La mafia fait la loi

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à StudioCanal pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « La mafia fait la loi » de Damiano Damiani.

« Je savais qu’il finirait ainsi. Certains puent le cadavre même de leur vivant »

1961. À peine arrivé dans une petite ville de Sicile, le capitaine Bellodi est chargé de mener une enquête sur l’assassinat d’un entrepreneur local en froid avec la mafia. Alors que son enquête le mène sur la piste d'un règlement de comptes impliquant la mafia, il se heurte aux relations politiques de cette organisation criminelle. Seule une femme, témoin du meurtre, est susceptible de l’aider...

« Personne n’a rien vu ni entendu. Nous sommes en présence d’une population d’aveugles et de sourds qui ne voient bien que pour tirer »

Vu de France, le nom de Damiano Damiani aura tendance à être injustement associé, de façon assez réductrice, au western spaghetti. La faute au film « Un génie, deux associés, une cloche » (1975), qu'il coréalisa avec Sergio Leone et qui repasse inlassablement depuis quarante ans à la télévision. Pour autant, la prolifique carrière du cinéaste mérite bien mieux que cette considération réductrice et mérite d'être redécouverte plus avant. Car Damiano Damiani, d'abord connu pour ses talents de scénariste (« La chronique des pauvres amants », « Les bateliers de la Volga »), fut surtout l'un des grands artisans du cinéma politique italien des années 60 et 70. Avec, en particulier, une série de films centrés sur la mafia et, à travers elle, la corruption des élites italiennes (« La mafia fait la loi », « Seule contre la mafia », « Confession d'un commissaire de police au procureur de la république », « Nous sommes tous en liberté provisoire », « Perché si uccide un magistrato »...).

« Il faut en finir avec ce système, sinon j’ai peur que les meurtres soient sans fin »

Adaptation du roman éponyme de Leonardo Sciascia, maitre du polar politique italien des années 60 (dont les écrits inspireront également « A chacun son dû » de Elio Pietri puis « Cadavres exquis » de Francesco Rosi), « La mafia fait la loi » débute comme un polar assez classique, par le meurtre d'un petit entrepreneur. Mais ici c’est le contexte qui prime. Nous sommes en Sicile et les meurtres n’ont rien de tout à fait ordinaires. Et une vulgaire histoire d’adultère peut suffire à masquer un crime mafieux. Mais plus encore que le dénouement de l’enquête elle-même, ce qui prime ici c’est le duel feutré que se lancent à distance le jeune capitaine de la gendarmerie locale, un idéaliste du nord, et le parrain du village. Perchés chacun à l’autre bout de la place du village, les deux personnages s’épient, se toisent et se font face. Fièrement. Comme aux cartes, chacun jouera de son bluff pour faire passer des messages sibyllins à l’autre. En creux - et c’est là la partie la plus passionnante du film - Damiani nous décrit le fonctionnement de tout un système basé sur la corruption et l’omerta généralisées. Un système tellement bien huilé et ancré dans la population qu’on ne peut plus le vaincre. Même avec la meilleure volonté. Un fatalisme qui fait penser, toutes proportions gardées, au « » de Costa Gavras. Fort d’un scénario extrêmement habile et d’un casting de haut vol (Franco Nero, Claudia Cardinale, Serge Reggiani, Lee J. Cobb, Nehemiah Persoff), Damiano Damiani signe là l’un des sommets du film sur la mafia.

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Le blu-ray : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition, en version originale italienne (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’une préface de Jean-Baptiste Thoret (9 min.), de « La mafia fait la la loi » revu par Vito Zagarrio (40 min.) ainsi que de la bande-annonce du film.

Edité par StudioCanal dans la collection « Make my day! » (dont il est le treizième opus) dirigée par Jean-Baptiste Thoret, « La mafia fait la loi » est disponible en combo blu-ray + DVD depuis le 26 juin 2019.

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