[CRITIQUE] : Brad Pitt, la revanche d'un blond

Réalisateurs : Adrien Dénouette et Thibaut Sève
Avec : -
Distributeur : Arte France
Budget : -
Genre : Documentaire
Nationalité : Français.
Durée : 0h52min
Synopsis :
Au cours de ses trente ans de carrière, Brad Pitt n'a eu de cesse de briser son image archétypale de sex-symbol. Retour sur la trajectoire inattendue d’un acteur cinéphile et audacieux, parvenu à s'émanciper des carcans du glamour.
Critique :

S'il frise l’hagiographie, #BradPittLaRevanchedunBlond possède néanmoins un sous-texte passionnant sur ce que le public projette sur les acteur⋅ices hollywoodien⋅es : désir, perfection, fantasme et obsession, entretenant un culte impossible à ne jamais ternir. (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/bmimgbSG6p

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) October 4, 2022

« I want you to hit me as hard as you can » balance Brad Pitt à un Edward Norton circonspect dans Fight Club (1999). Découvert au début des années 90, dans Thelma & Louise de Ridley Scott, après de nombreuses années à galérer à Hollywood, Brad Pitt se place comme la gueule d’ange du cinéma. Une plastique de rêve (sublimé par Ridley Scott), des yeux bleus électriques, un léger accent du sud, l’acteur réalise son rêve de gosse. Mais ce rêve a un prix, celui de devenir un sex-symbol éternel, lisse et parfait, afin de faire fantasmer un public en majorité féminin. Alors, quand presque dix années plus tard, Brad Pitt endosse le rôle de Tyler Durden, et réclame une torgnole à Norton, il faut peut-être y voir l’envie de l’acteur de s'amocher, de mettre du sang, de la violence, de la misogynie sur sa plastique, et dire au revoir au beau-gosse pour y trouver derrière le véritable acteur ; l’acteur sérieux aux rôles complexes et à la carrière irréprochable.

[CRITIQUE] : Brad Pitt, la revanche d'un blond

Fight Club (1999) ©Splendor Films


Le dimanche 16 octobre se tiendra une soirée Brad Pitt sur Arte, où à cette occasion, le documentaire inédit Brad Pitt, la revanche d’un blond, sera diffusé après Légendes d’automne d’Edward Zwick (1994). Le choix du film est presque ironique quand on visionne le documentaire d’Adrien Dénouette et de Thibaut Sève, qui s’emploie justement à gratter le vernis de la beauté de l’acteur. Le film de Zwick célèbre, au contraire, cette beauté virginale, la mettant en contrepoint d’un environnement sauvage. Ce genre de rôle dont Brad Pitt a eu tant de mal à se détourner, Hollywood lui refusant la nuance au profit d’un personnage taiseux, gracile, beau et, hélas, plat. Il aura fallu trois tentatives, Seven (David Fincher), L’Armée des douze singes (Terry Gilliam), sortis tous les deux pendant l’année 1996 en France, puis enfin Fight Club, avant la fin du millénaire, pour que l’acteur puisse enfin mettre au tapis “l’homme le plus sexy du monde”.
Débarrassé (pour un temps du moins) du poids de la perfection, Brad Pitt devient acteur à part entière. Il peut s’essayer à la comédie, comme dans Burn After Reading (2008) des frères Coen où il cultive, avec beaucoup d’auto-dérision, le cliché du blond sportif. Mais c’est surtout l'occasion d'endosser des rôles forts et ténébreux, comme Jesse James, le héros de son enfance, loin du glamour et des paillettes. Son corps, dénué d’érotisme, se met au diapason avec des cinéastes exigeants, auxquels il prête son être mais aussi son argent, avec sa société de production Plan B Entertainment, fondée en 2002. À l’image de son idole Robert Redford qui, en devenant président du festival de Sundance en 1985, permet de promouvoir les films indépendants et leurs auteur⋅ices, Brad Pitt se met à la disposition des cinéastes qui ne veulent pas rentrer dans le moule hégémonique hollywoodien.

[CRITIQUE] : Brad Pitt, la revanche d'un blond

Légendes d'automne (1994) ©TriStar Pictures


Le documentaire d’Adrien Dénouette et de Thibaut Sève prend comme fil rouge la beauté de l’acteur pour mieux montrer ce qu’elle cache. Si on frise l’hagiographie - les deux réalisateurs parlent de ses problèmes d’addiction sans forcément s’y appesantir - Brad Pitt, la revanche d’un blond possède néanmoins un sous-texte passionnant sur ce que le public projette sur les acteur⋅ices hollywoodien⋅es : désir, perfection, fantasme, obsession, jusqu’à entretenir un culte impossible à ne jamais ternir; le divorce d’avec Angelina Jolie en est le parfait exemple.
Laura Enjolvy
[CRITIQUE] : Brad Pitt, la revanche d'un blond