Pour Sacha

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à ESC Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Pour Sacha » d’Alexandre Arcady.

« Au kibboutz on ne rêve pas de refaire le monde : on vit son idéal »

En 1967, Laura, une jeune violoniste et Sacha, son ancien prof de philo, partent dans le tout jeune état d’Israël vivre dans un Kibboutz. Trois amis parisiens, amoureux de Laura, viennent les rejoindre. Tous vivent là au rythme des travaux agricoles et des menaces de conflit. Jusqu’à ce que la guerre des Six Jours n’éclate brutalement…

« Vivre ici, ça veut dire se défendre. Et pour ça, il faut apprendre à se battre »

Pour comprendre le cinéma d’Alexandre Arcady, il faut d’abord comprendre l’homme, son héritage personnel et son rapport à l’Histoire. Né au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale en Algérie française au sein d’une famille juive, d’un père ayant fuit la Hongrie et d’une mère algérienne, Arcady fera l’expérience, très jeune, du racisme, de l’antisémitisme et du déracinement. Autant de souffrances dont il portera le poids et qui le pousseront, très tôt, à s’interroger sur sa place dans la société et sur son identité. Avec, toujours, la question centrale de la judéité et son rapport complexe à la communauté musulmane. Des thématiques que l’on retrouve déjà au cœur de ses premiers films (« Le grand pardon », « Le grand carnaval »,  « L’union sacrée »). Tourné en 1981, juste après le polar « L’union sacrée », « Pour Sacha » est un film un peu à part dans la filmographie d’Arcady.

« Quand on aime il faut partir »

D’une part parce que c’est sans doute l’un de ses films les plus personnels en ce qu’il puise dans ses propres souvenirs de son expérience du kibboutz en 1966-1967. D’autre part parce que c’est sans doute le film dans lequel il aborde le plus frontalement la question rapport à Israël et de la cohabitation entre communautés juives et arabes. « Pour Sacha » est ainsi le récit d’un immense espoir pour les juifs de l’après-guerre, rescapés de la Shoah ou plus simplement contraints à l’exil, qui ont vu dans l’État d’Israël et plus encore dans le mode de vie du kibboutz la possibilité de bâtir un modèle de société simple et juste, basé sur le collectif, le travail et la sécurité. Mais le film est aussi le récit d’une triste utopie, dont la Guerre des six jours constitue le point de bascule instaurant injustices et de rapports de force (expulsion des arabes de leurs terres, appropriation unilatérale de certains territoires) qui attiseront les rancœurs et rendront toute paix impossible. Au milieu, l’histoire d’amour complexe entre Sacha et la belle Laura parait plus décorative qu’autre chose et semble servir, surtout, à illustrer les dilemmes moraux de la communauté juive occidentale, qui regarde alors le jeune État hébreu entre méfiance et espoir. Reste que derrière ses bonnes intentions, le film demeure très maladroit dans son discours et surtout très ambigu, notamment dans sa vision de la Guerre des six jours, présentée du point de vue exclusif des seuls israéliens. Forcément parcellaire et tout de même un peu déroutant.  

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Le blu-ray : Le film est présenté dans un nouveau Master restauré, en version originale française (DTS-HD) et sans sous-titrage.

Côté bonus, cette riche édition propose des entretiens avec Alexandra Arcady (2021) et avec Philippe Sarde (2021), Images retrouvées : making of tournage, « On en parle » : entretien avec l’équipe du film, « Et la musique » : entretien d’époque avec Ilan Zaoui, Alexandre Arcady retourne sur le décor, Zapping TV et une Bande-annonce.

Édité par ESC Éditions, « Pour Sacha » est disponible en combo blu-ray + DVD depuis le 16 juin 2021.

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