Gloria Bell (2019) de Sebastian Lelio

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Le réalisateur chilien Sebastian Lelio avait été remarqué dès son premier long métrage avec "La Sagrada Familia" (2007), et on se rappelle son magnifique "Désobéïssance" (2018). Mais avec ce nouveau film le cinéaste rétro-pédale pour ainsi dire en signant son auto-remake de son film "Gloria" (2013) qui représentait la Chili à l'Oscar du meilleur film étranger. Le cinéaste justifie son choix : "J'ai bien entendu tourné Gloria sans me douter que j'allais en réaliser une nouvelle version cinq ans plus tard. Avec le recul, j'ai aujourd'hui l'impression qu'en 2013, Gloria était un peu en avance sur son temps et qu'il préfigurait, en quelque sorte, la place centrale des femmes dans notre société. Et j'ai le sentiment que cette nouvelle version est totalement ancrée dans son époque parce que nous avons eu cinq ans de débats et que l'aspiration des femmes d'un certain âge à être entendues, vues et respectées (et leur revendication à jouir de la vie) a soudain un caractère d'urgence."...

Aujourd'hui on suit donc Gloria, cinquantenaire qui aspire à la liberté mais surtout à trouver l'amour... Pour le rôle titre, Paulina Garcia (lauréate de l'Ours d'argent pour sa performance) laisse sa place à la sublime Julianne Moore, qui retrouve pour l'occasion son partenaire John Turturro 20 ans après le cultissime "The Big Lebowski" (1998) de frères Coen. A leurs côtés plusieurs seconds rôles, dont un fils incarné par Michael Cera vu dernièrement aux côtés d'une autre sublime rousse dans "Le Grand Jeu" (2018) de Aaron Sorkin, une fille jouée par Caren Pistorius inconnue pour pas longtemps déjà aperçue dans "Le Procès du Siècle" (2017) de Mick Jackson et "Mortal Engines" (2018) de Christian Rivers, et on reconnaîtra une certaine Jeanne Tripplehorn, has been qui cachetonne bien loin de son succès dans "Waterworld" (1995) de Kevin Reynolds... La première chose qui frappe est l'approche du personnage de Gloria par Sebastian Lelio, qui, après 5 ans, insiste beaucoup plus sur la dimension psychologiquement instable de son héroïne. Ici Gloria est sans nul doute dépressive ce qui contraste avec son film précédent où elle était plus forte. Ce choix s'impose alors au récit qui s'avère moins drôle, plus mélodramatique même si un optimisme sous-jacent tente d'exister.

Comme le dit Lelio lui-même son film est une "comédie musicale non assumée", en effet l'histoire respire au rythme de la musique que Gloria écoute en voiture. Ainsi on commence par des chansons tristes avec l'espoir de connaître l'amour pour terminer sur un titre d'une banalité confondante et si attendue ! Pourquoi pas, mais ce paramètre est utilisé de façon bien peu subtile qui démontre surtout un manque total d'inspiration, d'autant plus quand un cinéaste se copie déjà. Ensuite on remarque une situation presque pathétique, où comment notre héroïne ne comprend pas son ami qui reste au service de ses filles adultes alors même qu'elle ne peut assumer un simple pépin sans sa maman octogénaire. Tous ses choix semblent anachroniques quand on sait que Lelio désirait refaire son film en conséquence des avancées de ces dernières années. Autant dire qu'il est hors sujet, d'une autre époque tant "Gloria" (2013) est plus moderne de par sa force. Un auto-remake maladroit qui ne surnage que grâce à une Julianne Moore toujours étincelante de justesse et de grâce.

Note :