Mandingo

Par Platinoch @Platinoch

Un grand merci à StudioCanal pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « Mandingo » de Richard Fleischer.

« Dans cette plantation, on a pour tradition de ne castrer ni les chevaux, ni les nègres »

En 1840, Maxwell, un riche propriétaire de Louisiane, oblige son fils Hammond à épouser Blanche, sa cousine, pour conserver la pureté génétique de son clan. Découvrant que sa femme n’est pas vierge, Hammond la délaisse et entame une liaison avec Ellen, une jeune esclave. Blanche se donne par vengeance à un jeune noir. Quand Blanche se retrouve enceinte, son beau-père se réjouit, mais la naissance du bébé, qui n’est manifestement pas de Hammond, va déclencher une horrible et tragique conclusion.

« Je ne leur apprends pas la religion : ils n’ont pas d’âme »

Pendant (trop) longtemps, Hollywood s'est caché derrière le code de censure et de bonne conduite pour s'éviter d'avoir à traiter des questions sociétales qui fâchent : le racisme (et notamment les questions liées à l'esclavagisme et à la ségrégation), les rapports sociaux ou encore le sexe. Autant de thèmes tabous qu'il était bienvenu de passer sous silence par souci de consensualité et donc de rentabilité. C'est ainsi que pendant des décennies fut cultivée une image idyllique du vieux sud, peuplé de grandes maisons blanches à colonnes, de gentilshommes aux bonnes manières un peu désuètes et de belles au tempérament de feu.

« Si tu me ramènes au petit blanc, il te demandera de me tuer... Es-tu son chien de chasse ? »

Avec « Mandingo », adaptation du roman de  Kyle Onstott, Richard Fleischer veut réaliser l'anti « Autant en emporte le vent ». Ou son double maléfique, à l'image de cette séquence d'ouverture sur le domaine décrépi de Falconhurst, sorte d'antithèse de la fastueuse Tara de la grande fresque de Victor Flemming. Un film sans concessions qui montrera explicitement et ouvertement au grand public ce qu'a réellement été l'esclavage. Des hommes (et des femmes) traités comme du bétail de leur naissance à leur mort. Examinés comme des animaux, qu'on reproduit et que l’on sépare (qu’ils soient liés par des liens de couple ou de filiation) pour garantir la rente financière. Mais Fleischer montre aussi ce que le cinéma n'avait jamais montré avant : le viol systématique et l'esclavagisme sexuel, les sévices corporels sadiques, les punitions sévères et dégradantes, et pire encore les combats à mort de « Mandingos », ces esclaves au physique de molosses dressés pour tuer. Les blancs ne sont ici pas en reste, présentés comme des arriérés consanguins brutaux et sans état d'âme. Le cinéaste brise même un tabou fondamental du cinéma américain en abordant la question de l'acte sexuel interracial qui finira par la mise à mort éminemment cruelle du nouveau-né métisse. A grands coups d'images chocs (le patriarche blanc qui tente de soigner ses rhumatismes en piétinant le ventre d'un enfant noir), Fleischer tend un miroir peu reluisant à l'Amérique et plus encore aux états anciennement confédérés, quelques années seulement après la fin de la ségrégation. Un film d'une puissance rare, qui ouvrira la voie à d'autres films contestataires, de « Mississippi burning » au « Django unchained » de Tarantino. Une claque. 

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Le blu-ray : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition, en version originale américaine (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.

Côté bonus, le film est accompagné d’une Préface de Jean-Baptiste Thoret (12 min.), du module « Mandingo revu par Samuel Blumenfeld, Jean-Loup Bourget et Olivier Père » (45 min.), « Autant en emporte le sang » : analyse de Jean-Baptiste Thoret (18 min.), d’une Interview (en français !) de James Mason pour l’émission « Cinescope » (1977, 30 min.) et de la Bande-annonce originale du film (3 min.).

Edité par StudioCanal dans la collection « Make My Day ! », « Mandingo » est disponible en combo blu-ray + DVD depuis le 5 décembre 2018.

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