[TOUCHE PAS À MES 80ϟs] : #102. The Serpent and The Rainbow

[TOUCHE PAS À MES 80ϟs] : #102. The Serpent and The Rainbow

Copyright Wild Side


Nous sommes tous un peu nostalgique de ce que l'on considère, parfois à raison, comme l'une des plus plaisantes époques de l'industrie cinématographique : le cinéma béni des 80's, avec ses petits bijoux, ses séries B burnées et ses savoureux (si...) nanars.
Une époque de tous les possibles où les héros étaient des humains qui ne se balladaient pas tous en collants, qui ne réalisaient pas leurs prouesses à coups d'effets spéciaux et de fonds verts, une époque où les petits studios (Cannon ❤) venaient jouer dans la même cour que les grosses majors légendaires, où les enfants et l'imaginaire avaient leurs mots à dire,...
Bref, les 80's c'était bien, voilà pourquoi on se fait le petit plaisir de créer une section où l'on ne parle QUE de ça et ce, sans la moindre modération.
Alors attachez bien vos ceintures, mettez votre overboard dans le coffre, votre fouet d'Indiana Jones et la carte au trésor de Willy Le Borgne sur le siège arrière : on se replonge illico dans les années 80 !

[TOUCHE PAS À MES 80ϟs] : #102. The Serpent and The Rainbow
#102. L'Emprise des Ténèbres de Wes Craven (1988)

Si feu Wes Craven avait brillamment su au début des 80's, donner un nom et un visage (brûlé) à nos cauchemars les plus intimes, il aura également su, au crépuscule de cette même décennie, mettre en images une horreur cette fois bien plus réelle, dans ce qui reste sans doute son plus grand film - avec Scream - : L'Emprise des Ténèbres/The Serpent and The Rainbow (meilleur titre en V.O), adaptation du roman éponyme de l'éthnologie et botaniste Wade Davis (qui y relatait son vécu à Haïti, ou il fut envoyé par une grosse firme pharmaceutique pour étudier sur les fameuses potions utilisées par les sorciers locaux, pour transformer les gens en zombies), offrant une plongée aussi envoûtante que sans concession au coeur du mystère vaudou, à l'instar des tout aussi brillant Angel Heart d'Alan Parker et Les Envoûtés de John Schlesinger.

Un temps promis au duo Peter Weir/Mel Gibson (qui se serait reformé peu de temps après le formidable L'Année de tous les Dangers), avant d'échouer à celui tout aussi alléchant Wes Craven/Bill Pullman, le film incarne à la fois une pure odyssée politico-historique (avec une sacrée touche de romance), qu'un morceau d'épouvante pure, à la lisière du documentaire et filmé sur le terrain, ce qui lui vaudra quelques anecdotes de plateaux plus qu'étranges (maladies diverses, hallucinations,...), mais surtout un tournage méchamment éprouvant, rendant de facto encore plus palpable le sentiment d'urgence et de tension qui l'habite.

[TOUCHE PAS À MES 80ϟs] : #102. The Serpent and The Rainbow

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Articulé autour du voyage en Haïti d'un anthropologue (comme Wade Davis dans la réalité) cherchant à récupérer - pour mieux la commercialiser - une poudre qui plonge des victimes dans un sommeil proche de la mort pour mieux faire d'ux des zombies, le métrage se transforme peu à peu en une quête surnaturelle au cours de laquelle le héros (Bill Pullman, parfait) est confronté à la face sombre de l'ïle : la magie noire et ses adeptes, les terrifiants Tontons Macoutes agissant à la slde d'un chef de section redoutable, l'infâme Peyraud (Zakes Mokae, dont la partition hante encore longtemps après vision).

Enlacé dans une épouvante viscérale et brute, entre un surnaturel crédible et un univers des songes incroyablement rationnel, ou Craven traite avec respect et sincérité autant son constat d'une politique inhumaine et instable, que le culte vaudou (dès le titre original The Serpent and The Rainbow, qui désigne les deux pierres angulaires des croyances haïtiennes, mais ramène également à la condition humaine); L'Emprise des Ténèbres est une mise en abîme traumatisante et cauchemardesque, un (bad) trip obsédant et magistral au score tribal entêtant (excellente partition de Brad Fiedel) et à la photographie ébouriffante (John Lindley et son usage virtuose de lumières naturelles), sublimant la science de l'horreur aiguisée d'un cinéaste alors au sommet de son art et en complète possession de ses moyens.
Tu nous manque Wes, terriblement même...


Jonathan Chevrier

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