Milan calibre 9

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à Éléphant Films pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Milan calibre 9 » de Fernando Di Leo.

« Fais aux autres ce que tu ne voudrais pas que les autres te fassent. Mais fais-le le premier ! »

Après avoir purgé une peine de quatre ans de prison, Ugo Piazza est relâché pour bonne conduite. Son ancien complice, Rocco, un dangereux homme de main au service de « l’Américain », lui rafraîchit la mémoire : une somme importante a été dérobée avant son incarcération et Ugo était le dernier à avoir accès au magot…

« Je n’ai jamais refusé d’aider un copain. Mais ne me demande pas d’enfreindre les règles car ce n’est pas régulier. »

Essentiellement célébré par la cinéphilie pour la période du néo-réalisme puis pour ses grandes comédies sociales, le cinéma italien de l’après-guerre fut aussi marqué par l’avènement d’un prolifique et lucratif cinéma de genre. Avec un léger décalage, les productions locales prolongeront alors la flamme des genres alors sur le déclin à Hollywood : péplum, western, épouvante ou film noir trouveront ainsi un second souffle en Italie. Ce cinéma d’exploitation fera ainsi émerger toute une génération de jeunes cinéastes particulièrement créatifs, de Sergio Leone à Sergio Corbucci en passant Mario Bava ou Dario Argento. Moi connu du grand public (mais admiré par Quentin Tarantino), Fernando Di Leo demeure néanmoins comme un grande figure du western italien, genre auquel il contribue largement via son talent de scénariste (il participe notamment à l’écriture de « Pour une poignée de dollars » et « Pour quelques dollars de plus » de Leone, « Django » de Corbucci ou encore « Un pistolet pour Ringo » de Tassari). Passant derrière la caméra à la fin des années 60, il s’illustrera surtout au cours de la décennie suivante dans le genre du polizziotesco, ce néo-polar italien imprégné du contexte des années de plombs (mafia, terrorisme, corruption, police dépassée). Avec en guise de sommet sa « trilogie du milieu », composée de « Milan calibre 9 » (1972), « Passeport pour deux tueurs » (1972) et « Le boss » (1973).

« Tant qu’il croit que j’ai l’argent j’aurai la vie sauve »

Premier volet de la trilogie, « Milan calibre 9 » surprend d’abord par son cadre milanais, très inhabituel pour un film de mafia, genre qui privilégie en général Naples ou Palerme. Après une séquence d’introduction électrisante, aussi habile que violente, le réalisateur nous donne le ton. « Milan calibre 9 » sera ainsi avant tout centré sur la mystérieuse disparition d’un magot appartenant à la mafia locale. Ou plutôt sur le principal suspect de ce vol, un homme de main tout juste sorti de prison qui se retrouve à la fois traqué par la police et par ses anciens employeurs, tous bien décidés à récupérer l’argent. Un thème - la trahison - et surtout l’idée que gangsters et policiers constituent un même monde obéissant aux mêmes codes qui en font un film melvillien en diable (comment ne pas penser ici au « Doulos » ou au « Deuxième souffle » ?). A ceci près que Di Leo substitue à l’honneur et au romantisme viril très présents chez Melville une dimension beaucoup plus machiavélique. On suit ainsi avec une profonde délectation cette sanglante partie de poker-menteur dans laquelle les bluffeurs ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Ce qui ôte au final toute forme de romantisme au gangstérisme et le ramène au fond à sa substantifique moelle, à savoir l'individualisme (la solitude?), l'immoralité et la cupidité. Maintenant le suspense jusqu’au bout, le film vaut autant pour son scénario électrique et délicieusement retors que pour la qualité de son interprétation, avec en tête l’imperturbable Gastone Moshin et son pendant explosif Mario Adolf. Un must absolu du genre, qu’on ne saurait trop conseiller de (re)découvrir.

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Le blu-ray : Le film est présenté en version restaurée dans un nouveau Master Haute-Définition et proposé en version originale italienne (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’une présentation par René Marx (23 min.), Milan Calibre 9 : un documentaire (2004, 30 min., VOST), « Fernando DI Leo - La morale du genre » (2004, 40 min., VOST), « Giorgio Scerbanenco, maître littéraire du récit policier » (2004, 26 min., VOST), une Galerie photos commentée par Gastone Moshin (2004, 4 min.) et une Bande-annonce d’époque.

Édité par Elephant Films, « Milan calibre 9 » est disponible en blu-ray ainsi qu’en DVD depuis le 1er juin 2021. Il est également disponible au sein du coffret (blu-ray ou DVD) de la « Trilogie italienne » chez le même éditeur.

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