécu une jeunesse d’aventures en qualité de marin. Propulsé réalisateur à la fin des années 30, il mènera une carrière prolifique au cours des deux décennies suivantes (jusqu’à ce décès prématuré), principalement dédiée aux films de série B. S’il se spécialisera très vite dans les films noirs (« La grande horloge », « Les yeux de la nuit ») et dans les films d’aventures (il dirige notamment John Wayne dans « Le renard des océans » et « Hondo, l’homme du désert »), il réalise en 1942 et 1945 pas moins de cinq films centrés sur la guerre, dont « La sentinelle du Pacifique » (1942), premier film américain de fiction à traiter d’une authentique bataille, en l’occurrence de la défaite subie quelques mois plus tôt face aux japonais sur l’Atoll de Wake.

« On peut vivre une vie entière aussi pleinement en cinq minutes qu’en un siècle. Tout comme on peut vivre un siècle sans le souvenir du moindre moment de bonheur »

Tourné en 1943 d’après la pièce « Quatre frères » d’Archibald Forbes, « Le défilé de la mort » nous plonge dans les affres de la Chine continentale en proie aux attaques incessantes et meurtrières des troupes impériales japonaises qui sèment la mort et le chaos derrière elles (à l’image du plan séquence très réussi qui ouvre le film).Ce qui n’empêche pas deux américains au tempérament intrépide de s’adonner, au milieu des colonnes de civiles fuyant en désordre les massacres, à un lucratif commerce d’essence aussi bien avec les chinois qu’avec les japonais. Jusqu’à ce que les évènements ne les obligent à choisir leur camp. En cela, David Jones à des faux airs de Rick Blaine (le héros de « Casablanca »), tiraillé entre son individualisme forcené (son business prime sur des préoccupations morales) et sa prise de conscience progressive du drame qui se joue sous ses yeux, qui le poussera finalement à se ranger en faveur des opprimés. Film de propagande oblige, le scénario – et c’est assez rare pour le souligner – n’épargnera rien aux spectateurs des atrocités commises par les japonais sur les populations civiles, du meurtre purement cruel et gratuit d’un petit garçon innocent au viol collectif de l’une des jeunes étudiantes chinoises faisant partie du convoi. Des japonais présentés d’ailleurs plus généralement comme l’archétype même du peuple fourbe et déloyal, à l’image de la dernière séquence – ironiquement funeste – du film. Fort de sa durée resserrée (à peine 80 minutes), « Le défilé de la mort » nous offre en tout cas un spectacle, réussi et trépident, mêlant à la fois action, romance et aventure. Le tout porté par un casting au diapason (Alan Ladd, Loretta Young et William Bendix en tête). Une série B très plaisante.

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Le blu-ray : Le film est présenté en version restaurée dans un nouveau Maser Haute-Définition et proposé en version originale américaine (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’une présentation par Laurent Aknin ainsi que par une bande-annonce d’époque. Un livret collector de 24 pages par Denis Rossano vient compléter cette belle édition.

Édité par Éléphant Films, « Le défilé de la mort » est disponible en combo blu-ray + DVD, ainsi qu’en édition DVD depuis le 14 juin 2022. Il est également disponible en édition blu-ray simple depuis le 25 octobre 2022.

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