Red rocket

Red rocketRocket... Plutôt pétard mouillé

Mickey Saber est un vrai looser, mais du type looser magnifique ; de ceux qui parviennent à nous attendrir. Le film commence au moment de son retour dans sa ville natale de l’Amérique profonde après une carrière hollywoodienne de porno star. Il débarque chez son ex-femme, celle avec laquelle il a commencé sa carrière de « comédien », en jean T-shirt, il semble être complétement fauché. Il pourrait rentrer la queue entre les jambes ; mais il est gouailleur, il est d’une audace indécente, il se met dans des histoires rocambolesques pouvant très mal tournées. On comprend que c’est ce comportement qui l’a obligé à quitter L.A. sans un sou.

Et là dans sa petite ville minable, il tombe sur une jeune serveuse rouquine sexy en diable et qui n’a pas froid aux yeux. Très vite, lui le vainqueur de prix pour ses prestations cinématographiques, se sent pousser des ailes ; il veut faire de la jeune fille la future star du X. Le gars est un vrai chat, toujours à essayer de retomber sur ses pattes ; quitte à se casser quelque fois la gueule. Il est drôle mais aussi pathétique et surtout toxique.

Et ce type de personnage incarnant l’Amérique profonde des sans grades qui croient encore au rêve américain dont ils sont pourtant les premières victimes est le fonds de commerce de Sean Baker. Son précédent film « Florida Project » avait été une véritable claque par le style et le ton employé qu’il reproduit ici avec autant de fougue. Il livre un cinéma très singulier. Les couleurs claquantes des façades des maisons sont le symbole de l’Amérique joyeuse qui réussit, mais Sean Baker gratte le vernis pour montrer un envers du décor peu glorieux. On peut être dérangé par ce film qui est cru et glauque, mais le second degré est tellement poussé que çà en est surtout drôle et tragique. La super masculinité pourrait choquer les féministes, mais l’outrance est parfois aussi la meilleure façon de dénoncer. Surtout que dans ce film, la jeune fille qu’il destine à devenir la future star du porno est moins victime de cet homme à l’égo surdimensionné et à l’ambition égoïste que d’un système. En effet, il est l’opportunité de sortir de sa médiocrité de bien gagner sa vie et rapidement ; il lui propose le rêve américain et elle y souscrit. Lui reste honnête, c’est le monde qui est malhonnête et les rêves que l’on instille dans les esprits. Et c’est Simon Rex qui s’y colle, est une ex porno star lui-même. Il a un potentiel comique incroyable qu’il exploite à n’en plus pouvoir, il est hyper séducteur et çà contrebalance le côté antipathique de son personnage.

Sean Baker conserve le ton transgressif de son précédent film pour livrer une histoire qui tourne entre satire et fable réjouissante. A travers ses personnages, il veut montrer aussi la décadence de l’Amérique, mais son propos perd en profondeur par rapport à « Florida Project ». A force d’enchainer les scènes pathétiques, il finit par être répétitif sur la longueur et à devenir auto parodique. C’est une limite à un film hors sentiers battus qui est malgré ce bémol très rafraichissant.

Sorti en 2022

Ma note: 13/20