[CRITIQUE] : En Avant

Par Fuckcinephiles
 

Réalisateur : Dan Scanlon

Acteurs : avec les voix de Tom Holland, Chris Pratt, Julia Louis-Dreyfus, Octavia Spencer, Lena Waithe,...
Distributeur : The Walt Disney Company France
Budget : -
Genre : Animation, Aventure, Fantastique, Famille.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h40min.

Synopsis :

Dans la banlieue d'un univers imaginaire, deux frères elfes se lancent dans une quête extraordinaire pour découvrir s'il reste encore un peu de magie dans le monde.

Critique :

Optant pour un retour aux sources du conte, en embrassant la part populaire de ce dernier sans forcément tomber dans le piège facile du formatage infantile ou cynique, #EnAvant vise juste et incarne une épopée épique et drôle aussi émouvante et délurée qu'attachante. Du bon Pixar pic.twitter.com/3ON0m0R3Ke— FuckingCinephiles (@FuckCinephiles) March 1, 2020

À une époque pas si lontaine, ou la firme n'était pas encore pervertie par une petite souris friquée aux grandes oreilles et ne rythmait pas son catalogue uniquement ou presque, sur une franchisation à outrance de ses productions (seul Toy Story avait cet honneur, et chaque suite était joliment bien pensée); nous étions tous certains de débarquer dans une salle obscure, prêt à en prendre plein les mirettes puisque c'était bien ça Pixar, à l'origine : la faculté d'être un puits d'histoire originales et follement inventives, parlant aux petits comme aux plus grands.

Sauf que depuis qu'elle est devenue une vitrine luxueuse de l'omnipotence de Disney à Hollywood, la firme semble avoir perdu une bonne parcelle de sa magie si identifiable qui la faisait survoler la concurrence, nous la rappelant que sporadiquement, entre deux, trois suites pas toujours défendables.
Passé Vice-Versa mais surtout Coco en 2017, Pixar semble finalement se poser les bonnes questions en 2020,  avec En Avant et Soul, tant le premier apporte une réponse hautement satisfaisante à l'idée de savoir si oui ou non, elle avait encore du mojo en elle.

Optant pour un retour aux sources des codes du conte, en embrassant la part populaire de ce dernier avec une pincée d'ironie et sans forcément tomber dans le piège facile du formatage infantile ou cynique (coucou Shrek), le film de Dan Scanlon multiplie les références aux classiques du genre (la légende du Roi Arthur, Le Seigneur des Anneaux,...) tout en catapultant son auditoire dans un univers familier, sorte de Terre du Milieu géniale ou toute la singularité et la magie se voient... banalisées, voire totalement fanées par la normalité (cf les pauvres licornes).

Adepte de ses voyages initiatiques aussi bien intimes qu'universelles, la firme s'attache une nouvelle fois à unir une aventure épique à des émotions authentiques et sincères, autour de la quête de deux frangins, sorte de frérots Winchester PG-13 : le gentiment lent Barley (sosie elfique de Jack Black) et le plus jeune et foufou Ian, qui le jour du seizième anniversaire du second, use d'un cadeau étrange - un sort - pour faire leur défunt père pendant une journée (il est mort avanr la naissance de Ian).
Évidemment, et comme la bande annonce l'a subtilement montré (non), rien ne va se passer comme prévu...
Trouvant la force de faire rire avec un running gag à la base rebutant (la moitié inférieure d'un père, littéralement), tout autant qu'à passionner son spectateur dans une sorte de mélange habile entre le buddy movie fantastico-déjanté, le drama familial (autour des relations fraternelles mais aussi filiales), l'héroïc fantasy et le conte au masculin (ou les personnages se découvrent aussi bien personnellement que mutuellement, dévoilant sans phare leurs forces et leurs vulnérabilités), Onward ne réinvente pas la mécanique Pixar, mais il renoue avec la délicatesse et la sincérité des oeuvres originales de la firme, traitant spécifiquement ses concepts sans la moindre fioriture narrative ni même le moindre racolage émotionnel putassier.

Mieux, sans trop crier gare (mais avec certes, moins de pertinence que Pete Docter ou Lee Unkrich), Scanlon creuse, avec une implication personnelle palpable (il a lui même perdu son père à l'âge d'un an), un petit peu plus le sillon de l'étude fine, dénuée de tout cliché et attendrissante - et même parfois assez cruelle - de l'enfance chez Pixar, à la sauce adolescente, ou comment deux jeunes hommes se sont forgés sans l'image d'un père qui leur manque terriblement.

Grisant à tous les niveaux, rempli d'humour et de bons sentiments, En Avant est une proposition de cinéma revenant à l'essence même de ce que la firme à la lampe inspirait durant ses folles premières années : une faiseuse à rêve créatrice de péloches aussi inspirées et uniques qu'incarnant de véritables défis sur grand écran, aussi fou que définitivement remarquables, jouant avec nos émotions comme peu auront été capables de le faire sur les deux dernières décennies.
Vivement Soul cet été, vraiment.


Jonathan Chevrier