[Venise 2020] “Laila in Haifa” d’Amos Gitaï

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De quoi ça parle?

Euh… Si vous le savez, merci de nous le dire…
Il s’agit essentiellement de gens qui se croisent le temps d’une soirée dans la galerie d’art/bar/restaurant/discothèque que Laila tient au coeur de Haifa.
C’est apparemment le vernissage de l’exposition d’un photographe Israélien politiquement engagé, Gil. Celui-ci est aussi l’amant de Laila et l’objet de l’affection de la barmaid, Kahwla, qui tente d’échapper aux pressions de son cuisinier de mari, qui veut à tout prix lui faire un enfant.
La soeur de Gil, venue pour l’accompagner, délaisse vite la galerie pour le bar, où elle tente d’oublier ses déboires conjugaux en flirtant avec d’autres personnes. Kamal, le mari de Laila, un Palestinien plus âgé qu’elle, est venu à reculons à cette inauguration. Il désapprouve que son épouse promeuve un artiste Israélien. Une des employées du bar, militante pro-Palestinienne radicale, tente d’en profiter en essayant de lui extorquer une belle donation à leur cause commune…
On croise aussi un travesti, un couple gay, un jeune rappeur Arabe et sa rencontre Tinder d’un soir, sorte de cougar Israélienne, et plein de personnes censées représenter la diversité de la population d’Haifa, cohabitant pacifiquement malgré leurs désaccords et leurs différences…

Pourquoi on n’aime pas?

Parce qu’il s’agit d’une sorte de film-choral hautement bordélique, truffé de personnages mal dégrossis et caricaturaux. Mais surtout qu’on ne comprend pas vraiment quel message le cinéaste cherche à faire passer. S’agit-il juste d’une ode à la différence et au dialogue entre les êtres? Si oui, c’est confondant de naïveté ou trop fabriqué pour être sincère. Si non, quel est le message exactement? Eventuellement, en essayant de démêler ce salmigondis d’intrigues, on peut y voir une réflexion sur la place des femmes dans une société qui reste encore ancrée dans les traditions patriarcales, aussi bien côté Palestinien qu’Israélien, avec en point d’orgue le monologue de Kahwla, dans la dernière partie du film. Mais rien n’est moins sûr, puisque le film passe continuellement d’un personnage à un autre, sans qu’on ait le temps de s’y attacher.

C’est d’autant plus dommage que la mise en scène est extrêmement soignée. Le cinéaste multiplie les plans-séquences, les mouvements de caméra virevoltants, sait s’arrêter quand il le faut, s’approcher quand cela est nécessaire. C’est une réalisation brillante, virtuose, mais qui se révèle totalement gratuite et artificielle, ne servant aucun propos, aucune idée-force.
Alors, malgré ce brio technique, on finit par s’ennuyer ferme et désintéresser de cette accumulation de saynètes bavardes dont la seule utilité est de promouvoir le Club Fattoush, une discothèque existant bel et bien à Haifa et brassant une population aussi cosmopolite que celle du récit.

Prix potentiels?

Eventuellement un Lion d’argent de la mise en scène, pour la beauté des plans-séquences d’Amos Gitaï, mais d’autres postulants ont eux aussi brillé, et leurs films sont autrement plus profonds et aboutis que celui du cinéaste Israélien…

Autres avis sur le film

“Quelle purge d’une prétention sans nom. Gitaï vieillit mal. On l’a complètement perdu cette fois!”
(Un spectateur mécontent)

”The new Gitai is a bit rambling but it sucked me in. Highly self-aware. And it has a great line: to let things happen is more dangerous than to make things happen. I don’t know if it’s true but it sounds good.”
(@Rotovisor sur Twitter)

”There is none of the wildfire crackle of actual living conversation. You don’t even get the sense that the people are listening to each other. And for a film about socio-political dialogue, that’s a real problem.”
(Wendy Ide – Screen Daily)