Nuit de Feu (2022) de Tatiana Huezo

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Nouveau film de la réalisatrice mexicano-salvadorienne Tatiana Huezo, méconnue chez nous mais elle est déjà une cinéaste expérimentée de plusieurs courts métrages, de documentaire domme "El Lugar Mas Pequeno" (2011) sur l'importance de la forêt pendant la Guerre civile du Salvador, puis ses longs métrages de fiction "El Aula Vacia" (2015) et "Tempête" (2016) qui se racontent le destin de femmes dans la société salvadorienne. Pour son nouveau projet, la réalisatrice-scénariste adapte le roman "Prières pourcelles qui furent volées" (2014) de Jennifer Clement. Une nouvelle histoire sur des femmes qui cherchent à survivre dans une région mexicaine. Le film a été présenté au Festival de Cannes 2021 à un Certain Regard où il a obtenu la Mention spéciale du Jury, tandis qu'il représente le Mexique pour l'Oscar du meilleur film étranger... 

Dans un village de montagne au Mexique, des fillettes font de maisons abandonnées leur terrain de jeu mais le danger est omniprésent. Le Cartel qui règne sur la région fait sa loi, et surtout enlève les jeunes filles très régulièrement. Des mamans décident alors de couper court les cheveux de leur fillette. Les années passent, les jeunes filles continuent à se cacher alors que le quotidien reste difficile mais dans un monde de violence la menace est toujours inéluctable... Le récit dure plusieurs années, les personnages principaux sont donc des fillettes qui vont devenir adolescentes, toutes incarnées respectivement par deux actrices à des âges distinctes pour leurs premiers rôles au cinéma. On peut citer entre autre les jeunes Ana Cristina Ordonez Gonzales, Marya Membreno ou Camile Gaal et, à l'exception notable de l'actrice Alejandra Camacho remarquée quant à elle dans "Linea De Sangre" (2019) de Garfield Boston et "Claw" (2021) de Gerald Rascionato. Elles sont entourées des adultes Guillermo Villegas révélé dans "Sin Nombre" (2009) de Cary Joji Fukanaga, et vu depuis dans "Dias de Gracia" (2011) de Everardo Grout et "Palma Real Hotel" (2013) de Aaron Fernandez Lesur, retrouvant ainsi après le premier l'actrice Eileen Yanez vue dans "La Zona, Propriété Privée" (2007) et "Desierto Adentro" (2008) tous deux de Rodrigo Pla ou "Kill the Gringo" (2012) de Adrian Grunberg, puis après le second sa partenaire Mayra Batalla vue dans "Le Meilleur est à Venir" (2016) de Gustavo Loza, "Huesera" (2022) de Michelle Garza Cervera, elle retrouve aussi après "Palma Real Hotel" (2013) de Aaron Fernandez Lesur et "Qué le Dijiste a Dios" (2014) de Teresa Suarez l'acteur Norma Pablo vu dans "Man on Fire" (2004) de Tony Scott et "Sleep Dealer" (2008) de Alex Rivera... Dans un coin reculé du Mexique, dans un village déserté par les hommes partis travaillés de l'autre côté de la frontière, les mères survivent souvent en travaillant dans les champs de pavots du Cartel tout en vivant sous la menace de ce même Cartel qui enlève des jeunes filles. Les familles sont pauvres et tandis que les hommes tardent à envoyer de l'argent et/ou ne donnent pas de nouvelles durant des années parfois, elles vivent sous la menace constante de perdre leur enfant.

On suit donc l'enfance de trois fillettes auprès de leur maman, puis les années passent elles deviennent de jeunes filles qui rêvent d'amour et d'émancipation alors que le danger n'a jamais disparu. Le style du film est une chronique familiale et rurale, dans un réalisme aussi tendre que dure, modeste et routinier alors que les filles doivent réfrénées leur féminité. Malgré tout, la simple coupe des cheveux restent trop symboliques les fillettes restent des filles, et cela ne change jamais le degré de danger. Les mamans vident dans la crainte et la peur, les filles obéissent sans comprendre réellement, chaque jour oscille entre la récolte du pavot, les raids des bolides noirs du Cartel, le rendez-vous sur la montagne pour tenter de capter le réseau téléphonique, les jeux des filles et se cacher quand le danger est arrive. La réalisatrice dépeint avec justesse et sobriété ce quotidien certe routinier mais toujours sous l'épée de Damoclès, les mamans désemparées sans obtenir une once de bonheur, seules les filles s'offrent les petits plaisirs que l'enfance leur permet. Les jeunes actrices sont épatantes de naturelles et de nuances, les mamans sont émouvantes, la mise en scène subtile qui se sert magnifiquement de la lumière avec une très belle photographie. Un très joli film, qui ose un certain onirisme, une forte dose d'innocence dans un monde de brutes où les hommes font un monde d'égoïsme et de violence. A conseiller.

Note :      

14/20