[CRITIQUE] : Aucun Ours

[CRITIQUE] : Aucun OursRéalisateur : Jafar Panahi
Avec : Jafar Panahi, Naser Hashemi, Vahid Mobasheri,...
Budget : -
Distributeur : ARP Selection
Genre : Drame
Nationalité : Iranien
Durée : 1h47min
Synopsis :
Dans un village iranien proche de la frontière, un metteur en scène est témoin d’une histoire d’amour tandis qu’il en filme une autre. La tradition et la politique auront-elles raison des deux ?

Critique :

Autoportrait indirect et férocement dense, Jafar Panahi fait de son #AucunOurs un témoin édifiant des limites que l'État lui a imposées au fil du temps, mais surtout la preuve irréfutable de son incroyable détermination à la fois en tant qu'artiste et en tant que citoyen iranien. pic.twitter.com/WTykWkih43

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) November 23, 2022

La prolificité remarquable du cinéaste iranien Jafar Panahi, à nouveau mprisonné depuis juillet dernier à Téhéran (prétendument pour s'être simplement renseigné sur la situation de son compatriote cinéaste Mohammad Rasoulof), autant que son esprit subversif qui n'a fait que fleurir au fil du temps dans son travail, fait instinctivement de son cinéma une voix importante au coeur d'un système férocement répressif mais aussi et surtout au coeur d'un septième art mondial où les cartographies sont essentielles.
Il y a quelque chose d'infiniment puissant et beau dans le fait de voir qu'une voix artistique aussi brave et politiquement volubile, soumise à une censure stricte - pour être poli -, puisse non seulement défier l'ordre établi (aussi injuste et dénué de toute liberté d'expression soit-il), mais également s'adapter et continuer à condamner avec autant de véhémence tous les travers répressifs et manipulateurs du pouvoir en place.

[CRITIQUE] : Aucun Ours

Copyright ARP Sélection


Arrivant à point nommé dans les salles obscures après un passage primé à la dernière Mostra, son dernier long-métrage en date, Aucun Ours, incarne un nouveau et fantastique brûlot scrutant atermoiements d'un cinéaste - Panahi lui-même - supervisant à distance la production et le tournage de son film se déroulant à quelques kilomètres de là, de l'autre côté de la frontière irano-turque, visant à conter l'amour fictionnel contrarié de deux âmes cherchant vainement la liberté de simplement vivre leur vie comme ils l'entendent mais dont la quête est balayée d'un revers de la main par des leaders politiques et communautaires autoproclamés dogmatiques et fourbes - les vrais " ours " de l'histoire et de la réalité iranienne.
Autoportrait indirect et follement réflexif où la créativité (la vie, la liberté) est constamment confrontée à la peur (la répression, la mort), Panahi fait ici de l'acte de filmer et des images qui en résulte, des armes qui agissent comme des témoignages des dérives absurdes et dangereuses du pouvoir, autant par ce qu'elles dévoilent que par leurs existences elles-mêmes.
Dans la réflexion consciente de sa propre existence, Aucun Ours est un témoin édifiant des limites que l'État a imposées à son créateur, mais surtout la preuve irréfutable de son incroyable détermination à la fois en tant qu'artiste et en tant que citoyen iranien.
Jonathan Chevrier
[CRITIQUE] : Aucun Ours