Tamango (1957) de John Berry

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Adapté de la nouvelle éponyme (1829) de Prosper Mérimée, il s'agit de l'histoire tragique d'une révolte d'esclaves alors qu'ils sont sur un négrier en plein océan. Cette co-production franco-italienne est réalisé et co-écrit par John Berry dont le titre le plus connu est "Casbah" (1948) remake musical de "Pépé le Moko" (1937) de Julien Duvivier. Le cinéaste co-signe donc le scénario avec d'autres, le duo Lee Gold-Tamara Hovey qu'il retrouve après son film "Je suis un Sentimental" (1955), puis Georges Neveux connu pour avoir signé les deux adaptations "Knock" (1933) de Roger Goupillières et (1951) de Guy Lefranc et les deux avec Louis Jouvet... Le capitaine Reinker emporte sa cargaison de nouveaux esclaves vers Cuba, ainsi que sa maîtresse Ayché esclave à son service. Mais un esclave, Tamango, organise peu à peu la mutinerie en tentant notamment de rallier Ayché à leur cause...

Co-production oblige, une grande partie du casting est français à l'exception notable des deux rôles principaux. Reinker est incarné par l'acteur allemand Curd Jürgens qui venait de tourner en Italie "Michel Strogoff" (1956) de Carmine Gallone et en France "Les Espions" (1957) de Henri-Georges Clouzot. Ayché est incarnée par la belle Dorothy Dandridge connue comme étant la première afro-américaine à s'être imposée à Hollywood avec "Carmen Jones" (1954) et "Porgy and Bess" (1959) tous deux de Otto Preminger. Tamango est joué par Alex Cressan pour qui ça restera l'unique rôle. Notons le rôle du docteur Corot interprété par Jean Servais grand second rôle français vu entre autres dans "Les Misérables" (1934) de Raymond Bernard, "Du Rififi chez les Hommes" (1955) de Jules Dassin, "La Fièvre monte à El Pao" (1959) de Luis Bunuel et "L'Homme de Rio" (1964) de Philippe De Broca, puis en moisn connu on peut citer tout de même Doudou Babet acteur martiniquais vu dans "Notre-Dame de Paris" (1956) de Jean Delannoy et "Cent Mille Dollars au Soleil" (1963) de Henri Verneuil. On reconnaîtra aussi Roger Hanin qui n'est pas encore au vedettariat avec "La Valse du Gorille" (1959) de Bernard Borderie et qui ne deviendra très populaire que à la télévision avec le téléfilm à succès "Au Bon Beurre" (1980) de Edouard Molinaro... Cette adaptation épure beaucoup la nouvelle de Mérimée, en extirpant des paramètres qui changent en profondeur le fond du propos. Ainsi rappelons que chez Mérimée l'histoire se déroule en 1812 Tamango est le chef de tribu qui vend ses semblables au négrier, et qu'il est l'époux de Ayché qu'il a vendu alors qu'il était ivre !... etc... Jusqu'à la fin dont l'issue de la mutinerie n'a plus rien à voir. Le scénario du film est plus classique, l'intrigue moins dense avec une Ayché qui est déjà esclave avant de connaître un tamango qui n'a jamais été chef vendeur d'esclaves.

Plus d'ambiguité avec un trio autour de Ayché, plus la complexité d'un Tamango qui se retrouve enchaîné avec ceux qu'il aurait vendu. Sur ce point on peut dire que le film reste une déception, retirant toute l'audace de la nouvelle où le manichéïsme était absent tout en fustigeant l'esclavagisme. Ainsi le capitaine Reinker n'est pas un tortionnaire aveugle, le négrier n'est pas à l'image des pires images d'épinal, les esclaves sont pour la plupart des guerriers dint évidemment Tamango modèle icônique du guerrier africain fort et charismatique. Mais si le film se fait plus linéaire, avec une trame plus limpide il se rattrape avec une fin qui évite le happy end hollywoodien. Néanmoins, on se laisse immerger dans ce périple funeste où les esclaves rêvent purement de liberté mais où les blancs sont aussi en proie à une vie meilleure. Les acteurs sont excellents, avec en prime le charme à l'érotisme discret de Dorothy Dandridge... Pour l'anecdote, ironie du sort, dans la nouvelle Tamango meut d'une maladie qui peut-être la pneumonie ou la pleurésie, et le réalisateur du film John Berry mourra justement en 1999 de pleurésie...

Note :