[SƎANCES FANTASTIQUES] #66. Halloween

Par Fuckcinephiles

Copyright Compass International Pictures


Parce que les (géniales) sections #TouchePasAMes80s et #TouchePasNonPlusAMes90s, sont un peu trop restreintes pour laisser exploser notre amour du cinéma de genre, la Fucking Team se lance dans une nouvelle aventure : #SectionsFantastiques, ou l'on pourra autant traiter des chefs-d'œuvres de la Hammer que des pépites du cinéma bis transalpin, en passant par les slashers des 70's/80's ; mais surtout montrer un brin la richesse des cinémas fantastique et horrifique aussi abondant qu'ils sont passionnant à décortiquer. Bref, veillez à ce que les lumières soient éteintes, qu'un monstre soit bien caché sous vos fauteuils/lits et laissez-vous embarquer par la lecture nos billets !


#66. Halloween - La Nuit des Masques de John Carpenter (1978)
Ce n'est pas forcément évident d'écrire sur une oeuvre qui a marqué aussi profondément un genre, que fasciné/traumatisé des pluies de générations à travers les décennies, et encore moins si l'on voue un culte sans borne à son formidable auteur.
D'autant que tout a déjà été dit sur Halloween - La Nuit des Masques de John Carpenter, choc horrifique sorti de nulle part, mais que personne n'oubliera jamais; un véritable coup de poker produit pour une bouchée de pain comparé aux grosses cylindrées actuelles - 300 000 $ -, qui allait être victime de son succès en devenant le mètre-étalon d'une franchise alternant (très rarement) entre le bon, le gentiment défendable et le médiocre.

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Chef-d'oeuvre indiscuté et indiscutable, incarnant un vent de fraîcheur incroyable pour son époque (aujourd'hui, il n'y a rien de plus banal qu'une ribambelle de jeunots trucidés par un maniaque masqué et increvable), le film tranchait avec une épouvante tapageuse pour représenter à l'écran une personnification implacable et sans conscience du sempiternel croquemitaine.
Vissé sur une petite bourgade américaine de classe moyenne dans tout ce quelle a de plus banale, Carpenter y fait naître l'horreur la plus pure parce qu'aussi intime que totalement imprévisible : le visage du mal absolu juxtaposé sur celui d'un enfant de six ans, trucidant une grande soeur dont il ne semble pas forcément apprécier les ébats adolescents dictés aux hormones (par amour, par jalousie ou par pure méchanceté primaire ?).
Trucidant son aînée avec un couteau de cuisine presque aussi grand que son avant-bras, Michael Myers brise son insouciance en embrassant son côté obscur à un âge où l'on ne devrait même pas en avoir conscience.
Quinze ans plus tard, devenu une force de la nature affublée d'un masque blanc qui ne fait que renforcer sa froideur, il est de retour à Haddonfield, bien décidé à fêter la nuit d'Halloween de la plus brutale et sanglante des manières (mais surtout en s'en prenant à une jeunesse tout aussi dévergondée que sa défunte soeur), alors que son psychiatre le docteur Samuel Loomis, tente de le retrouver et sait pertinemment de quoi il est capable...

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Donnant corps à son cauchemar avec simplicité (une intrigue allant strictement à l'essentiel), tout en jouant sur une tension épurée à l'extrême et de plus en plus anxiogène, boostée par une musique aussi répétitive qu'obsédante (signée Carpenter himself, dans son meilleur effort avec New York 1997); la réussite d'Halloween n'est pas tant le fruit d'une mise en scène incroyablement maîtrisé (de la précision des cadrages - emploi grandiose du Scope -, à la fluidité folle des travellings au steadicam), qu'en la captation d'une peur universelle : l'insécurité d'une nation américaine paranoïaque et à la tranquillité fragile, elle-même bâtie dans le sang et la violence, et constamment sur le fil (et encore plus à une époque post-Vietnam profondément pessimiste).
Conte urbain désenchanté et terrifiant, évitant scrupuleusement de tomber dans le grand-guignolesque outrancier, même dans le jeu solide de ses interprètes (une Jamie Lee Curtis convaincante rend merveilleusement la pareille à un Donald Plaisance magnétique), le film incarne la pureté du slasher à son paroxysme, tellement que quarante-trois ans plus tard, il n'a strictement rien perdu de sa superbe.
Jonathan Chevrier