Tokyo Joe

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à Sidonis Calysta pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le DVD du film « Tokyo Joe » de Stuart Heisler.

« Entrer dans Tokyo est devenu plus difficile que de sortir de Sing-Sing »

Joe Barrett revient à Tokyo après la guerre et retrouve la femme qu’il aimait et qu’il croyait morte. Pour donner un nom à l’enfant qu’elle attendait, Trina s’est mariée avec Mark Landis. Joe souhaite récupérer Trina. Celle-ci lui révèle que sa fille Anya est sa propre fille. Joe va alors accepter de travailler pour le compte du baron Kimura, un baron de la pègre locale…

« Un japonais ne saurait donner d’ordre à un américain »

Jusqu’alors acteur de second plan, Humphrey Bogart voit sa carrière décoller avec l’avènement du film noir, genre dont il devient rapidement l’icône absolue. Mais en marge de ses rôles de détective privé en imperméable, il fut aussi à partir du mitan des années 40 l’archétype même de l’aventurier américain exilé à l’autre bout du monde, se montrant à la fois impassible, roublard, blasé et cynique. C’était du moins ce qu’il tentait de faire croire dans le mythique « Casablanca » (1943) de Michael Curtiz où son insolence ne servait en fait qu’à masquer son romantisme. Fort du succès du film, son rôle sera ainsi décliné ad nauseam dans une série de films noirs plus ou moins exotiques. Il sera ainsi coup sur coup contrebandier en Syrie sous mandat Français (« Sirocco », Bernhardt, 1951),  navigateur en Afrique (« L’odyssée de l’African Queen », Huston, 1951) ou encore aventurier ruiné en Italie (« Plus fort que le diable », Huston, 1953).

« Tu t’es mis en danger pour m’aider... Sauve-toi tant que tu le peux encore »

Plus exotique encore, avec « Tokyo Joe » (1949), il se retrouve cette fois à lutter dans le Japon en ruines de l’après-guerre pour retrouver sa place et le lucratif petit business qu’il avait monté sur place avant la guerre. Mais entre la réapparition de son amour de jeunesse qu’il croyait disparu, les tracasseries administratives que lui fait subir de l’administration américaine et l’occupation du terrain par une maffia locale bien peu encline à lui rendre sa place, notre héros devra manœuvrer serré pour atteindre son but… Plus connu pour ses westerns (« Le grand Bill », « Dallas ville frontière », « Collines brûlantes »…) que pour ses films noirs (on lui doit néanmoins l’excellent « La clé de verre » avec Alan Ladd en 1942), le réalisateur Stuart Heisler signe ici un ersatz de « Casablanca » (pour ce qui est des retrouvailles impromptues de deux anciens amants malmenés par les aléas de l’Histoire) dans lequel Bogart se montrera finalement plus brutal que romantique. La faute à un scénario mal fagoté dont les enjeux dramatiques sont parfois trop peu lisibles et dont les ressorts peinent à fonctionner. A l’image de la relation entre Bogart et Florence Marly, trop peu crédible et qui ne fonctionne jamais vraiment. On se consolera avec les plans extérieurs réellement tournés (sans Bogart) dans Tokyo, qui constituent d’autant plus des archives intéressantes qu’il s’agit du premier film occidental à y poser sa caméra après-guerre. Un Bogart somme toute assez mineur.

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Le DVD : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition, en version originale américaine (1.0) ainsi qu’en version française (1.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné de deux présentations respectivement signées par Bertrand Tavernier (33 min.) et François Guérif (7 min.).

Edité par Sidonis Calysta, « Tokyo Joe » est disponible en DVD ainsi qu’en blu-ray depuis le 16 juin 2020.

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