Je voudrais que Quelqu'un m'attende Quelque part (2020) de Arnaud Viard

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Après "Clara et Moi" (2004) et "Arnaud fait son 2ème Film" (2015), Arnaud Viard (aucun lien avec Karine !) surtout vu comme acteur notamment dans "Grâce à Dieu" (2018) de François Ozon, revient pour un troisème long métrage en tant que réalisateur-scénariste en adaptant le recueil de nouvelles éponyme (1999) de Anna Gavalda. La cinéaste aime ce recueil depuis sa sortie, et après avoir écrit à l'auteur il a pu la rencontrer quelques années après ce qui a permis de se lancer dans le projet d'adaptation dès 2010. Mais malgré le succès énorme du livre (près de 2 millions d'exemplaires vendus) le financement a été laborieux. Arnaud Viard a co-signé le scénario avec plusieurs confrères, Thomas Lilti spécialiste du monde médical qui a réalisé et signé notamment "Hippocrate" (2014) et "Médecin de Campagne" (2016), Emmanuel Courcol fidèle collaborateur de Philippe Lioret notamment sur "Mademoiselle" (2001) et "L'Equipier" (2004), puis Vincent Dietschy auquel on doit "Didine" (2008). Les scénaristes se sont appuyés particulièrement sur la nouvelle "Clic Clac" comme fil conducteur du récit...

Aurore fête ses 70 ans auprès d'amis et surtout de ses enfants : Jean-Pierre père et négociant en vins, Juliette prof de français qui rêve d'être éditée, Mathieu célibataire endurci à l'insu de son plein gré et la cadette Margaux, photographe marginale. Jean-Pierre a endossé le rôle de chef de famille depuis le décès du père mais si chacun a ses petits soucis Jean-Pierre a aussi les siens... La maman et grand-mère est interprétée par Aurore Clément révélée par "Lacombe Lucien" (1974) de Louis Malle et dont le dernier rôle est la voix de Oracle dans le film d'animation "L'Île aux Chiens" (2018) de Wes Anderson. Les enfants sont incarnés respectivement par Jean-Paul Rouve vu dernièrement dans "Donne-Moi des Ailes" (2019) de Nicolas Vanier, Alice Taglioni vue dernièrement dans "Andy" (2019) de Julien Weill et qui retrouve Jean-Paul Rouve après son film "Sans Arme, Ni Haine, Ni Violence" (2008), Benjamin Lavernhe vu dans (2019) de Lou Jeunet et "Mon Inconnue" (2019) de Hugo Gélin, puis Camille Rowe qui est en pleine ascension après seulement trois films et révélée surtout par (2016) de Frédéric Beigbeder. Dans des rôles plus secondaires, Elsa Zylbertsein vue récemment dans (2019) de Marc Fitoussi et "Anya" (2020) de Ben Cookson, et Eriq Ebouaney dans un savoureux contre-emploi après entre autre "La Terre et le Sang" (2020) de Julien Leclercq, sans compter un caméo du réalisateur Arnaud Viard dans le rôle du metteur en scène de Héléna/Zyberstein... D'abord il est intéressant de comprendre l'objectif du réalisateur-scénariste Arnaud Viard, à savoir signer une chronique familiale à partir de plusieurs nouvelles normalement indépendante les unes des autres, tout en s'inspirant d'un maître du mélodrame en voulant "se démarquer de l'esthétique du téléfilm plutôt naturaliste en assumant le mélodrame avec des films de Douglas Sirk comme référence"... Rien que ça ! Mais on constate bien l'incohérence des idées et une ambition qui ne convient que très peu à ce genre de film, comédie dramatique douce-amère dont les salles obscures sont envahies.

En effet, ce genre d'histoire a souvent le gros avantage de permettre au spectateur de s'identifier aisément aux personnages. Mais on remarque surtout l'écueil habituel et récurrent de l'intelligentsia cinéma française dans ses personnages, à savoir qu'il s'agit encore et toujours d'une famille bourgeoise qui plombe justement un peu l'identification tant désirée pour la majorité du grand public. Le panel représentatif familial est bel et bien là, l'aîné au statut social qui le place en patriarche mais qui a ses blessures secrètes, l'intello pas si accomplie que ça, le trentenaire amoureux maladroit et la cadette rebelle anar qui veut à la fois le beurre et l'argent du beurre... etc... Outre cet embourgeoisement omniprésent qui freine déjà notre intérêt, les histoires et les desideratas des uns et des autres sont déjà vus et abordés dans tant de films qu'on n'est jamais surpris ou touché. Le rythme est plutôt sage, que ce soit dans des dialogues basiques ou des séquences lambdas on finit par regarder le film d'un oeil ennuyé. Même lors du drame attendu l'émotion est superficielle car tout reste beaucoup trop académique. Le public ne s'y trompera d'ailleurs pas, malgré le succès du livre le film fera près de 50% de ses entrées France en première semaine avant que le bouche à oreille creuse la trou où le film risque à jamais de se faire oublier. Pour être franc, ce n'est pas désagréable, ça se regarde mais comme un téléfilm de luxe qui n'a pas grand chose à dire.

Note :