La colline de l'adieu

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à BQHL Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « La colline de l’adieu » de Henry King.

« Les gens du nord sont de faux chrétiens. Pour un peu de riz, ils n’ont aucun scrupules à se convertir »

Au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, communistes et nationalistes s’affrontent en Chine. Fuyant les combats, des réfugiés trouvent asile à Hong Kong, en particulier au Victoria Hospital pour les blessés et malades. Le journaliste américain Mark Elliott y rencontre l’Eurasienne Han Suyin, médecin et veuve d’un officier. S’ils tombent amoureux l’un de l’autre, leur passion provoque elle aussi des réactions passionnelles. Passionnément négatives de la part de l’entourage de Han qui la prévient du risque qu’elle prend à aimer un étranger…

« J’ai l’impression que le destin a des plans pour nous : ils vous a poussé à vous réfugier dans votre tour qui a attiré la foudre »

1955. Henry King, qui a déjà plus de quarante ans de carrière derrière lui est un vétéran d’Hollywood. Une figure respectée, sorte de vitrine de la Fox où il a passé l’essentiel de la carrière et où il vient de vivre une décennie particulièrement faste, marquée par le succès populaire de ses films d’aventures en costumes avec Tyrone Power (« Échec à Borgia », « Capitaine de Castille », « Le cygne noir »), ses drames religieux (« Le chant de Bernardette », « Une cloche pour Adano ») ou encore la comédie « Maggie ». Pour autant, après le mélodrame biblique « David et Bethsabée », Henry King va faire le choix de délaisser les grosses productions en costumes pour se consacrer principalement à l’adaptation d’œuvres de la littérature contemporaine, en s’intéressant notamment à Hemingway (« Les neiges du Kilimandjaro », « Le vieil homme et la mer », « Le soleil se lève aussi ») et à Scott Fitzgerald (« Tendre est la nuit », « Un matin comme les autres »). Il adapte ainsi en 1955 « Multiples splendeurs », le roman autobiographique de la romancière chinoise Han Suyin publié trois ans plus tôt et devenu entre temps un véritable best-seller emprunt d’un parfum de scandale.

« Je suis fière d’être eurasienne. J’aime à croire que nous combinons le meilleur des deux races. Nous sommes la solution à bien des problèmes. »

Car le récit de cette passion entre un américain blanc (et de surcroit marié) et une métisse anglo-chinoise choque profondément, tant en Chine qu’aux États-Unis ou au sein de la communauté britannique coloniale de Hong-Kong, où l’on réprouve ouvertement les couples « mixtes ». C’est donc à une œuvre sulfureuse que s’attaque ici le cinéaste, qui choisit pourtant de l’aborder - avec beaucoup de délicatesse - sous l’angle du mélodrame, genre alors très en vogue à Hollywood. D’ailleurs, comme chez son confrère Douglas Sirk (on pense d’ailleurs à son film « Tout ce que le ciel permet » et à l’obstacle de la différence d’âge entre ces deux héros), c’est bien la société et ses jugements de valeurs qui constituent un obstacle permanent à l’amour que se portent les deux héros et à l’épanouissement de leur relation. D’ailleurs, King n’a de cesse de dénoncer dans son film le racisme de la bonne société, notamment via l’attitude insupportablement condescendante de l’épouse du directeur de l’hôpital, qui finira pas licencier l’héroïne dont il réprouve les mœurs. Un racisme que l’on retrouve également au sein de la communauté chinoise, attachée à ses traditions. Seul bémol, on regrettera que l’audace du discours du cinéaste soit quelque peu atténuée par le choix franchement hypocrite de confier le rôle de l’héroïne eurasienne à Jennifer Jones, dont l’étrange beauté n’est en rien asiatique. En creux, le film constitue également un témoignage intéressant de cette époque troublée, marquée par le « Péril rouge » (en Chine mais aussi en Corée) et par les flux migratoires des populations fuyant la Chine pour se réfugier à Hong-Kong, comptoir portuaire anglais du bout du monde, qui n’était pas encore dominé par une forêt de gratte-ciels. Un film touchant, mais tout de même un peu désuet.

**

Le blu-ray : Le film est présenté dans un nouveau Master Haute-Définition, en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Aucun bonus ne vient compléter cette édition.

Edité par BQHL Editions, « La colline de l’adieu » est disponible en combo blu-ray + DVD depuis le 27 février 2019.

La page Facebook de BQHL Editions est ici.