[CRITIQUE/RESSORTIE] : L’homme n’est pas un oiseau

[CRITIQUE/RESSORTIE] : L’homme n’est pas un oiseau
Réalisateur : Dušan Makavejev
Acteurs : Milena Dravic, Janez Vrhovec, Eva Ras,...
Budget : -
Distributeur : Malavida
Nationalité : Yougoslave.
Genre : Romance, Comédie, Drame.
Durée : 1h16min.
Date de sortie : 19 avril 1967
Date de reprise : 05 janvier 2022
Synopsis :
Homme d’âge mûr et ingénieur zélé, Jan Rudinski dirige une équipe slovène venue installer une nouvelle fonderie dans l’un des plus grands centres de production du bassin minier de Bor. Malgré ses réticences, une histoire d’amour débute rapidement avec la fille de ses logeurs, Rajka, une jeune coiffeuse qui n'a pas froid aux yeux... Mais il est de plus en plus accaparé par son travail...

Critique :

Avant-goût de la dichotomie entre radicalisme et épanouissement personnel que le cinéaste développera plus tard, #Lhommenestpasunoiseau incarne une satire brillante et désenchantée, portée par l'engagement sincère de Makavejev à capter la réalité prosaïque d'une nation asphyxiée. pic.twitter.com/4Yh4hIzGuI

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) January 9, 2022

Il y a toujours quelque chose de fascinant dans le fait de scruter les premiers efforts de cinéastes acclamés, tant ils permettent parfois de déceler les premières graines de ce qui a constitué un tout au fil du temps.
Pourtant, ce n'est pas un processus aussi limpide lorsque l'on se penche sur le premier long-métrage du cinéaste yougoslave Dušan Makavejev, L'homme n'est pas un oiseau, car si l'on retrouve évidemment les thèmes charnières de son cinéma (l'épée à double tranchant de la libération sexuelle, le totalitarisme, le communisme, la lutte des classes, les relations tendues entre les hommes et les femmes,...), ils sont ici exprimés d'une manière résolument plus conventionnelle que pour ses oeuvres plus subversives, comme le surréalisme sexuel de Wilhelm Reich : Les Mystères de l'organisme ou encore Sweet Movie.
Si l'on perçoit sa sensibilité pour le réalisme social et l'observation pseudo-documentaire, sa satire sobre et subtile edt enracinée dans le cadre d'un récit lâche sur deux hommes (un troisième intervenant débarque cela dit en fin de bobine, un hypnotiseur prononçant un discours sur le pouvoir de son métier) aux métiers diamétralement opposés, mais qui incarne tous deux des ouvriers - à une échelle différente - sous le joug d'un système communiste qui contrôle et façonne leurs vies.

[CRITIQUE/RESSORTIE] : L’homme n’est pas un oiseau

Copyright Malavida - Avala


Un état qui maintient son peuple dans le droit chemin en le convainquant qu'il est a sa place, et qu'il ne doit absolument pas essayer de s'élever au-dessus de lui).
Mais plus qu'un regard politique, cet exposé sur la perte de soi, de contrôle et de pouvoir au coeur des régimes gouvernementaux oppressifs s'étant également dans la sexualité et la domination oppressante des femmes par les hommes (entre réprimandes, soumission et obéissance aveugle, quand elle n'est pas simplement un objet utilisable puis jetable), comme si la soumission de l'homme dans tous les aspects de sa vie, suscite instinctivement le besoin d'un sentiment de supériorité et de domination dans le seul endroit où il peut le faire - sa maison - et sur les seuls êtres qui peuvent subir cela - les femmes.
Avec puissance, Makavejev explore, dans de nombreux contextes différents, à quel point ces personnages (qui nous ressemble, à certains égards) ont peu de contrôle sur leur vie, à quel point elles sont toutes à la merci de forces extérieures qui les asservissent, psychologiquement comme sexuellement.
Avant-goût de la dichotomie entre radicalisme et épanouissement personnel que le cinéaste développera plus tard, L'homme n'est pas un oiseau incarne une satire brillante et désenchantée portée par l'engagement sincère de Makavejev à capter la réalité prosaïque d'une nation dominée et asphyxiée.
Jonathan Chevrier
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