Playlist (2021) de Nine Antico

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Nina Antico, auteur-dessinatrice de bande-dessinée comme "Le Goût du Paradis" (2008) et "Il était une fois Arthur" (2019), déjà réalisatrice d'un court-métrage avec "Tonite" (2013) adapté d'une de ses oeuvres, a été contacté par Thomas Verhaeghe, le producteur de films comme "Brodeuses" (2004) de Eléonore Faucher, "La Stratégie de la Poussette" (2013) de Clément Michel ou plus récemment (2019) de Quentin Dupieux. Le producteur lui a proposé d'adapter sa bande-dessinée "Girls don't Cry" (2010) mais Nina Antico était plus intéressée de se lancer dans un projet original : "J'adorerais que quelqu'un s'empare de mes livres, mais ce que je fais en BD, c'est pour la BD ! J'avais aussi envie de personnages plus proches de la trentaine que dans "Girls don't Cry". Ainsi elle a écrit un scénario original inspiré de sa vie mais elle refuse l'étiquette de "autobiographique" : "Le parcours de Sophie ressemble par moments à ce que j'ai vécu, mais il y a des péripéties totalement inventées et je ne veux pas démêler le vrai du faux." La réalisatrice-scénariste co-signe finalement le scénario en collaboration avec Marc Syrigas qui a signé les scénarios de films connus comme "Les Apprentis" (1995) de Pierre Salvadori, "La Nouvelle Eve" (1998) de Catherine Corsini, "Les Beaux Gosses" (2009) de Riad Sattouf ou plus récemment "La Mécanique de l'Ombre" (2019) de Thomas Kruithof...

Sophie est une jeune femme qui rêverait de devenir artiste, mais il aurait été sans doute plus facile de devenir dessinatrice en passant part une école d'art. Malgré tout, elle a quitté sa banlieue populaire pour Paris où elle décroche un CDD dans une maison d'édition de BD réputée. Mais il n'y a pas que le travail, Sophie est aussi un peu perdue dans sa vie sentimentale et se pose mille questions sur l'amour et le couple... Sophie est incarnée par Sara Forestier vue dans "Roubaix, une Lumière" (2019) de Arnaud Desplechin et "Filles de Joie (2020) de Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich. Une amie est jouée par Laetitia Dosch vue entre autres dans "Jeune Femme" (2017) de Léonor Serraille et "Les Apparences" (2020) de Marc Fitoussi. Elle croise la route de Pierre Lottin connu comme un fils dans la saga "Les Tuche" (2011-2021) de Olivier Baroux, Jackie Berroyer vu dans "Adieu les Cons" (2020) de Albert Dupontel et "Le Sens de la Famille" (2021) de Jean-Patrick Benes, Grégoire Colin vu dans (2019) de Alice Winocour et "L'Etat Sauvage" (2020) de David Perrault , Marc Fraize aperçu dans (2018) de Quentin Dupieux et "Antoinette dans les Cévennes" (2020) de Caroline Vignal. Citons deux jeunes acteurs qui apparaissent tous deux dans deux autres films en salles ou bientôt sortis, Inas Chanti dans "Vaurien" (2021) de Peter Dourountzis et Andranic Manet dans "Envole-Moi" (2021) de Christophe Barratier, puis citons la voix Off du narrateur qui est celle de Bertrand Belin, chanteur dont on peut citer une des rares apparitions au cinéma dans "Ma Vie avec James Dean" (2017) de Dominique Choisy... Dans les premiers instants du film on remarque surtout deux choses, le Noir et Blanc forcément et la voix Off d'un narrateur. Le NB d'abord parce que Nina Antico a été séduite par des films comme (2013) de Noah Baumbach, "Tu Dors Nicole" (2014) de Stephane Lafleur et les films de Woody Allen. Mais cela semble aussi une évidence puisqu'elle a signé plusieurs de ses BD en Noir et Blanc, qu'elle justifie par la volonté de rendre son histoire intemporelle. La voix Off du narrateur est plus discutable, malgré sa voix grave est du velours pour les oreilles mais le contenu est très superficiel, pour ne pas dire philosophiquement inutile.

Mais on suit avec empathie cette jeune femme autodidacte qui tente de faire sa place dans le milieu très fermé de la BD. Idem dans le récit deux sujets semblent se croiser, le milieu même de la BD et la dimension féministe. En ce qui concerne le monde de la BD il apparaît que Nina Antico manque singulièrement d'objectivité : "La BD, c'est le vilain petit canard : en soirée, si je discute avec des gens hyper cultivés, quand je dis que je fais de la BD, après le "C'est sympa, ça, la BD !", le gens avouent souvent qu'ils n'en lisent pas. Pourtant, la BD est une forme d'écriture qui traverse tous les genres. Elle est aussi vaste que le cinéma : il y en a pour tous les goûts. Bien qu'elle soit plus médiatisée qu'avant, elle reste encore rattachée à quelque chose de l'enfance, et dévalorisée."... Elle flagelle le 9ème Art alors qu'il n'a jamais été aussi florissant à tous points de vue et on ne peut que se porter en faux sur son point de vue. Le féminisme est présent, notamment en abordant des sujets très intimes mais tout en légèreté sans morale facile, et elle n'assome pas les hommes avec de sempiternels mises en situation particulièrement dirigées. Non, la cinéaste reste avant tout proche de ses personnages, de Sophie/Forestier évidemment mais pas que. En prime Sara Forestier est charmante et lunaire, Leatitia Dosch n'est pas en reste en meilleure amie attachante. Si l'histoire paraît parfois un peu banal, voir fait du sur place surtout dans sa seconde partie, on apprécie la parallèle entre musique et séquence avec une B.O. inspirée, mais aussi des dialogues travaillés qui ne manquent pas de répliques savoureuses qui oscillent toujours entre émotion et drôlerie. En conclusion une chronique douce amère sur un bout de femme qui se cherche et plus encore que le travail et l'amour, qui cherche surtout le bonheur. Un très joli film avec une actrice en symbiose parfaite avec son personnage.

Note :