Les piliers du ciel

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à Sidonis Calysta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Les piliers du ciel » de George Marshall.

« C’est peut-être écrit dans le traité, mais les chefs ne lisent pas entre les lignes. Et moi non plus ! »

Oregon, 1868. Les tribus indiennes de la région, pratiquement toutes converties au Christianisme, ont enterré la hache de guerre. Sous la tutelle bienveillante du Sergent Bell, authentique gardien de leur réserve, elles se révoltent à nouveau, lorsqu’un détachement de la cavalerie, commandé par le colonel Stedlow, jette un pont sur leur rivière et commence à tracer une route à travers leurs terres. Galvanisés par un jeune chef, Kamiakin, les Indiens passent à l’attaque, amorçant une nouvelle guerre que seul Bell semble en mesure d’enrayer.

« Il ne fait peut-être pas honneur à son uniforme. Mais si vous aviez cent bonshommes comme lui vous pourriez éteindre les feux de l’enfer ! »

Pionnier parmi les pionniers de l’industrie cinématographique américaine, George Marshall réalise ses premiers films dès le milieu des années 10, à l’ère du muet. Le début pour lui d’une carrière d’une remarquable longévité à laquelle il mettra un terme plus d’un demi-siècle plus tard, à presque quatre-vingt ans, en réservant ses dernières réalisations pour la télévision. Souvent considéré comme un tâcheron, il mènera néanmoins une prolifique carrière dans la série B, dédiée aux comédies (il aura d’ailleurs l’insigne honneur de diriger la crème des humoristes de son époque, de W.C. Field à Laurel et Hardy en passant par Bob Hope et Jerry Lewis) et aux westerns, genre qu’il affectionne tout particulièrement. Avec à son crédit, quelques titres fort sympathiques, comme l’excellent « Femme ou démon » (1939, avec James Stewart et Marlene Dietrich) et son remake « Le nettoyeur » (1954, avec Audie Murphy), « La vallée de la poudre » (1958, avec Glenn Ford et Shirley McLaine) ou encore le monumental « La conquête de l’ouest » qu’il coréalise en 1962 avec John Ford et Henry Hathaway.

« Si la tribu doit se perdre, qu’elle se perde au combat ! Et non dans l’estomac des ennemis de mon peuple. »

Adapté en 1956 du roman éponyme de Will Henry pour le compte de la Universal Pictures, « Les piliers du ciel » s’inscrit très clairement dans la lignée des westerns pro-indiens produits alors par le studio (« Tomahawk », « Taza fils de Cochise », « Au mépris des lois » …). Le film s’intéresse ainsi à un épisode méconnu (et peu montré à l’écran) mais néanmoins véridique de la conquête de l’ouest, à savoir la christianisation des dernières tribus indiennes sises dans les montagnes verdoyantes du lointain Oregon. Une acculturation à marche forcée, qui n’empêchera cependant pas – une fois n’est pas coutume – les blancs de revenir sur leur parole en rognant progressivement les territoires des réserves indiennes. Ce qui déclenchera une (nouvelle) révolte sanglante, matérialisée dans le film par une longue séquence de course-poursuite entre tuniques bleues et indiens à laquelle la confusion générale donne une dimension étonnement réaliste. Mais c’est surtout dans son sous-texte moral que le film trouve ton son sens, avec ce dilemme cornélien auquel les indiens se retrouvent confronter : rester fidèle à leurs traditions séculaires et disparaitre ou se soumettre aux usages du nouvel occupant pour tenter de survivre ? Mais en dépit de la pertinence de son questionnement moral, « Les piliers du ciel » souffre d’un scénario bancal et un peu fourre-tout, qui se perd un peu entre intrigues secondaires hors sujets (le triangle amoureux entre le héros, son rival et l’épouse de ce dernier), ruptures de ton maladroites (la légèreté du début avec les bourdes à répétition des jeunes soldats) et surtout un final trop lyrique dans lequel la religion (des blancs) devient in fine le terreau de la paix entre les peuples (le sacrifice « christique » du vieux missionnaire faisant taire les fusils). Inégal sur le fond comme sur la forme, « Les piliers du ciel » reste néanmoins une série B plutôt distrayante et agréable, de par l’originalité de son sujet autant que par son joli casting (Jeff Chandler, Lee Marvin, Dorothy Malone, Ward Bond).

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Le blu-ray : Le film est présenté en version restaurée dans un Master Haute-Définition et proposé en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’un portrait de l’acteur Jeff Chandler par Jean-Claude Missiaen ainsi que de deux présentation respectivement signées par Patrick Brion et Jean-François Giré.

Édité par Sidonis Calysta, « Les piliers du ciel » est disponible dans la collection Silver en combo blu-ray + DVD ainsi qu’en édition DVD depuis le 16 février 2023.

Le site Internet de Sidonis Calysta est ici. Sa page Facebook est ici.